(Syfia Grands Lacs/Belgique) L’île, une pièce de théâtre sud-africaine, va circuler en mars en RD Congo, au Rwanda et au Burundi. Elle met en scène la fraternité entre deux prisonniers face à l’arbitraire des pouvoirs. Symbole fort : les deux rôles sont joués par un Congolais et un Rwandais.
La pièce jouée par ces deux acteurs s’appelle L’île. Elle a été écrite par des auteurs sud-africains – dont deux ex-prisonniers – en référence évidente à Robben Island, le bagne de Nelson Mandela. Créée en juin 2009 au Théâtre de Poche, à Bruxelles, elle a été répétée à Kisangani, en République démocratique du Congo, et va tourner en mars dans ce pays, ainsi qu’au Rwanda et au Burundi.
Envie de pleurer
« Cette pièce m’a tout de suite parlé, explique Diogène Ntarindwa, un des acteurs, rwandais. C’est une fable sur la fraternité entre deux hommes, et sur la volonté des pouvoirs d’écraser les corps. La dimension universelle est évidente. » « Quand je monte sur scène, je pense aux prisonniers d’opinion dans les geôles de mon pays, ajoute son compère Ados Ndombasi, congolais. Quand je sors de chez moi, je vois la souffrance et la pauvreté dans les yeux de mes voisins. Si en plus, il n’y a pas de liberté d’expression… Hier soir, la représentation a été suivie d’un débat, animé par Amnesty International. J’ai eu envie de pleurer de joie en pensant que ces moments-là puissent se dérouler chez moi. »
La fraternité, Roland Mahauden, le directeur du Théâtre de Poche, a voulu la concrétiser en confiant les deux rôles à un comédien congolais et à un rwandais. « Il y a une grande solidarité entre les personnages. J’espère que le spectacle va être perçu comme pacifiant en RDC comme au Rwanda », explique-t-il. « Il ne faut pas nier les tensions qui peuvent exister entre nos pays, mais les relations culturelles sont les meilleurs ponts qu’on puisse établir entre les peuples, ajoute Diogène, le comédien rwandais. Je ne connaissais pas la pièce, mais je savais que c’était une fable sur la fraternité entre deux prisonniers qui ne se connaissaient pas. Qu’elle soit portée par un comédien rwandais et un congolais m’a immédiatement parlé. Il y a une dimension universelle : quand on cherche à écraser les corps, c’est en faisant appel à l’esprit et à la parole qu’on peut résister. »
Les personnages s’appellent Amani (paix, en swahili) et Kembo (gloire, en lingala). La pièce a été répétée à Kisangani, en RDC avec le Théâtre des Amazoulous. Un choix délibéré de cet Est congolais traversé de tant de conflits. Elle va y être présentée, ainsi qu’à Goma, Bukavu, Matadi… Roland Mahauden n’en est pas à son coup d’essai. C’est lui qui a fait tourner il y a cinq ans dans la région la pièce Allah n’est pas obligé, sur les enfants-soldats.
La culture pour se sauver
« Le théâtre ne sert pas à dire aux gens ce qu’ils doivent penser, mais bien qu’il faut penser, précise Olivier Maloba, initiateur des Amazoulous. La culture sert de sauvegarde dans les pires moments, pour ne pas devenir fou. Elle fait partie de l’identité. Le théâtre doit divertir, et tant mieux si un message passe. »
On rit, dans cette pièce, mais on réfléchit. « Chacun y trouvera ce qu’il veut, affirme Olivier Maloba. Cette démarche de mettre ces deux peuples ensemble est un message de fraternité. Celui qui veut s’y reconnaître s’y reconnaîtra. Bien sûr, chez nous, il est difficile de parler librement, mais nous osons. » « C’est vrai, renchérit Diogène Ntarindwa, l’espace de liberté, on le crée. De toute façon, ce n’est pas une pièce dirigée contre les autorités, mais sur la fraternité. ».
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Posté par rwandaises.com