Le juge américain Theodor Meron.

Les survivants du génocide de 1994 perpétré contre les [Ba]Tutsi, ont exhorté les Nations Unies à ne pas renouveler en juin prochain, le contrat du juge américain très controversé, Theodor Meron.

Ils soulignent ses décisions critiquées à la tête d’un tribunal des Nations Unies, mandaté pour juger les acteurs du Génocide contre les [Ba] Tutsi.

Le juge, âgé de 88 ans, est le président du Mécanisme pour les Tribunaux Pénaux Internationaux (MICT), qui a repris le travail du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR).

Auparavant, il a dirigé la Chambre d’appel pour le TPIR et le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.

Pendant son mandat à la fois au « TPIR » et au » MICT », Theodor Meron a pris des décisions controversées – certaines unilatéralement – qui ont été considérées comme une attaque directe à la mémoire du génocide.

Ces décisions comprennent l’acquittement – en appel – de plusieurs suspects de génocide de haut rang, y compris d’anciens ministres du gouvernement génocidaire; réduire les peines pour certains condamnés, et accorder une libération anticipée à plusieurs autres condamnés.

Lors d’un événement organisé la semaine dernière pour commémorer les anciens employés de l’ONU qui ont été tués pendant le génocide, Egide Nkuranga, vice-président d’Ibuka, le représentant des survivants du génocide, a déclaré que la pression pour le non-renouvellement du contrat de Theodor Meron devrait être soutenue par tout le monde pour les intérêts des survivants.

« Parmi les membres du personnel des Nations Unies, il y a un homme qui nous fait tant de peur … Un vieil homme de quatre-vingt-huit ans demande un troisième mandat en tant que président du MICT », a déclaré M. Nkuranga. « Cela ne devrait pas être accordé. »

Parmi les décisions les plus contestées de Theodor Meron figurent le renversement de la peine d’emprisonnement à vie prononcée, par la Chambre de première instance du « TPIR » à l’encontre du génocidaire, le Colonel Théoneste Bagosora,  et l’acquittement de plusieurs anciens ministres.

En 2016, le Juge Meron a accordé une libération anticipée à Ferdinand Nahimana, le co-fondateur de Radiotélévision des Mille Collines (RTLM), sur ce qu’il a appelé « bonne conduite » malgré le fait que le condamné n’a jamais expié son rôle dans un génocide qui a couté la vie de plus d’un million de personnes.

« Nous avons peur qu’il libère aussi Bagosora et les autres. Et la chose effrayante est qu’il libère des architectes du génocide et réduit les peines des autres », a déclaré Nkuranga.

Laurent Nkongori, expert en droit international public, a déclaré au New Times que le juge Meron mérite de se voir exclu de tout autre emploi à l’ONU.

« Je pense que l’inquiétude devrait également passer par les canaux diplomatiques du Rwanda. C’est une question que le ministère des Affaires étrangères, la Commission nationale des droits de l’homme et les organisations de la société civile devraient assumer », a-t-il déclaré.

Ses décisions doivent être fortement contestées, a-t-il ajouté.

« Le Rwanda devrait maintenant aller dans les rues et montrer au monde comment le Juge Meron a encouragé l’impunité », a-t-il dit.

Il a également appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à modifier la loi sur la libération anticipée des condamnés à génocide.

Différents chercheurs internationaux qui ont suivi de près les travaux du tribunal de l’ONU et des systèmes des Nations Unies en général pendant les deux dernières décennies, disent que Theodor Meron semble avoir fait l’objet de controverses depuis sa nomination à la Cour en 2012.

Linda Melvern, une journaliste d’investigation britannique qui a écrit un livre sur l’ONU et deux autres sur les circonstances du génocide contre les [Ba] Tutsis, a également remis en question la libération de Nahimana, affirmant que cela reste l’une des décisions les plus controversées du juge.

Theodor Meron passe sous silence le fait que Nahimana n’a pas encore reconnu ses crimes et continue de nier sa propre responsabilité dans le génocide les [Ba] Tutsi de 1994. L’échec de Nahimana à coopérer avec le tribunal et à aider le Procureur à trouver justice pour les victimes, le Juge Meron considère cela comme un «facteur neutre», a déclaré Linda Melvern.

Elle a ajouté: « Meron ne semble pas avoir remis en question la revendication de Nahimana de travailler pour la paix et la réconciliation au Rwanda, une offre paru dans sa demande de libération anticipée rédigée par ses trois avocats. »

Pour aller de l’avant, le journaliste chevronné affirme que le sort des génocidaires rwandais est aujourd’hui exclusivement entre les mains du président du Mécanisme, le juge Meron, et que cette situation extraordinaire, avec sa reconduction en discussion, devrait être prise en compte.

Andrew Wallis, un chercheur spécialisé en Afrique centrale et orientale dont le travail couvre largement le Rwanda, dit que sans sa décision controversée, le Conseil de sécurité des Nations Unies devrait considérer son âge avancé, comme un obstacle à l’extension des contrats.

Il énumère quelques-uns des échecs de la cour de l’ONU sous la direction du Juge Meron, y compris l’incapacité d’arrêter plusieurs chefs présumés du génocide (y compris Félicien Kabuga, Augustin Bizimana et Protais Mpiranya).

« Le tribunal a permis aux centres de détention de l’ONU de ressembler davantage à une maison de repos qu’à une prison (et n’a pas demandé à la France de renvoyer deux suspects – le prêtre Wenceslas Munyeshyaka et l’ancien préfet Laurent Bucyabaruta  à Arusha) ». Andrew Wallis, est l’auteur d’un livre intitulé : Complice silencieux: l’histoire inédite du rôle de la France dans le génocide rwandais.

Il y a plus d’une dizaine d’années, ces deux cas ont été renvoyés à la France par le TPIR dans le cadre de sa stratégie d’achèvement, mais la France n’a rien fait pour y donner suite.

« Le Juge Meron mettra toujours l’auteur en premier et la victime en second. Avec l’architecte du génocide Théoneste Bagosora, entre autres, proche des deux tiers de sa peine, il est vital que le Mécanisme ne continue pas d’entériner ces premières sorties. Il est grand temps qu’un nouveau président, plus jeune et moins politiquement impliqué, soit nommé au MICT », ajoute-t-il.

Posté le 24/04/2018 par rwandaises.com