(Syfia Grands Lacs/Rwanda) Manque de connaissances, de confiance en elles, de soutien familial, les femmes rwandaises restent cantonnées au petit commerce informel. Très peu d’entre elles se lancent dans les affaires.

Les femmes rwandaises sont rares dans les affaires et presque invisibles dans le commerce formel alors que, selon les statistiques du ministère du Commerce et de l’Industrie, elles occupent à 58% les affaires informelles comme le petit commerce, l’artisanat… Une étude menée en 2009 par Nil Bassin Initiative, un projet visant la valorisation du bassin du Nil dans 6 pays de la région – Kenya, Ouganda, RD Congo, Rwanda, Soudan et Tanzanie et – a montré que les femmes sont peu nombreuses dans le commerce transfrontalier des vivres tels que le haricot et le maïs alors que ce sont surtout elles qui les cultivent. Selon la même étude, les tâches ménagères, le manque de connaissances et d’expérience, le manque de capital pour obtenir des prêts ainsi que les réticences de leurs conjoints sont les principales raisons qui les empêchent de s’y lancer. C’est aussi le constat de l’ONU qui a recommandé au gouvernement rwandais, lors de la présentation de son rapport sur les droits humains en janvier 2011 à Genève, d’encourager les femmes à s’investir dans le secteur privé.

Manque d’information
Pour Janet Gahaya, une des seules Rwandaises exportatrices, les femmes ne sont pas suffisamment informées sur les marchés potentiels dans le pays et à l’étranger, ce qui les écarte du commerce formel. D’autant que, pendant longtemps, le commerce transfrontalier était exclusivement une affaire d’hommes.
Cependant Rose Nyamuhungu, chef d’entreprise depuis 5 ans, qui gère une petite usine de production de jus de maracuja à Kigali, estime que les femmes éprouvent aussi des difficultés liées à la culture : « Elles n’aiment pas le travail qui les sépare de leurs enfants pendant longtemps. Elles préfèrent faire le petit commerce à côté de chez elles pour s’occuper de leur famille’’. Les formalités administratives exigées pour s’établir officiellement constituent aussi un blocage, estime-t-elle. Pour les remplir, elle-même s’est fait aider par une amie qui s’était lancée avant elle dans les affaires. « Certaines femmes ne connaissent pas la procédure à suivre pour enregistrer leur affaire », constate de fait Annoncée Kuradusenge, coordinatrice du secrétariat chargé de l’artisanat au ministère du Commerce et de l’Industrie.

Difficultés d’accès au crédit
Elles ont aussi du mal à obtenir des crédits. Selon Rose, commerçante, les banques n’ont pas confiance dans les projets des femmes : « Nous éprouvons des difficultés à convaincre les banques qui croient que les hommes sont plus expérimentés que nous dans les affaires. » En outre, manquant de titres de propriété, elles n’ont pas de caution à présenter. C’est l’avis du Pasteur Mudagiri Joseph, directeur de l’Association pour le développement et la promotion en milieu rural (ADPR) : « Certains hommes refusent d’hypothéquer leurs maisons pour permettre à leur femme d’avoir un crédit ». De plus, selon Janet, les femmes ne savent pas bien rédiger des projets et des demandes de crédit. Delphin Ngamije, directeur de Duterimbere (« Avançons »), une institution de micro finance initiée par les femmes, constate pourtant que les femmes sont plus intègres que les hommes et remboursent mieux.
Le ministère du Commerce estime que la formation des femmes en gestion et en entreprenariat les aidera à se lancer. Dans ce cadre, une enquête est actuellement menée afin de mieux connaitre les femmes commerçantes et leurs besoins. Rose estime aussi qu’il faut renforcer la chambre des femmes au sein de la fédération du secteur privé, afin de pouvoir les orienter dans les affaires. Pour elle, l’appui de l’homme est indispensable : « Il faut qu’ils acceptent que leurs femmes peuvent réussir les affaires. Leur manque de soutien les bloque énormément. »
Aloys K., importateur de matériel électronique, reconnait d’ailleurs que les femmes qui ont des compétences font le commerce aussi bien que les hommes : « J’ai des collègues qui sont importateurs comme moi, mais elles font un travail remarquable et leurs affaires marchent. »

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posté par rwandaises.com