Il y a quelques semaines, certains politiciens rwandais vivant à l’étranger ont révélé à l’opinion qu’ils envisageaient la formation d’un « gouvernement rwandais en exil ». Une rencontre était même prévue à cet effet dans une capitale européenne. Certaines formations politiques invitées à la rencontre et donc pressenties comme partie-prenante à ce projet se sont par la suite désolidarisées. Entre temps, il était publié sur le Web les noms des membres d’un probable « gouvernement en exil » à la tête duquel se retrouvait l’ancien Premier ministre de Paul Kagame Faustin Twagiramungu comme président de la République (pas moins !!!). Celui-ci a tout de suite dénoncé cette publication en indiquant qu’il n’avait rien à voir avec ce « gouvernement en exil ». Il est vrai qu’à la lecture des membres de ce « gouvernement » tout observateur avisé de la scène politique rwandaise y décèlerait une manœuvre grossière d’intoxication. Cela prêterait à sourire si cela n’entamait pas la crédibilité de l’opposition tant interne qu’en exil. Conditions minimales pour un gouvernement en exil Pour qu’une équipe politique se trouvant hors de son pays se déclare « gouvernement en exil », il faut qu’il soit reconnu comme tel par au moins un pays en commençant par celui qui l’héberge. Cette reconnaissance par une ou plusieurs puissances implique que ces mêmes puissances ne reconnaissent pas ou ne reconnaissent plus le gouvernement en place dans le pays dont se réclame le gouvernement en exil. Dans le cas d’espèce, ceux qui envisagent de proclamer un gouvernement rwandais en exil en Belgique sont censés être sûrs d’être reconnus comme « gouvernement légitime » par le Royaume de Belgique qui doit du même coup rompre avec le gouvernement de Kigali. Plus terre à terre, ce gouvernement en exil doit disposer d’un minimum de moyens matériels (bâtiments, charroi,…) et humains comme par exemple disposer des personnels rémunérés selon la réglementation sociale du lieu du siège de ce gouvernement. Ce que, à notre connaissance, les initiateurs du projet ne peuvent pas assurer. Sur le plan politique, il est bien entendu que ce gouvernement ne devrait pas avoir de représentation ou de branche officielle « connue » dans le pays d’origine. Antécédents En juillet 1994, le gouvernement en place au Rwanda depuis le 9 avril 1994 s’est replié au Zaïre voisin. Ses membres, à commencer par le président Sindikubwabo Théodore en passant par le Premier ministre Jean Kambana jusqu’aux ministres qui venaient à peine d’être nommés comme Kamuhanda Jean de Dieu nommé en mai 1994, se sont tous retrouvés à Bukavu. Ils ont un temps prétendus être membres d’un « gouvernent en exil » ! Mais sans reconnaissance du Zaïre, ils ont dû se rendre compte qu’ils étaient de simples réfugiés comme d’autres. Ils étaient rackettés et molestés par la Garde Civile et donnaient les « rapports » (prébendes) au passage à chaque barrage militaire comme n’importe quel réfugié. Ils ne l’ont réalisé qu’après des confrontations avec des associations de la société civile qui entendaient représenter les réfugiés indépendamment de ce « gouvernement en exil » non reconnu même pas par le pays hôte. C’est dans ce climat qu’est né par exemple le RDR : le Rassemblement pour le Retour et la Démocratie au Rwanda qui se muera plus tard en un parti politique après le démantèlement des camps. Les dégâts collatéraux Au moment de la rédaction de cet article, il circule sur le net une rumeur selon laquelle Kagame s’apprêterait à offrir le poste de Premier ministre à Victoire Ingabire, la présidente des FDU-Inkingi. La rumeur provient probablement des mêmes sources qui avaient diffusés le « gouvernement en exil ». L’idée de la formation d’un gouvernement en exil est non seulement saugrenue mais plus grave, elle est dangereuse. Ce serait un coup de poignard dans le dos de l’opposition interne surtout un coup porté contre Victoire Ingabire qui a opté pour une lutte démocratique au Rwanda même. Son combat à l’intérieur du Rwanda n’aurait plus de sens si ses sympathisants de l’extérieur la mettaient « hors-la-loi » en formant un « gouvernement en exil ». De même, la rumeur sur sa récupération par Paul Kagame qui serait sur le point da la nommer Premier ministre en remplacement du cousin Bernard Makuza est susceptible de semer le trouble au sein des FDU et au pire provoquer des scissions à tendances inconciliables ; ce qui ferait le jeu de Paul Kagame. Alors, qui a intérêt à semer cette zizanie ? Suivez mon regard ! Emmanuel Neretse Posté par rwandaises.co
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