(Syfia Grands Lacs/Rwanda) Les enfants qui ont été à l’école maternelle réussissent mieux au primaire. C’est le constat fait à Muhanga, au sud du Rwanda, où les parents, réunis en association, ont créé eux-mêmes une école maternelle accessible à tous et dont ils sont très fiers.
Cette maternelle est le fruit du travail de Abizeyimana Réobard. « J’ai pris cette initiative, après avoir remarqué que des enfants de 3 à 6 ans erraient ici et là, sans suivi. Certains devenant même des mayibobo (enfants de la rue) en abandonnant totalement l’école primaire pour vivre dans la ville », explique-t-il. De fait, 80 % des enfants reçus par le Bureau social de Gitarama, qui réintègre les enfants de la rue, provenaient de cette région. Sur la base de ces chiffres, Réobard a mobilisé les parents qui ont formé une association pour la promotion de cette école maternelle qui compte plus de 100 membres.
Des enfants gardés et éduqués
Chaque parent paye 500 Frw (0,9 $) de minerval par mois ou 1 500 Frw (2,7 $) par trimestre. Ntakirutimana Anita, qui a deux enfants au primaire qui sont passés par la maternelle, montre son reçu : elle vient de payer le trimestre pour sa fille. « Je veux qu’elle suive les pas de ses grands frères éduqués ici », insiste-t-elle. Le minerval sert à financer l’entretien des salles et à payer les deux maîtresses qui s’occupent des petits au quotidien. Elles leur apprennent l’hygiène, des récitations, des chansons, les salutations… Ces enseignantes ont été formées aux méthodes spécifiques de l’école maternelle par une stagiaire allemande du Centre de réhabilitation des handicapés de Muhanga. « Je suis très étonné de remarquer que malgré le peu de matériel, les enfants apprennent comme ceux à qui j’enseignais à Kigali il ya deux ans », constate Musengimana Libératha, récemment recrutée.
Jusqu’alors la maternelle était inaccessible à la grande majorité des familles. Il fallait débourser 5 000 à 45 000 Frw (10 à 90 $) par trimestre, ce qui faisait considérer ces écoles comme réservées aux riches. Avec la mise sur pied de l' »école de gardienne » Don Bosco, ils ont changé de mentalité. Mukashema Béatha, une maîtresse témoigne que depuis trois ans, 45 enfants en moyenne passent chaque année en première année primaire. L’école a déjà accueilli 200 enfants.
Les parents ont des ambitions
Les parents sont très satisfaits. Non seulement, les enfants ne traînent plus seuls dans les rues, mais ils acquièrent des connaissances utiles. « À cette heure, ma fille est à l’école. J’avais du mal à l’amener avec moi partout où j’allais. Elle est maintenant avec les autres en train d’apprendre », apprécie une femme en train de déraciner des patates. Nyiranziza Bellancille, une grand-mère, elle, se félicite du savoir de son petit-fils : »Il m’a appris que je suis sa ‘grand mother’ en anglais. Et puis, le soir, il apprend le calcul, l’anglais à ses petits frères. »
Satisfaits, les initiateurs de l’école sont également fiers de sa réussite. Leur rêve est devenu réalité. Le diocèse de Kabgayi, l’Association des Églises évangéliques, les commerçants de la région ont donné un coup de main en argent, portes, fenêtres, sable… Les parents ont retroussé leurs manches pour réhabiliter les vieilles salles dont les toits laissaient passer la pluie.
Malgré leurs modestes moyens, les parents ont des ambitions : »C’est nous-mêmes qui l’avons conçue… Elle doit être une école exemplaire dans tout le district », affirment Abizeyimana Réobard et ses co-initiateurs. Mais avec un nombre important de nouveaux candidats dans les années à venir, ils sollicitent de l’aide pour construire d’autres salles, tout en continuant à appliquer la même maxime : « Aide-toi, le ciel t’aidera ».