Publié le 28/10/2008 à 21:12 Reuters

Les rebelles annoncent la chute de Rutshuru, dans le Nord-Kivu

LES REBELLES REVENDIQUENT LA PRISE DE RUTSHURU

Les rebelles tutsis du général congolais Laurent Nkunda ont annoncé avoir capturé mardi la localité de Rutshuru, dans le Nord-Kivu, dans l'est du Congo démocratique.

"Nous avons pris Rutshuru et la localité voisine de Kiwanja", a déclaré à Reuters Bertrand Bisimwa, porte-parole des forces rebelles.

Auparavant, le chef des opérations de l'armée pour le Nord-Kivu, le colonel Delphin Kahimbi, avait admis qu'il devrait abandonner la ville face à l'avance rebelle qui a débuté dimanche.

Le porte-parole militaire de la Mission des Nations unies au Congo démocratique, le colonel Samba Tall, a fait savoir que la Monuc s'efforçait de vérifier l'information, tout en affirmant que des casques bleus étaient toujours présents à Rutshuru.

A Kinshasa, le chef de la Monuc, Alan Ross, a pour sa part déclaré ne pas être au courant de la chute de la ville.

"D'après mes informations, la localité de Rutshuru n'est pas tombée", a-t-il affirmé lors d'une visioconférence avec des journalistes présents au siège new-yorkais des Nations unies.

D'après le porte-parole des rebelles tutsis, ces derniers ont également encerclé le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, Goma, situé à 100 km plus au sud.

Cette dernière information n'a pas, pour le moment, pas pu être confirmée de source indépendante.

Un convoi de la Monuc, chargé d'évacuer les employés humanitaires présents dans la localité, a dû renoncer à partir.

"Les travailleurs humanitaires n'ont pas pu quitter Rutshuru dans le convoi prévu. La situation est très tendue. Ils ont été bloqués à la fois par les soldats et par la population. Il y a également des attaques contre les installations des organismes humanitaires et des pillages", a dit Evo Brandau, porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'Onu (Ocha).

Lundi, la Monuc avait engagé ses hélicoptères contre les positions des rebelles au nord de Goma, essuyant les tirs de la DCA des partisans de Nkunda.

"La Monuc utilisera tous les moyens à sa disposition pour protéger les centres urbains comme Rutshuru, Sake et Goma", avait dit Michel Bonnardeaux, porte-parole de la force onusienne au Congo, qui compte 17.000 hommes, pour la plupart déployés dans l'est du pays.

UNE POUDRIERE

La localité de Rutshuru abrite des dizaines de milliers de réfugiés chassés de chez eux par les combats qui éclatent sporadiquement dans la région depuis deux ans.

Un employé de Médecins sans frontières (MSF) a déclaré à Reuters que des explosions étaient entendues à proximité de la ville. "A Rutshuru, la population fuit vers le Nord. On a entendu parler d'évacuation mais pour le moment nous n'envisageons pas de partir", a dit Axelle de la Motte-Saint-Pierre, n°2 de MSF au Nord-Kivu.

Face à l'aggravation de la situation, le commissaire européen au Développement et aux Affaires humanitaires, Louis Michel, a décidé de se rendre cette semaine à Kinshasa.

La secrétaire d'Etat adjointe américaine chargée des Affaires africaines, Jendayi Frazer, est pour sa part attendue jeudi dans le pays.

Le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Nkunda accuse l'armée congolaise de collaborer avec les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), qui rassemble des miliciens hutus et d'anciens soldats rwandais impliqués dans le génocide des Tutsis de 1994 au Rwanda.

Le Nord-Kivu est en proie depuis des mois à la rébellion du général Nkunda, un Tutsi congolais insurgé contre le pouvoir central de Kinshasa, lequel l'accuse de bénéficier d'appuis chez les Tutsis au pouvoir à Kigali, la capitale rwandaise.

L'est de l'ex-Zaïre est une poudrière depuis plus de dix ans. Les tensions ethniques qui avaient dégénéré en génocide en 1994 au Rwanda y ont été transplantées et alimentent le conflit dans le nord du Kivu.

Les combats entre l'armée régulière et les hommes de Nkunda, depuis qu'un accord de paix conclu en janvier a tourné court en août dernier, ont contraint 100.000 habitants à fuir, selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

Avec Yves Broussen et Joe Bavier, version française Guy Kerivel et Jean-Loup Fievet