posté le 29 octobre 2008
Au Kivu comme ailleurs au Congo, la population avait voté pour la paix et elle espérait bénéficier bientôt des dividendes de cette démocratie retrouvée. La tragédie de l’Est, le Kivu mais aussi l’Ituri, où tous les brasiers se sont rallumés, rend plus cuisante encore la déception quotidienne : les promesses n’ont pas été tenues, la corruption n’a pas été vaincue, le redressement, qui n’est pas assez soutenu par l’aide internationale, est trop lent pour répondre aux espérances et aux besoins.
Sur ce fonds de mécontentement latent, la colère suscitée par les évènements de Goma pourrait faire exploser le chaudron social et contribuer à la stratégie de la déstabilisation. La rancœur populaire visera peut-être le pouvoir en place, et elle réussira peut-être à l’ébranler sinon pire.
Mais elle fera d’autres victimes encore, à court et à long terme : Laurent Nkunda, ses compagnons de bataille et ses protecteurs rwandais assurent qu’ils se battent pour défendre les Tutsis congolais, une minorité qu’ils disent menacée, alors que depuis des années des efforts notoires ont été déployés pour leur faire place dans les institutions de la république, au même titre que tous les autres citoyens et effacer le souvenir des années de guerre.
En réalité, les rebelles, des militaires en rupture de ban, des tueurs recherchés par la justice internationale, des « soldats sans frontières » dont on connaîtra un jour les origines et les commanditaires, risquent de provoquer ce qu’ils prétendent vouloir éviter : une rancœur durable à l’égard des Tutsis congolais pris comme prétexte à leurs aventures guerrières. Dans les camps de déplacés déjà, on signale des tensions, des regroupements en fonction des différentes ethnies…
Quant au président Kagame, qui, à des degrés divers, est le « parrain « incontestable de Nkunda, et qui, après la terrible expérience du génocide, se montre si soucieux de la sécurité de son peuple, il devrait savoir qu’à terme, la dissuasion par la force ne représente qu’un éphémère rempart. La haine, semée par la violence, l’humiliation, voire le mépris finit toujours par refaire surface. Même si Nkunda ou d’autres sbires lui taillent une « zone tampon » le long de la frontière, ils ne le protégeront jamais contre la rancœur et le désir de revanche qui ont été inutilement semés chez ses voisins…
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