Les intellectuels ugandais capables de s’exprimer sont contre l’aventure guerrière que le Président ugandais est entrain de mijoter contre le Rwanda par le biais des mouvements armés rwandais de RNC et des FDLR mais aussi par son alliance complice secrète avec le Burundi actuel qui ne cache pas ses sentiments ethnisants promus en politique officielle de ce voisin sud du Rwanda. Un médecin cardiologue ugandais exerçant en exil désapprouve lui aussi les desseins bellicistes de ce septuagénaire.
Le cardiologue consultant Dr Kiyingi qui a déjà tenté de se présenter à l’élection présidentielle contre le Président Kaguta Museveni, a eu un entretien avec le quotidien de Kigali, The New Times (TNT), dans lequel il énumère les maux qui ont caractérisé le règne de 33 ans de son adversaire politique, Yoweri Kaguta Museveni.
Dans l’interview, Kiyingi expose quelques raisons pour lesquelles Museveni est une honte, non seulement pour l’Uganda, mais également pour l’Afrique.
TNT : Vous êtes sorti pour contester la présidence (à vie) de Yoweri Museveni lorsque, en 2014, vous avez annoncé votre intention de vous présenter aux élections générales de 2016. Que s’est-il passé ?
Dr Kiyingi : Vous ne pouvez pas croire ce qui est arrivé. Museveni est devenu fou furieux ! Il a déchaîné sa colère sur moi. Ils ont commencé à m’accuser d’avoir assassiné des Cheiks musulmans. Ils m’ont appelé membre de l’ADF (groupe rebelle), sans aucune preuve.
Ils ont même adresse un mandat d’arrêt à l’Interpol contre moi. Ils
ont envoyé toute une délégation gouvernementale en Australie, affirmant
qu’ils cherchaient un terroriste recherché (moi !). C’est ainsi que
Museveni travaille pour renforcer sa dictature à vie.
Interpol a demandé à la délégation de produire des preuves, mais ils
n’ont pas pu en trouver. Alors, Interpol leur a dit d’aller se faire
pendre ! L’organisation leur a dit qu’elle ne travaille pas à la base
des rumeurs. Quand j’ai dit que je venais en Uganda, Museveni a
ordonné à ses militaires d’abattre l’avion dans lequel je serais !
TNT : C’est réellement arrivé ?
Dr Kiyingi :Vous ne savez pas quel genre de personne est Museveni ! Je vous dis sincèrement qu’il a ordonné à son armée d’abattre l’avion dans lequel je me trouverais s’il pénétrait dans l’espace aérien ougandais ! (Note de la rédaction : Kiyingi n’est pas allé en Ouganda pendant cette période).
TNT : Les Ougandais devraient-ils simplement renoncer au statu quo ?
Dr Kiyingi :Les gens ne peuvent pas
simplement rester assis et se résigner à cette dictature injuste. Mais
je conviens qu’il n’existe aucun moyen ordonné de destituer Museveni,
même si la Constitution ougandaise contient des dispositions.
Vous ne pouvez pas battre Museveni, même si vous mobilisez 99% de la
population. Il truquera, volera des votes et achètera des électeurs, et
en cas d’échec il aura recours à la violence.
La Constitution de l’Ouganda, que Museveni lui-même a signée, habilite le Parlement a destituer le Président si les conditions l’exigent. Il est certain que les conditions pour destituer Museveni sont plus que mûres. Mais nous savons aussi que le Parlement ougandais est impuissant.
Si Museveni souhaite que le projet de loi soit adopté, il appelle les Députés et leur donne chacun cinq milions de dollars (US) en une nuit, à Rwakitura (son pays d’origine). Ils vont s’exécuter le lendemain. Ce n’est pas un Parlement qui peut destituer Museveni.
La troisième alternative – qui se trouve également dans la Constitution – est la disposition qui stipule que si les deux premieres échouent, les gens doivent utiliser tous les moyens possibles. Ce sont des manifestations publiques. Se lever et dire haut et fort : « Nous sommes contre Museveni. L’Ouganda est contre Museveni ! « La Constitution me donne l’autorité et le droit de prendre position contre cet homme. »
TNT : Allez-vous vous représenter à la prochaine présidentielle ?
Dr Kiyingi : Exactement.
