Le gouvernement rwandais a exhorté le Mécanisme du Tribunal Pénal international (MICT) à ne pas accorder une libération anticipée à trois condamnés qui ont joué un rôle déterminant dans le génocide de 1994 contre les [Ba] Tutsi, a appris The New Times.
Le trio qui comprend le Colonel Alloys Simba, Dominique Ntawukuriryayo et Hassan Ngeze, ont fait la démarche auprès du Mécanisme – qui a succédé au « Tribunal Pénal International pour le Rwanda » (TPIR) – afin d’obtenir une libération anticipée.
Hassan Ngeze est un célèbre journaliste virulent, rendu célèbre par sa publication des soi-disant 10 commandements des [Ba]hutu, qui faisaient partie de la propagande anti-[Ba]Tutsi, un outil majeur dans le génocide contre les Tutsis.
Il se trouve actuellement au Mali où il purge une peine de 35 ans de prison, peine encourue lors de l’Appel qu’il avait introduit suite à sa condamnation à vie décidée en première instance par le TPIR.
Outre la propagande anti-Tutsi virulente qu’il a publiée dans son journal « Kangura », Hassan Ngeze a participé activement aux massacres dans sa préfecture natale de Gisenyi, actuellement le district de Rubavu.
Pour Dominique Ntawukuriryayo, un ancien sous-préfet de Gisagara dans l’actuelle province du Sud, il a demandé une libération anticipée à la suite d’une condamnation à 20 ans de prison qui lui a été infligée en 2012.
Dominique Ntawukuriryayo figurait en bonne place dans les tueries sur la colline de Kabuye à Gisagara où il attirait avec tact les [Ba]Tutsi en les promettant de les protéger, alors qu’il avait pour seul but de les remettre à la milice, sans aucune chance de s’échapper.
Alloys Simba, qui purge depuis 2007, 25 années d’emprisonnement (Chambre d’Appel du Tribunal), a supervisé les massacres de milliers de [Ba]Tutsi dans l’actuelle Province du Sud où il avait été nommé chef de facto de la force militaire et paramilitaire, principale machine à tuer de la région.
S’exprimant à New Times, la source a déclaré que Kigali s’est fortement opposé à la demande, soulignant un certain nombre de raisons, y compris la gravité du crime de génocide pour lequel ils ont été condamnés, le manque de remords de la part des condamnés, et l’impact qu’aurait leur libération sur les survivants du génocide.
Cette position est conforme à la position du gouvernement rwandais réitérée la semaine dernière par le Ministre de la Justice et Procureur Général, Johnston Busingye, lors d’une visite au siège du tribunal à Arusha, en Tanzanie, où il a également demandé une audience publique sur les demandes les condamnés.
Le Rwanda, selon notre source, a également offert de présenter ses arguments devant le Mécanisme, et de présenter des témoins experts, entre autres, pour attester des souffrances continues que la libération anticipée des génocidaires a apportées aux survivants du génocide.
Pas moins de 10 condamnés du TPIR ont déjà bénéficié d’une libération anticipée; décisions principalement attribuées à l’actuel président du tribunal, Theodor Meron, en sa qualité de chef du mécanisme ou de Président de la Chambre d’appel.
Theodor Meron se trouve être à la base de l’acquittement de plusieurs cerveaux du génocide, y compris d’anciens ministres du gouvernement génocidaire qui avaient été condamnés par la Chambre de première instance, tout en réduisant considérablement les peines de plusieurs autres en appel.
Le Rwanda est mis sous pression par un préavis extrêmement court
Pendant ce temps, The New Times a appris que le Tribunal a donné au Rwanda seulement 14 jours pour soumettre son opinion concernant les demandes de libération anticipée émanant des trois condamnés.
Ceci est surprenant compte tenu du fait que certaines des demandes ont été soumises à la cour depuis des mois, et dans certains cas, depuis des années en arrière.
Par exemple, Simba a soumis sa demande de libération anticipée dès 2016, tandis que Ntawukuriryayo a déposé sa demande l’année dernière, mais le gouvernement du Rwanda n’a été invité à soumettre son avis que le 27 avril dernier, ne leur accordant que deux semaines pour donner son avis.
Dans le cas de Ngeze, il a informé le « MICT » de sa demande de libération anticipée en mars 2018, et le tribunal n’a informé le gouvernement du Rwanda que le 3 mai dernier.
Bien que le Rwanda soit une partie centrale dans les procédures du tribunal, il n’a jamais été demandé au tribunal d’émettre un avis sur la décision d’accorder une libération anticipée à tout condamné précédemment libéré.
Plusieurs experts ont remis en question la logique et la légalité des précédentes libérations anticipées, en particulier si l’on considère que le mécanisme, ou le tribunal avant lui, n’a pas consulté Kigali.
Le condamné le plus récent à être libéré est l’idéologue du génocide Ferdnand Nahimana, qui en 2016 a été libéré au début de sa peine de 30 années, soit disant « pour sa bonne conduite ».
Certains rapports ont souligné l’existence d’un « axe du mal » entre ceux libérés par le Tribunal du Génocide de l’ONU, ceux qu’il a acquittés et les anciens avocats du TPIR dans le but de continuer à pousser un récit qui nie ou banalise le génocide contre les [Ba] Tutsi. .
Posté le 15/05/2018 par rwandaises.com