Des manifestants protestent notamment à Kinshasa et à Goma contre l’examen d’une nouvelle loi électorale, controversée, qui permettrait au président de se maintenir au pouvoir.
- Les mouvements ont fait onze morts, selon le porte-parole du gouvernement, vingt-huit d’après une organisation non gouvernementale.
« Kabila dégage ! » Le cri de colère qui traverse la capitale de la République démocratique du Congo (RDC) depuis trois jours ne s’épuise pas. Pour le troisième jour consécutif, les violences ont repris, mercredi 21 janvier, à Kinshasa, où la police est intervenue pour disperser de nouveaux rassemblements de jeunes gens hostiles au président congolais, Joseph Kabila. Les manifestations ont fait onze morts, selon les autorités, vingt-huit d’après une organisation congolaise de défense des droits humains. Le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, évoque également le chiffre de 343 arrestations.
Les manifestants protestent depuis lundi contre l’examen d’une nouvelle loi électorale, controversée. La manœuvre pourrait entraîner un report de l’élection présidentielle et permettre au président de se maintenir au pouvoir au-delà du terme de son mandat, en 2016.
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TENSIONS À KINSHASA ET À GOMA
Des émeutiers ont incendié mardi une mairie à Kinshasa, et de nombreux pillages ont eu lieu. Mercredi, une journaliste de l’Agence France-presse a entendu deux coups de feu sur un campus de Kinshasa, où un petit groupe de policiers faisait face à quelques dizaines d’étudiants. Toute la matinée, des affrontements sporadiques se sont poursuivis dans les environs de l’université entre étudiants et policiers. Le premier ministre s’est rendu sur place dans l’après-midi;
Le porte-parole du gouvernement a assuré dans l’après-midi que « malgré quelques foyers de tension (…) la situation est calme à Kinshasa », grâce à de nouvelles « patrouilles mixtes, mêlant policiers et militaires ». Le soulèvement a également gagné la ville de Goma (Est), où la police a dispersé une centaine d’étudiants avec des gaz lacrymogènes.
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ÉTAT DE SIÈGE
A Kinshasa, les accès à Internet étaient toujours coupés mercredi, et les services 3G et les SMS indisponibles. Les émissions de Radio France internationale (RFI), radio très écoutée en Afrique francophone, où les populations se méfient souvent des médias locaux, ont été temporairement interrompues, sans que l’on connaisse l’origine exacte de cette coupure.
La plupart des écoles étaient fermées, selon plusieurs témoins. L’archevêque de Kinshasa a appelé les autorités et les hommes politiques à ne pas « tuer » leurs concitoyens, et tous les Congolais à s’opposer à la révision de la loi électorale.
DEUX MOIS APRÈS LE BURKINA FASO
Le pays est-il en train de connaître une révolte populaire similaire à celle qui a récemment soulevé le Burkina Faso, conduisant au renversement de Blaise Compaoré ? Après vingt-sept ans de règne, ce dernier avait été démis de ses fonctions en quelques jours par d’immenses manifestations de rue, pour avoir voulu modifier la Constitution afin de pouvoir se représenter au scrutin présidentiel.
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En RDC, Joseph Kabila est arrivé à la tête de l’Etat à la mort de son père, Laurent-Désiré Kabila, chef rebelle qui avait chassé le maréchal Mobutu — à la tête d’une dictature durant trois décennies — par les armes en 1996 et a été assassiné en janvier 2001. Il a été élu président en 2006 lors des premières élections libres du pays depuis son indépendance de la Belgique, en 1960.
Il a été réélu en novembre 2011 pour un nouveau mandat de cinq ans à l’issue d’élections contestées par l’opposition et marquées par des irrégularités massives. La Constitution ne lui permet pas de se présenter pour un troisième mandat.
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