TNT : Museveni est le leader de l’Ouganda depuis 33 ans. Quelle est l’implication du « musevenisme » en Ouganda, et dans la région ?
Dr Kiyingi : Regardons le Kenya. Museveni
voulait prendre l’île Migingo du Kenya et une guerre a presque commencé.
Lors des élections au Kenya, Museveni a joué un role dans les violences
post-électorales. Il a envoyé son armée, qui a tué des civils.
Au Sud-Soudan, sans Museveni, le peuple du Sud-Soudan aurait réglé ses
différends il y a longtemps. Moins de gens mourraient. Au lieu de cela, à
cause de Museveni, le pays est plus brisé maintenant.
Avec la RD Congo, oh mon Dieu ! Museveni a violé le pays. Il a tué beaucoup de gens et traité des personnes pires que des animaux. Il soutient différentes milices pour causer des ravages. Pourquoi ? Parce que cela lui donne un prétexte pour commettre des crimes dans le pays. Même la communauté internationale le sait.
Quand la RD Congo a traduit l’Uganda devant la Cour Internationale de Justice, la Cour a jugé que l’Uganda devait verser 10 milliards de dollars, à la suite du pillage de Museveni en RD Congo.
En Somalie, ses troupes commettent des atrocités odieuses, notamment des viols et des pillages.
Pour le Rwanda, ses provocations quotidiennes contre ce pays sont claires pour tout le monde. Une guerre peut même éclater à cause de ces provocations. Museveni est une honte absolue pour l’Afrique !
TNT : Son ingérence semble bien pire au Rwanda que dans tous les autres endroits que vous avez mentionnés …
Dr Kiyingi : Nous savons ce qui a causé les
problèmes entre l’Ouganda et le Rwanda. Tout est à cause de l’arrogance
de Museveni. Il ne voit pas, même s’il s’agissait d’un fils et d’un
père – si c’est ainsi qu’il pense du Rwanda -, il doit se rendre compte
qu’à un moment donné, un fils grandit et deviant indépendant.
Si je grandis et que je quitte la maison de mon père et me marie, mon
propre père ne peut pas me suivre chez moi pour me donner des ordres
chez moi. Museveni a refusé d’accepter que le Rwanda soit comme un homme
adulte qui gère ses propres affaires. Il est coincé dans cet état
d’esprit particulièrement arrogant et ne reconnaît pas ce fait.
TNT : Le dirigeant Ugandais aime blâmer les étrangers, ou les « pays voisins », pour les crimes commis dans leurs pays. Ҫa sent mauvais car personne n’est jamais accusé ou condamné pour crime chez lui, même les assassinats les plus en vue, depuis l’assassinat de Kayiira. Qu’en dites-vous ?
Dr Kiyingi : Les ordres de tuer des gens émanent de Museveni. Il n’y a pas d’autre explication. Il est clair qu’il organise ces choses, puis blâme les autres. Il blâme le Dr Kiyingi pour les meurtres de Sheikh.
Il accuse les « pays voisins », avant même toute enquête. Il blâme tout le monde et utilise la presse corrompue ougandaise pour mener son jeu. C’est un expert en matière de truquage.
TNT : Museveni a récemment été présenté comme une « pièce à conviction » dans un procès impliquant un scandale international de corruption. Comment les choses sont-elles arrivées ?
Dr Kiyingi : Museveni a endormi les Ougandais ; ils ne peuvent pas demander des comptes. Toutes les institutions sont contrôlées par lui. L’Armée, la Police, le Judiciaire, le Parlement, tout. Il ne reste plus personne pour défendre la cause juste.
L’impunité, la corruption à tous les niveaux est le résultat de tout ce que l’homme a fait pour empêcher la responsabilisation en Ouganda. C’est une vraie parodie. Les choses ont atteint un point où une petite clique familiale gère à sa guise le pays. Et je ne parle pas de tout le sud-ouest de l’Ouganda, mais d’une petite clique familiale incroyablement corrompue.
C’est vraiment regrettable, il faut en finir et les Ougandais doivent comprendre qu’ils sont les seuls à le faire.
* Le Dr Aggrey Kiyingi, médecin-politicien ougandais résidant en Australie, suit de près l’évolution de la situation dans cette partie de l’Afrique, en particulier celle de l’Ouganda.
Avec The Newtimes
Posté le 03/04/2019 par rwandaises.com