Politique – Après dix années de lobbying et de tractations diplomatiques pour adhérer au Commonwealth, le Rwanda a été admis en l’an 2009 comme membre de ce bloc anglophone tout en annonçant la reprise de ses relations diplomatiques avec la France, rompues en novembre 2006.
Curieuse coïncidence, le gouvernement rwandais, par la voix de son ministre de l’Information d’alors, Louise Mushikiwabo, a annoncé, le 30 novembre dernier, la reprise de ses relations diplomatiques avec la France, après que ce petit pays d’Afrique centrale venait d’être admis comme membre du Commonwealth, une organisation regroupant essentiellement la Grande-Bretagne et ses anciennes colonies.
Selon la porte-parole du gouvernement de Kigali, Mme Mushikiwabo, qui a été immédiatement affectée au portefeuille des Affaires étrangères à la veuille de cette annonce officielle, l’admission du Rwanda au sein du Commonwealth a été basée sur plusieurs critères, dont notamment la démocratie après des élections libres et transparentes.
Dans la foulée, les officiels rwandais ont annoncé que le pays venait de renouer ses relations diplomatiques avec la France, à la suite d’une série de tractations diplomatiques qui avaient perduré depuis que les deux pays avaient fermé leurs ambassades respectives en novembre 2006.
Le Rwanda avait rompu ses relations diplomatiques avec la France le 26 novembre 2006, deux jours après que le juge antiterroriste français Jean-Louis Bruguière a émis des mandats d’arrêt internationaux contre neuf personnalités rwandaises dans une enquête sur l’attentat contre de l’avion de l’ex-président rwandais Juvénal Habyarimana.
Les roquettes qui ont été tirées dans la nuit du 6 avril 1994 sur cet appareil présidentiel rwandais, avec à son bord un équipage français, ont servi d’élément déclencheur du génocide au cours duquel plus de 800.000 membres de l’ethnie tutsie ont été tués entre les mois d’avril et juillet 1994.
Paradoxalement, cette inculpation des officiels rwandais par le magistrat français ainsi qu’une autre enquête du gouvernement de Kigali sur le rôle de la France dans le génocide de 1994, ont été les éléments moteurs de cette rupture, qui a coïncidé avec une volonté enthousiaste des autorités rwandaises d’adhérer au Commonwealth.
Sur le plan diplomatique, des sources officielles rwandaises affirment que la situation a changé, notamment avec l’élection en France du président Nicolas Sarkozy en 2007, qui a immédiatement nommé Bernard Kouchner, un diplomate familier avec les officiels rwandais.
A Kigali, la nouvelle patronne de la diplomatie rwandaise, Louise Mushikiwabo, a exprimé sa « satisfaction » suite à cette admission du Rwanda au Commonwealth, qu’elle a saluée comme la reconnaissance des progrès importants que le pays a accomplis au cours des quinze dernières années.
Mais pour ce qui est de la réouverture des ambassades entre Kigali et Paris, elle a simplement estimé que les deux pays avaient intérêt, en tant que membres des Nations unies, à reprendre leurs relations diplomatiques.
Néanmoins, une seule solution reste encore envisageable aux yeux des autorités de Kigali pour trouver une solution durable au différend qui avait conduit à cette rupture des relations: la levée des mandats d’arrêt émis par le juge français contre les officiels rwandais.
Une telle option est cependant toujours soumise à des contraintes dont, notamment, l’indépendance de la justice, qu’aussi l’Elysée que le Quai d’Orsay disent devoir respecter.
Après l’élection de Nicolas Sarkozy, son homologue rwandais Paul Kagame a déclaré publiquement et à diverses reprises qu’il y avait espoir pour l’actuel gouvernement français de travailler ensemble avec celui de Kigali pour trouver une solution à cette affaire.
C’est à la suite de cela et après une série d’entretiens entre Kagame et Sarkozy que le Rwanda déclara officiellement sa volonté de renouer ses relations diplomatiques avec la France, même s’il n’y avait pas encore une solution définitive à l’épineux dossier judiciaire impliquant des officiels rwandais.
Dans l’intervalle, le plaidoyer le plus fort se faisait pour le pays d’adhérer au Commonwealth, où le Rwanda est devenu, après le Mozambique, le deuxième pays à être admis au sein de cette organisation sans avoir de lien colonial ou constitutionnel direct avec la Grande-Bretagne.
Malgré le réchauffement des relations bilatérales entre le Rwanda et la France, le régime de Kigali avait imposé, depuis le mois de novembre 2006, plusieurs réformes visant notamment l’élimination du système francophone par substitution à la culture anglo-saxonne, selon des analystes de la scène politique interrogés par la PANA à Kigali.
Quelque quinze ans après le génocide, le Rwanda comme 54ème pays membre du Commonwealth accepte de privilégier l’anglais par rapport au français, une réalité qui coïncide avec la reprise des relations diplomatiques entre Paris et Kigali.
Kigali – Pana 11/01/2010
Par Aimable Twahirwa, correspondant de la PANA
Posté par rwandaises.com