Bel exemple de realpolitik ! La rencontre entre les présidents Sarkozy et Kagame permet à la France de reprendre pied au Rwanda et de normaliser ses relations avec un partenaire important.

Bruxelles. Correspondance

À Paris comme à Kigali, on ne s’attend pas à des effusions, mais la rencontre entre Nicolas Sarkozy et Paul Kagame convient à chacun. « Un pays comme le Rwanda ne peut se payer le luxe d’avoir un ennemi qui, à son échelle, est une grande puissance », explique Servilien Sebasoni, conseiller en communication du Front patriotique rwandais (parti présidentiel) .

À Kigali, on estime que, depuis 1994, et le génocide (800 000 morts en majorité des Tutsis), la France aurait pu jouer plus positif au sein des instances internationales comme l’Union européenne, le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale. Si l’on ne s’attend guère à ce que Nicolas Sarkozy fasse oeuvre de repentance, on se réjouit toutefois du fait que sa visite mette un point final à l’attitude de ses prédécesseurs, qui considéraient Paul Kagame comme un partenaire infréquentable.

Le Rwanda, un marché

Pour Paris, cette visite consacre d’abord l’espoir d’un coup d’arrêt à la dégradation de son image dans la région. La publication, en novembre 2008, du rapport d’une commission d’enquête rwandaise incriminant le rôle de trente-trois personnalités françaises (dont Dominique de Villepin, alors directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères Alain Juppé) durant le génocide de 1994, avait pollué les rapports déjà tendus entre les deux États.

Au Rwanda, petit pays mais à haute valeur symbolique, la France a aussi des positions commerciales à reconquérir. Depuis 1994, Londres (Tony Blair est le conseiller politique de Kagame), Washington et d’autres l’ont devancée en tant que partenaires de ce pays classé par la Banque mondiale comme offrant un excellent environnement des affaires. En fait, le Rwanda est l’État le mieux structuré et le plus stable de la région, la plate-forme pour l’évacuation et la transformation des ressources naturelle du Congo tout proche.

Paris souhaite donc favoriser l’éclosion de projets « communs », notamment dans les domaines de l’énergie, de l’agriculture, de l’exploitation forestière. La décision, l’an dernier, de Paul Kagame et du président congolais Joseph Kabila d’exploiter en commun le gaz méthane du lac Kivu, pour produire de l’électricité, offre également des opportunités aux sociétés françaises.

La lettre Africa Energy Intelligence de Paris suggère que la visite du président Sarkozy pourrait déboucher sur une conférence internationale, à Paris et sur la construction du barrage hydroélectrique de Ruzizi III, en territoire congolais. Une conférence des bailleurs pourrait réunir, en mai ou juin, à Nice cette fois, les États de la Communauté économique des pays des Grands Lacs (Burundi, Rwanda, Congo-Kinshasa) .

François MISSER.

Source : OUEST-FRANCE

Posté par rwandaises.com