Un général de division français en retraite dénonce les «fautes» de Paris au Rwanda avant et pendant le génocide contre les Batusi en 1994, dans un entretien à Mediapart et Radio France diffusé aujourd’hui.»

Aujourd’hui âgé de 84 ans, Jean Varret est nommé fin 1990 chef de la Mission militaire de Coopération (MMC). A Kigali, le colonel rwandais Pierre-Célestin Rwagafilita, chef d’état-major de la gendarmerie, vient lui demander des armes lourdes pour faire du maintien de l’ordre, en lui expliquant: «Je vous demande ces armes, car je vais participer avec l’armée à la liquidation du problème. Le problème, il est très simple : les[ Ba]Tutsi ne sont pas très nombreux, on va les liquider». De retour à Paris, le général Varret rend compte du risque de soutenir un pouvoir obsédé par la menace d’une «cinquième colonne» tutsi, au moment où le Front patriotique rwandais (FPR, ) mené par Paul Kagame tente d’entrer au Rwanda depuis l’Ouganda. Le général est lu, mais personne ne l’écoute, affirme-t-il.

Des accusations totalement réfutées par l’amiral français Jacques Lanxade, ancien chef d’état-major particulier (1989-1991) de François Mitterrand, puis chef d’état-major des armées (1991-1995). «Quand des informations comme celle de Jean Varret arrivent, elles justifient notre présence. Varret a eu raison de dire ce qu’il a dit, mais on ne peut pas en tirer la conclusion que nous avons été imprudents», a-t-il déclaré à Mediapart. «Notre intervention visait à éviter que le gouvernement s’effondre et ne tombe dans la guerre civile. Qu’aurions-nous dû faire? Partir ? Mais alors c’était la guerre civile tout de suite», poursuit-il.

Mais du point de vue de Jean Varret, «certains militaires à des postes-clés ont été trop loin, parce qu’ils n’ont pas voulu prendre en compte les risques de cette politique de soutien à Habyarimana (président rwandais, un [Mu]Hutu, dont l’avion est abattu au-dessus de Kigali le 6 avril 1994, marquant le début des massacres à grande échelle)». «La coopération avait pour mission d’aider à former, d’équiper, mais certainement pas à combattre. Et je pense que ce lobby militaire a été plus enclin à aider au combat», juge-t-il. «Aucun civil ou militaire n’aurait souhaité le génocide. Aucun. Par contre, certains n’ont pas pris le risque au sérieux», conclut-il.

Publié Par  Le Figaro avec AFP

Posté le 16/03/2019 par rwandaises.com