(Syfia Grands Lacs/Rwanda) La police nationale rwandaise se professionnalise : elle ne recrute que des jeunes qui ont fréquenté l’école secondaire, qui y trouvent un emploi utile au pays. L’efficacité des policiers est appréciée, mais certains se laissent tenter par la corruption.

Mi-janvier : des centaines de jeunes, filles et garçons, attendent à l’extérieur du stade de Gitarama, au sud du Rwanda. Ils sont venus en nombre, parfois de loin, pour tenter de se faire recruter dans la police. Ceux qui sont munis de tous les documents nécessaires – certificat médical, carte d’identité, inscription sur la liste – sont déjà à l’intérieur du stade, dans l’attente de l’examen. Les autres, qui ne sont pas en règle, patientent dehors. Certains sont embarqués dans la « panda gare » (« monte dans la camionnette »), le pick-up qui transporte habituellement bandits ou marchands ambulants: « Ceux-là ont des papiers falsifiés ou douteux. Nous allons suivre de près leur situation », explique un officier haut gradé de la police.
Selon l’administration policière, le pays a besoin d’un policier pour 1 000 citoyens, un taux qui est loin d’être atteint, sans préciser le chiffre de l’effectif actuel. La police continue donc à recruter. Mais pour être sélectionné, il faut être diplômé de l’école secondaire ou y avoir fait au moins quatre ans. « Je venais de passer trois ans sans emploi alors que j’avais un diplôme de l’école secondaire en agronomie. J’ai donc décidé en 2006 de postuler dans la police parce que servir mon pays c’est aussi un bon choix », témoigne N. Félicien, actuellement policier.

Un emploi ou un choix
Certains, plutôt que de rester au chômage chez eux, préfèrent valoriser ainsi leurs compétences. « J’avais fait cinq ans d’études secondaires. J’ai manqué de quoi terminer mes études. Je me suis inscrit dans la police », se félicite cette jeune fille, qui attend cette année les résultats de l’examen national qu’elle a passé en candidate libre grâce à son salaire de policier.
D’autres choisissent ce métier par passion. C’est le cas de ce gradué de l’Institut supérieur de la Santé, qui s’est inscrit à l’académie nationale de la police, au nord du pays. « J’aimais la police depuis mon enfance et j’ai préféré servir la nation et la police en tant que laborantin », affirme-t-il.
La tâche est pourtant plus difficile que ne le croient certains. « Les civils peuvent dormir, mais la police doit veiller 24 heures sur 24. Vous devez travailler dur pour protéger les citoyens de ce pays », a rappelé fermement le ministre de l’Intérieur aux 1 520 agents de police, diplômés en décembre dernier de la Gishari PoliceTraining School, après 16 mois de formation.
Ces jeunes gens et filles doivent être capables de faire face aux problèmes de sécurité tant nationaux qu’internationaux : « Nous voulons faire une police professionnelle, ce qui explique pourquoi nous devons les former et les équiper. Notre police ne sert pas seulement au Rwanda, mais aussi à d’autres missions internationales (Soudan, Liberia, Haïti, Ndlr) », souligne Emmanuel Gasana, le Commissaire général de la police.
Leur service est apprécié par de nombreux Rwandais qui estiment qu’un policier non instruit n’en est pas un : « Ils ont de la discipline et une formation dans ce qu’ils font, et, chaque fois qu’on a recours à eux on est sûr que le problème va être suivi de près », estime Emmanuel Munyangeyo, habitant de Muhanga.

La tentation de la corruption
Actuellement, un policier touche 53 000 Frw (90 $). Mais certains, à peine entrés dans ce corps, assoiffés d’argent se laissent corrompre pour gagner plus. L’an dernier, le rapport du bureau de l’ombudsman (médiateur chargé d’enquêter sur l’injustice, la corruption et autres infractions dans l’administration) a cité les policiers de roulage au premier rang des gens corrompus. Le Conseil des ministres a ainsi révoqué, en décembre dernier, 42 policiers officiers et sous-officiers. Des dizaines d’autres l’ont été les années précédentes pour des crimes allant de la corruption à l’assassinat.
Le ministre de l’Intérieur a annoncé qu’une liste des prochains révoqués était déjà prête. « La police ! C’est un métier à haut risque, car de l’Inspection judiciaire à la police routière, le policier est tenté par de lourdes sommes qui dépassent parfois de loin son salaire », souligne sous anonymat un policier qui affirme que certains ne résistent pas à la tentation de l’argent qu’on leur offre.

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Posté par rwandaises.com