Le Dr Eugène Rwamucyo a été suspendu à titre conservatoire de l'hôpital de Maubeuge. Photos Ludovic Maillard. Nord Eclair Le Dr Eugène Rwamucyo a été suspendu à titre conservatoire de l’hôpital de Maubeuge. Photos Ludovic Maillard. Nord Eclair

Accusé par des victimes du génocide rwandais de 1994 de complicité active dans les massacres, le Dr Eugène Rwamucyo s’était vu refuser l’asile politique en France. Extraits du rapport de la commisson de recours des réfugiés qui motive sa décision.


Les conditions d’octroi de l’asile confient à la Commission de recours des réfugiés -placée sous le contrôle du Conseil d’État l’examen des recours formés contre les décisions de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). En mars 2002, Eugène Rwamucyo la saisit pour contrer l’avis négatif de l’OFPRA du 12 septembre 2002 qui lui refuse le statut de réfugié politique en France.
Médecin-chef du centre universitaire de Butare, au Rwanda, le Dr Eugène Rwamucyo -qui fait l’objet d’une fiche de recherche d’Interpol pour « génocide et crime de guerre »- a fui son pays dès la prise de Kigali par le Front patriotique rwandais en juillet 1994. Les trois mois précédant cette prise de pouvoir, les massacres perpétrés au Rwanda avaient provoqué la mort de 800 000 personnes, en majorité des Tutsis. Un génocide. Et reconnu comme tel. Eugène Rwamucyo, médecin formé en Union soviétique, appartient à l’intelligentsia hutu du nord du Rwanda. Il fuit d’abord à Goma, en RDC (République démocratique du Congo). Il semble qu’il ait également demandé, ensuite, l’asile en Côte d’Ivoire. Refusé. On le retrouve quelques années plus tard en France où il déclare être menacé par le régime en place à Kigali.

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« le croque-mort de Butare »

Après instruction de son dossier, l’OFPRA pointe « un faisceau d’indices significatifs et concordants démontrant l’implication de MrRwamucyo dans le génocide rwandais de 1994. L’Office a des raisons sérieuses de penser que l’intéressé a pris part, en toute connaissance de cause, à l’organisation des massacres, voire directement aux tueries dans la préfecture de Butare ».
Dans cette province rwandaise, selon des personnes vivant encore actuellement là-bas, le Dr Eugène Rwamucyo était surnommé « le croque-mort de Butare ». En 2003, il est entendu par la Commission des recours qui va rejeter à nouveau sa demande. Dans ses conclusions, elle observe qu’il « n’était pas seulement un universitaire et un médecin » mais qu’il avait « de fortes convictions politiques qui ont pu le mener à participer directement au génocide de 1994 ».
Elle rappelle ses responsabilités au sein de la communauté rwandaise quand il vivait en Union soviétique où il a fait ses études de médecin et s’est marié avec une compatriote et estime qu’il «  est de notoriété qu’à Butare, il a participé en 1994 à plusieurs réunions de planification du génocide rwandais, dont l’une en compagnie du Premier ministre de l’époque ». Elle ajoute qu’il « était chargé, au sein du centre universitaire de santé publique de l’assainissement, qu’il avait élaboré à ce titre un document préconisant les mesures d’assainissement et d’hygiène permettant d’éviter les épidémies ou leur propagation dues à la concentration et la putréfaction des cadavres dans les rues rwandaises en général et de Butare en particulier ». Conclusion de la commission : le Dr Eugène Rwamucyo « ne peut dès lors soutenir qu’il ignorait le génocide qui se perpétrait à ce moment-là dans son pays d’origine » et elle ajoute que « sa responsabilité dans le génocide rwandais est tenue pour établie par les organisations internationales et notamment le Haut commissariat aux réfugiés des Nations Unies qui l’a exclu du bénéfice du statut de réfugié politique en Côte d’Ivoire où il avait fait une première demande en janvier 1995 ».
Pour la Commission « ses explications en séance selon lesquelles les accusations portées contre lui sont une machination du gouvernement rwandais actuel avec la complicité des organismes internationaux sont dénuées de toute vraisemblance et ne peuvent être tenues pour sincères ».
Selon un observateur de la situation au Rwanda, « l’argument de la cabale montée par le gouvernement actuel est une défense typique des Rwandais ayant quitté leur pays et accusé de complicité dans le génocide ».
Le Dr Eugène Rwamucyo qui nie les accusations portées contre lui, refuse désormais de répondre aux questions précises sur les conditions dans lesquelles il a quitté son pays après le génocide et sur les massacres qui s’y sont déroulés en 1994.

Florence Traullé

 

 http://www.nordeclair.fr/Actualite/2009/10/21/rwamucyo-genocide-rwanda-butare-interpol.shtml

Posté par rwandaises.com