Depuis des années, les grilles de l’ambassade de Belgique sont l’un des lieux les plus rébarbatifs de Kinshasa. Non seulement parce que sur l’ancienne « place Braconnier » s’entassent mendiants, handicapés, changeuses de dollars et autres vendeuses de fruits, mais surtout parce que chaque jour, sous la pluie et le soleil, des dizaines de demandeurs de visa font patiemment la file. Les uns souhaitent présenter leur dossier, les autres s’interrogent sur l’état d’avancement de leur demande ou ramènent des documents manquants. Dans ces files, on crie, on s’interpelle, on se chuchote quelques tuyaux pour faire avancer les choses, des tuyaux que les progrès de la biométrie et de l’informatique rendent de plus en plus aléatoires…
D’ici peu, les conditions pénibles de cette attente devraient s’améliorer sensiblement : en partenariat avec le Portugal et avec l’appui de la Commission européenne, la Belgique ouvrira une « maison Schengen » un centre qui accueillera les demandeurs de visa pour la Belgique, la France, le Portugal, l’Autriche, la Finlande, le Luxembourg et les Pays-Bas.
Déjà les travaux ont commencé dans des locaux cédés par l’école belge, et une modeste plaque argentée « maison Schengen » a été dévoilée par le ministre des Affaires étrangères Vanackere.
Ce dernier a souligné que la mission de ce centre sera de réceptionner les demandes de visa, insistant sur le fait que les « sollicitants » seront désormais accueillis dans des conditions plus dignes et plus respectueuses. Cette idée, visiblement, est chère au cœur du ministre : « bon nombre d’habitants de cette ville rêvent de venir en Europe, mais il est évident que ce ne sera pas possible pour tous. Mais même en cas de refus, il faut que la dignité des gens soit respectée, que le processus s’améliore… »
Selon le ministre, plusieurs raisons expliquent pourquoi la Belgique a pris l’initiative d’une « maison Schengen » : tout d’abord le fait que ce pays, fondateur de Schengen, a toujours tenu à être à la pointe des avancées en matière de coopération européenne, de circulation des personnes et d’amélioration du processus d’octroi des visas. En plus d’une exigence personnelle de dignité, le ministre insiste aussi sur les nouvelles techniques : la mise en œuvre de la biométrie (reposant entre autres sur les empreintes digitales) devrait rendre la fraude plus difficile. Les données ainsi recueillies devraient rejoindre une base de données commune aux Etats européens. Et cela afin, assure Vanackere, de rendre impossible le « visa shopping », où l’on voyait les demandeurs de visa tenter leur chance d’une ambassade à l’autre, tandis que les « petits malins » utilisaient le système dit « nkulu » littéralement « petits cochons », par lequel des musiciens, membres d’un orchestre ou suivants d’ un artiste connu, cédaient leur passeport dûment muni d’un visa en bonne et due forme afin que le précieux document serve plusieurs fois…
Si la Belgique a pris le leadership de cette « maison Schengen » c’est aussi parce que ses services consulaires accueillent bon an mal an entre 13 et 14.000 demandes de visa, dont 75% reçoivent une réponse positive, un chiffre important qui représente les trois quarts du « marché des visas » à Kinshasa.
A noter cependant que la « maison Schengen » ne représentera que la première étape de la demande de visa, celle de la constitution du dossier et de la demande. Les Etats européens en effet ne cèdent qu’à regret leurs prérogatives et l’évaluation, positive ou négative des demandes ainsi que le processus de décision demeureront de la compétence de chaque ambassade. Ces dernières devront aussi s’entendre sur la répartition des frais de visas, qui devraient alimenter le fonctionnement de ce nouveau service administratif.
Avant de quitter le chantier de cette maison qui deviendra un nouveau visage de l’Europe à Kinshasa, Vanackere insiste une fois de plus : « la procédure devrait devenir plus rapide et, quelle que soit la décision finale, il faut que nos hôtes soient accueillis de manière correcte, dans la dignité… »
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Posté par rwandanews.be