En ce début de la nouvelle année 2018, la situation se présente de façon plus que contrastée dans notre région. Encore une fois, seul le Rwanda fait figure d’oasis de paix et d’une douce prospérité qui, chaque année qui passe, se raffermit et force l’estime du monde. Certes que le pouvoir de Paul Kagame a, comme au Burundi et en Ouganda, modifié la Constitution afin de permettre au chef de l’Etat rwandais, alors frappé par la limite du nombre de mandats, de postuler encore. Mais là, pas la moindre contestation populaire, les seules voix discordantes venant toutes de l’extérieur du pays, chez des opposants installés en Belgique, France ou Etats-Unis.
Bien plus, Paul Kagame a été élu avec plus 98% de voix, un score soviétique qui sert de pain béni à ses détracteurs étrangers, au premier rang desquels figure Kenneth Roth, le patron de Human Right Watch qui, décidément, fait de l’opposition systématique au pouvoir rwandais. Pourtant, des journalistes d’une BBC tout aussi virulente contre ce que la radiotélé publique britannique qualifiait par avance de «mascarade électorale», sont venus à Kigali et se sont installés dans un centre de vote du début à la fin des opérations électorales, c’est-à-dire jusqu’au comptage de voix, bureau par bureau. Eh bien, dans ce centre de vote, le résultat dépassa les 98%, devant leurs yeux hagards ! Ils en eurent le souffle – ou plutôt le commentaire – coupé.
Que dire alors ? Que sans doute le peuple rwandais a désormais d’autres préoccupations. Depuis l’avènement de Paul Kagame au pouvoir, ce peuple a appris à bâtir une nation, à dépasser les carcans ethniques meurtriers d’un passé encore récent qui ont plongé le pays dans une mer de sang en 1994. Les Rwandais construisent ensemble un pays débarrassé de la corruption ; propre, ordonné et discipliné ; qui assure une couverture maladie à la quasi-totalité de son peuple et qui se projette résolument dans l’héritage panafricain des pères de l’indépendance, les Kwamé N’Krumah, Patrice Lumumba, Julius Nyerere ou encore Jomo Kenyatta.
En effet, après avoir ouvert les frontières de son pays aux frères et sœurs d’Afrique qui n’ont plus besoin de visa pour y entrer, c’est tout logiquement que Paul Kagame prend la présidence de l’Union africaine à l’issue d’un sommet consacré, justement, à ce qui lui tient tant à cœur : la zone de libre-échange continentale africaine et le protocole sur le commerce et les services. Sans nul doute, le Rwanda continuera son bonhomme de chemin dans la tranquillité tout au long de cette année.
A l’inverse, la RDC et le Burundi sont lancés sur des trajectoires incertaines. Le Congo-Kinshasa d’abord. L’année 2017 a été chaotique sur presque tous les plans. On a enregistré une suite sans fin de marches réprimées, avec beaucoup de sang des morts et des blessés quasiment sur l’ensemble du territoire national. Dans le Kasaï, une milice se revendiquant de l’ancien chef traditionnel Kamuina Nsapu tué en août 2016, a semé la barbarie avec des décapitations d’innocents, même des inspecteurs de l’enseignement venus apporter les examens d’Etat aux élèves de terminale à Kazumba. Cette sauvagerie a été suivie par une répression brutale de la part des forces de l’ordre qui, à leur tour, ont tiré à l’aveuglette sur tout ce qui bougeait. Bilan : plus de 3000 morts. C’est une plaie béante qui s’est ouverte au centre du pays, et on n’en a pas encore soldé les conséquences.
La seule lueur d’espoir a été la publication du calendrier électoral par la CENI qui fixe les scrutins présidentiel, législatif national et législatif provincial au 23 décembre 2018. Ce calendrier a été salué par toute la communauté internationale, de l’ONU à l’UA, en passant par les USA, la SADC, la CIRGL et l’Union européenne. Cependant, comme un bon mathématicien expert dans l’optimisation linéaire, Christophe Nangaa a truffé son calendrier de tellement de contraintes que certains en viennent à douter de son réalisme.
Face, d’une part, à un pouvoir qui refuse plus que jamais à appliquer les mesures de décrispation contenues dans les deux accords, c’est-à-dire, essentiellement, abandonner les poursuites contre Moïse Katumbi, le principal candidat à la présidentielle de l’opposition et, de l’autre, une opposition qui jure sur une transition sans Kabila avec en renfort l’Eglise Catholique romaine du pays, nul ne peut prédire comment va évoluer la situation déjà caractérisée par le marasme économique et social et une misère criante.
Le tableau au Burundi n’est guère reluisant. Tout au long de l’année, le régime de Pierre Nkurunziza a continué de se refermer – et de s’isoler du monde et de la région. Les dernières négociations à Arusha auxquelles, pourtant, le facilitateur avait pris soin de ne pas inviter la plus grande plateforme de l’opposition, le CNARED, ont quand-même échoué. Pendant ce temps, la CPI a ouvert une enquête sur les crimes commis dans le pays peu avant le retrait du Burundi de cette juridiction internationale. Nul ne peut dire à quoi peut bien aboutir cette enquête dès lors qu’on sait que la CPI privilégie la responsabilité des supérieurs hiérarchiques. Mais, pendant ce temps, Pierre Nkurunziza fait la politique de l’autruche : la tête bien enfoncée dans le sol, il refuse de voir qu’une épée de Damoclès pend au-dessus de son crâne. Il a même décidé de modifier la Constitution pour se permettre une présidence qui ira, en théorie, jusqu’en 2030. Que la crise au Burundi soit née de sa décision d’obtenir un troisième mandat lui importe visiblement peu.
Entre les deux, c’est-à-dire le Rwanda d’un côté, le Congo et le Burundi de l’autre, l’Ouganda tient une position médiane. Fin décembre, Yoweri Museveni a promulgué la révision de la Constitution dont a été supprimée la limitation des mandats. Il pourra donc postuler en 2021, et autant de fois par la suite. Les sondages avaient démontré que son peuple était opposé à cette révision de la loi fondamentale – jusqu’à 80% d’opinions contre. L’église catholique aussi. Une bataille rangée a eu lieu au sein de l’hémicycle de l’assemblée nationale. Des députés d’opposition ont même été arrêtés au siège du Parlement. Mais le vieux chef de l’Etat y est quand même allé. Pourtant, ici, il n’y a pas eu de grandes manifestations contre le régime, et, donc, pas de répression.
Ce que, malgré tout, comparé à ses prédécesseurs et malgré ses faiblesses, Yoweri Museveni a offert à ses compatriotes une qualité de vie acceptable. Avec un budget de 8 milliards de dollars pour ses 38 millions d’habitants, l’Ouganda peut consacrer de ressources acceptables au social de son peuple.
Alors, que réserve 2018 aux Grands Lacs ? Les réalités sont contrastées. Il appartiendra à chaque dirigeant de pays qui composent la région de bien réfléchir à la situation particulière de sa nation, de bien analyser les sujets de discordes qui déchirent le tissu social, afin d’y apporter la meilleure solution. C’est notre souhait à chacun de nos pays pour cette nouvelle année.
En attendant, c’est avec un plaisir renouvelé que je tiens à remercier, au nom de notre petite équipe qui tient notre site, pour la confiance que vous nous avez témoigné depuis nos débuts il y a de cela un peu plus de quatre mois. Grâce à vous, nous sommes déjà référencé par tous les moteurs de recherche sans le moindre effort de notre part. Je vous prie de continuer à nous faire confiance et vous présente nos vœux les meilleurs pour 2018.
Posté le 15/01/18 par rwandaises.com