Par Marielle Court
Des enfants infectés par le virus du sida soignés dansle service pédiatrique de l’hôpital de Kigali. Crédits photo : Tim A. Hetherington/PANOS-REA
En quatre ans, la proportion d’enfants infectés par le VIH via leur mère est passée de 11,2% à 4,1%.
De notre envoyée spéciale au Rwanda
«Mon fils est un rescapé du sida.» Lorsqu’elle s’exprime, Rose emploie des mots simples et secs. Ni emphase ni pudeur excessive, juste une histoire que partagent des milliers de jeunes femmes du Rwanda. Contaminées sans le savoir par le virus, leurs grossesses se sont transformées du jour au lendemain en cauchemar. «Je me suis dit que j’allais mourir», raconte Daphrose. Elle a découvert sa séropositivité en venant consulter pour la naissance de son troisième enfant.
C’est pour que ces histoires ne se transforment pas en désastre sanitaire et économique que les autorités du pays, avec un large appui de l’aide internationale (Fonds mondial contre le sida, le paludisme et la tuberculose, agences des Nations unies, Unicef, Unitaid et Pepfar), se sont lancées depuis quelques années dans une lutte acharnée contre la maladie. Avec un succès certain.
Grandes campagnes de prévention, diagnostics et traitements gratuits pour tous, surveillance étroite des grossesses à risque, sensibilisation des partenaires, distribution scrupuleuse des médicaments et maillage sanitaire du territoire sont les bases du système. Selon la dernière grande enquête démographique de santé, datée de 2005, 3% des Rwandais (15-49 ans) sont infectés par le VIH. Mais les femmes sont les plus touchées (3,6%), surtout les citadines (8,6%).
«Éviter la transmission du VIH de la mère à l’enfant est un des objectifs prioritaires du plan stratégique pour 2009-2012», insiste le Dr Anita Asiimwe, responsable de la CNLS (Commission nationale de lutte contre le sida). Dans un pays où l’on compte plus de cinq enfants par femmes, l’urgence était de les convaincre de se faire suivre, dépister et d’accoucher dans les centres de santé.
Cette première étape est en très bonne voie. Aujourd’hui, plus de 63% des femmes accouchent dans un dispensaire, alors qu’il n’y en avait qu’une sur cinq en 2005. Même succès pour les tests de dépistage, puisque 73% y consentent, contre 64% il y a trois ans. Le développement constant des centres de prévention de la transmission mère-enfant (PTME) adossés aux dispensaires répartis un peu partout dans le pays a été une des clés du succès. «Aujourd’hui, on en compte 373 (72% des formations sanitaires du pays), le premier date de 1999», rappelle Anita Asiimwe.
Antirétroviraux
Une prophylaxie adaptée est évidemment la deuxième clé du programme. «À mon septième mois de grossesse, on m’a fait prendre un médicament, puis un autre à la veille de mon accouchement », raconte Rose. Quel médicament ? «Je ne connais pas le nom », lâche-t-elle, plus soucieuse d’expliquer la suite heureuse pour son petit garçon accroché à sa jupe. «Lorsqu’il était bébé, je lui donnais quelques gouttes d’un sirop et puis je l’ai ramené au dispensaire à partir de 6 semaines pour des tests sanguins à intervalles réguliers jusqu’à ses 18 mois. C’est alors, et seulement alors, que l’on m’a confirmé qu’il était séronégatif. J’étais très heureuse. J’ai pu ensuite l’accompagner au dispensaire pour qu’il soit suivi.»
Selon la structure du ministère de la santé en charge du VIH, de la tuberculose et du paludisme (Trac Plus), la proportion d’enfants infectés par le VIH par leur mère est passée de 11,2% (2005) à 4,1% l’an dernier. «Le Rwanda est déterminé à atteindre des taux inférieurs à 2% comme dans les pays développés et peut espérer éliminer ce risque d’ici à 2012 », estime le Dr Placidie Mugwaneza, responsable des programmes de prévention sur le VIH au Trac Plus. «Jusqu’à présent, beaucoup d’enfants étaient contaminés au cours des premiers mois de la vie par le lait maternel. Un traitement antirétroviral pour la mère et l’enfant va être mis en place pour éviter cette situation », insiste le Dr Landry Tsague, responsable pour l’Unicef du Rwanda. Quant aux 10 000 enfants malades aujourd’hui, près de 73% d’entre eux bénéficient de médicaments antirétroviraux, ils étaient à peine 450 en 2004.
Selon le dernier rapport des Nations unies consacré à la lutte contre le sida, près de 111 millions de dollars ont été dépensés au Rwanda en 2008 (+33% par rapport à 2007). Après le gouvernement américain, qui en finance plus de la moitié (54%), et différentes ONG ou grands fonds internationaux (24%), le gouvernement rwandais arrive en troisième position (6%). Signe d’une volonté affirmée de la part d’un État qui, tout en occupant la 158e place dans l’indice de développement humain (ONU), a mis la santé en général et le sida en particulier au cœur de ses priorités.
http://www.lefigaro.fr/sciences-technologies/2010/06/18/01030-20100618ARTFIG00609-les-victoires-du-rwanda-contre-le-sida.php
Posté par rwandaises.com