posté le 13 novembre 2008 

Renforçant les propos tenus par le vice ministre angolais des affaires étrangères Georges Chicoty, qui avait annoncé l’envoi de troupes au Congo, l’ambassadeur d’Angola à Bruxelles, M. Toko Serao, a déclaré publiquement, à l’occasion d’une réception à l’occasion de la fête nationale que son pays « s’opposait résolument à toute tentative de déstabilisation et qu’il ne pouvait permettre que des autorités élues et légitimes soient confrontées à une rébellion armée ». Plaçant cette intervention dans le cadre du «bon voisinage », dans « une optique de paix et de développement pour toute la région », l’ambassadeur a donc confirmé le soutien actif de Luanda. En 1998 déjà, à la demande de Laurent-Désiré Kabila qui voulait chasser Mobutu, l’Angola s’était impliquée dans la guerre, assurant le transport aérien des combattants et envoyant au front les « Tigres » c’est-à-dire des unités composées, entre autres, de descendants de réfugiés katangais ayant longtemps vécu en Angola. Ces Congolais d’origine avaient été intégrés au sein des forces armées angolaises et avaient combattu contre le rebelle Savimbi. En 1998 encore, alors que ses alliés rwandais et ougandais avaient lâché Kabila et fomentaient une nouvelle rébellion à l’Est, c’est l’Angola, avec la Namibie et le Zimbabwe, qui empêcha la chute de Kinshasa, soutint le pouvoir en place et empêcha probablement la balkanisation du pays. A l’époque, Kabila père avait invoqué le traité de défense qui lie les pays membres de la SADC (Conférence des pays d’ Afrique australe) une organisation économique régionale dont le Congo fait partie et dont les membres n’ont pas oublié les solidarités nouées du temps de la lutte contre l’apartheid (au point de soutenir jusqu’au bout Robert Mugabe, le président du Zimbabwe…)
Cette fois encore, le président Joseph Kabila, le week end dernier, a rencontré les chefs d’Etat d’Afrique australe à Johannesbourg. A l’issue de la réunion, la SADC a demandé un renforcement de la mission de la Monuc, a promis d’envoyer des conseillers militaires aux côtés des forces gouvernementales et les pays membres se sont réservé le droit d’envoyer des troupes au Kivu. La SADC a aussi dénoncé l’ «intransigeance » de Nkunda, accusé de vouloir déstabiliser toute la région en en particulier la zone des Grands Lacs. On ignore encore si l’intervention de l’Angola se fera sur une base bilatérale ou dans le cadre de la SADC, mais elle bénéficie de toutes façons de l’approbation de la partie sud du continent, peu désireuse de voir le Congo basculer à nouveau dans le chaos. Alors que le soutien de plus en plus évident que le Rwanda apporte au mouvement de Nkunda n’avait pas suscité de condamnation explicite en Europe (M. De Gucht avait même parlé de l’ « influence modératrice » de Kagame sur le chef rebelle) l’entrée en scène de l’Angola, et peut-être de la Namibie, est désormais qualifiée d’ «internationalisation » du conflit, car les Occidentaux redoutent un « remake » de la guerre de 1998-2002 qui s’était soldée par quatre millions de morts et la division du pays en plusieurs zones distinctes.
Même si on entend déjà parler portugais à Goma, les militaires gouvernementaux continuent à assurer qu’il s’agit de renforts venus de la base de Kitona, où des unités des FARDC ont été formées par des instructeurs angolais, qui les auraient accompagné sur le terrain.
Quant à Laurent Nkunda, déjà hostile au déploiement d’une force européenne (idée qui a été abandonnée et que la participation de troupes françaises rendait délicate à cause du passé de la France dans la région) il s’est également déclaré hostile à une éventuelle présence angolaise. Si cette intervention angolaise devait se confirmer, il est probable que le Rwanda, ouvertement cette fois, s’impliquerait dans le conflit. Bukavu, la capitale du Sud Kivu, redoute d’être prise à revers au départ de la frontière du Burundi et du parc de Kahuzi-Biega, où des éléments du CNDP se seraient déjà infiltrés tandis que l’aéroport de Kavumu, proche de la frontière, pourrait être occupé afin d’empêcher tout débarquement des alliés de Kabila…

le blog de notre envoyée spéciale en Afrique