(Syfia Grands Lacs/RD Congo) Les habitants des villages du territoire de Lubero au Nord-Kivu, incendiés par les rebelles hutus rwandais des Fdlr, refusent pourtant de quitter leurs terres. Les citadins des villes voisines font des collectes pour les aider et leur permettre de résister.
Après ces attaques, une opération de solidarité baptisée « une tôle pour un frère » a été lancée par l’église catholique de Butembo/Beni, pour venir aux sinistrés. Entre juin et août, plus de 3 000 tôles, des dizaines de sacs de vêtements et des ustensiles de cuisine ont été récoltés. « Dans un premier temps nous construisons 165 maisons pour les plus vulnérables », explique Fabrice Maghulu de la Caritas diocésaine.
« Personne ne vaincra notre détermination »
Dans les localités de cette contrée, les villageois n’utilisent que du chaume pour couvrir leurs maisons. A l’attaque des rebelles, les maisons incendiées sont vite parties en fumée. « Ils arrivaient la nuit et nous demandaient brutalement de sortir de nos maisons, puis ils y mettaient le feu sous nos yeux. Nous n’avions aucun droit de récupérer quoi que ce soit », témoigne Kabuyaya Katsongo, membre de la société civile de Kanyabayonga rencontré à Luofu, un village qui a connu les mêmes affres. Si l’insécurité est quasi permanente dans la région, l’incendie des maisons n’a été signalé que depuis avril. « On n’avait jamais assisté à une telle sauvagerie. Nous croyons qu’il y a quelque chose derrière ces agissements », raconte Kabuyaya. Animateur dans une radio de Kanyabayonga, Jean-Baptiste Kalekene pense qu’il y a une volonté politique pour pousser les gens à quitter leurs villages. « Notre seule façon de résister c’est de se résigner et de ne jamais partir », dit-il. Dans de nombreux villages attaqués, les habitants jurent en effet qu’ils ne peuvent partir et abandonner leurs terres. « Je suis née ici, mes grands-parents sont ici. Où vais-je aller vivre ? », interroge Georgette Masika, une vendeuse d’arak à Luofu. Ici, l’activité principale est l’agriculture. Pour Marc Musuku, « s’en aller est synonyme de laisser la place à ces voyous. Ce sont nos terres, nous y mourrons. » La société civile locale dénonce ce qu’elle assimile à une politique de la terre brûlée. Elle multiplie des marches de protestation et des pétitions. Mais l’insécurité persiste. « Le silence du gouvernement nous intrigue. Il y a des soldats pour nous sécuriser mais ils manquent de tout. C’est grave », enrage un activiste de la société civile. « Nous resterons sur nos terres pour faire comprendre aux bandits de tous bords que personne ne vaincra notre détermination », dit un autre activiste.
Solidaires envers les victimes
Depuis le début de ces drames, quelques Ong essayent d’apporter une aide aux victimes des attaques des rebelles. A Luofu, une Ong internationale a notamment construit des latrines en bâches, à côté des ruines des maisons incendiées. Ce que la population n’apprécie pas toujours. « Notre besoin primordial est la reconstruction de nos maisons, n’importe quoi pour nous reloger, mais ils ne nous ont pas écouté », se plaint un habitant. Ceux qui ont perdu leurs maisons sont hébergés par des voisins ou des membres de familles, qui partagent avec eux leurs repas. « Nous remercions ceux qui se penchent sur notre misère. Dieu les récompensera un jour », répète un habitant de Luofu dont la maison a été reconstruite. Lui aussi jure de ne jamais partir de son village.