A la BBC Afrique

 

 

Mesdames, Messieurs,

En date du 26 septembre 2009, vous avez diffusé sur les ondes de votre radio, une information relative à la levée du contrôle judiciaire auquel Mme Rose Kabuye, directrice du protocole auprès du Président de la République Rwandaise, était soumise par la justice française depuis sa présentation volontaire devant cette justice qui l’avait convoquée. Cette information figure aussi sur votre site internet, sous le titre « Kabuye libre de ses mouvements ».

 

En sous-titre, vous expliquez que « derrière la levée du contrôle judiciaire de Rose Kabuyé, il y a aussi des enjeux politiques, Paris et Kigali étant dans une logique de rapprochement diplomatique »…

 

Après cette information initiale dont vous ne citez pas la source, mais qui signifie en réalité que la justice française est soumise à des pressions politiques visant à l’instrumentaliser en faveur d’un rapprochement entre Paris et Kigali, vous indiquez quelques faits en rapport avec le sujet annoncé dans le titre, avant de conclure par un commentaire parfaitement subjectif et dont la logique nous échappe. Vous écrivez en effet que: « la levée de ce contrôle judiciaire peut donc être perçue comme un gage de bonne volonté de la part de Paris dans un dossier que l’on pourrait résumer ainsi : d’un côté deux chefs d’état présssés de renouer… de l’autre la justice qui tente de résister aux pressions politiques pour poursuivre son enquête ».

 

Comment pouvez-vous dire – à la fois – que la justice française tente de résister aux pressions politiques pour poursuivre son enquête, et qu’ « en gage de bonne volonté de la part de Paris » selon vous, cette même justice française vient de céder en offrant à Kigali la levée du contrôle judiciaire sur Rose Kabuye ?

 

En outre, vous ne prenez pas la peine d’expliquer à vos lecteurs, les raisons de cette incroyable empressement de Paris à se rapprocher de Kigali, au point de chercher à exonérer les autorités rwandaises d’une accusation aussi terrible que celle d’avoir actionné eux-mêmes, avec cet attentat terroriste contre l’ancien Président, le détonateur d’un génocide dont furent victimes près d’un million de victimes innocentes.

 

Quand on sait que dans l’affaire de l’attentat contre le DC10 d’UTA descendu au-dessus du désert du Ténéré au Niger le 19 septembre 1989, la France a fait condamner par sa justice les plus hauts dirigeants libyens et qu’elle n’a accepté le retour de la Libye dans le concert des nations qu’après le versement de 10 millions de dollars aux familles de chacune des 170 victimes, on se demande bien ce que le Rwanda a bien pu offrir à la France, pour que sa justice soit plus complaisante à son endroit qu’à celui d’une puissance économique de dimension mondiale telle que la Jamahiriya libyenne! Il s’agit là d’une énigme géopolitique que vous ne devriez pas, en bons journalistes que vous devez être, laisser planer sans tenter de satisfaire la saine curiosité de vos lecteurs.

 

Dans l’affaire de l’attentat contre l’avion de l’ex-Président Habyarimana, – signalons-le à votre place – la pertinence des mandats d’arrêt lancés par l’ex-juge anti-terroriste Jean-Louis Bruguière semble se réduire comme une peau de chagrin, à mesure que ses témoins à charge se rétractent l’un après l’autre, ramenant tel un boomerang, la présomption de forfaiture dans le camp dudit juge.

 

Le dossier s’étant révélé vide dès que Rose Kabuye et ses défenseurs en eurent pris connaissance, le juge Trévidic qui a hérité de « l’affaire Bruguière » après le départ de celui-ci à la retraite, cherche à tirer la justice française du bourbier sans la faire sombrer dans le ridicule. C’est ce qui explique de manière beaucoup plus crédible, pourquoi Mme Rose Kabuye n’a jamais été traitée comme une terroriste par la justice française dès sa première audition. Visite de sa famille à Paris, retour au pays pour les vacances de Noel, reprise de son travail de directrice du protocole présidentiel avec congés lui permettant de se rendre aux convocations du juge… bref, un traitement sans rapport avec l’image d’une Ben Laden au féminin, que des milieux français ayant trempé dans la collaboration avec les auteurs du génocide des Tutsi au Rwanda tentaient de faire avaler à l’opinion mondiale. Des milieux dont le Président français semble vouloir se distancier c’est vrai, sans aller jusqu’à recourir au blanchiment gratuit d’accusés rwandais prétendument coupables d’un acte terroriste lié au déclenchement d’un génocide.

 

Avouez que cette explication tient mieux que les accusations de compromission que vous formulez envers la justice française apparemment sans vous en rendre compte, quand vous dites qu’elle vient de lever son contrôle judiciaire par complaisance avec les autorités d’un pays africain… dont les échanges économiques avec la France sont pratiquement inexistants.

 

Posté par rwandaises.com