La publication du « Rapport du projet Mapping concernant les violations les plus graves des droits de l’homme et du droit humanitaire international entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la République démocratique du Congo », par le haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, le 1er octobre 2010 a fait l’effet d’une bombe dans les Grands Lacs notamment au Rwanda. Ce pays est accusé, entre autres, d’avoir commis un probable génocide contre les réfugiés Hutus Rwanda. A la faveur du 62e anniversaire de la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime du génocide, la Commission nationale de lutte contre le génocide (CNLG) a convié des universitaires, des journalistes… à deux jours de réflexion sur la question du 9 au 10 décembre 2010 à Kigali. Tous les communicateurs ont tiré à boulets rouges sur ledit rapport.

« Le Mapping report concernant les violations les plus graves des droits de l’homme et du droit humanitaire international entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la République du Congo » est perçu par le Rwanda comme une faute grave au regard du contexte juridique et géostratégique actuel caractérisé par le dialogue et la Coopération régionale pour mettre fin aux différentes causes des conflits et solidifier la paix.

En effet, il dresse l’inventaire de 617 violations qui auraient été perpétrées et accuse les armées de l’Ouganda, du Burundi, de l’Angola, du Tchad, du Zimbabwe, du Rwanda d’avoir commis à des degrés divers, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et un probable génocide contre les réfugiés Hutus rwandais.

« Les attaques systématiques et généralisées (CD) ayant ciblé de très nombreux réfugiés Hutus rwandais et des membres de la population civile Hutus et causé leur mort relèvent plusieurs éléments accablants qui, s’ils sont prouvés devant un tribunal compétent, pourraient être qualifiés de crime de génocide », précise le rapport.

C’est entre autres, cette partie qui a fait bondir Kigali qui estime qu’après ce que le pays a vécu en 1994, il est impensable qu’il se livre à une telle barbarie. « En 1948, les Nations unies ont dit plus jamais ça à travers la Convention pour la prévention et contre le crime du génocide, mais nous avons connu cette horreur en 1994. Malheureusement, certains tentent aujourd’hui de déformer le sens du génocide », a introduit la vice-présidente de la CNLG, Christine Tuyisenge.

Le ministre de la Justice rwandais, Tharcisse Karugarama, dans son allocution d’ouverture, a été on ne peut plus claire en campant le décor de cette rencontre : « Le terme génocide a été abusivement utilisé par ce rapport qui a ignoré toutes les procédures connues dans les enquêtes. On parle de faits qui n’ont jamais eu lieu, de personnes inconnues et de témoins non identifiés, et le comble c’est qu’on n’a même pas donné la chance au pays accusé de s’expliquer ».

Parole d’un ancien de l’UE

C’est l’ancien représentant de l’Union européenne dans les Grands Lacs, Aldo Ajello, qui a été le premier à livrer sa communication sans ambages, et a condamné ce rapport : « La sortie de ce rapport m’a profondément étonné dans les 530 pages, j’ai vu des contradictions, des incohérences et de l’amnésie. C’est le résultat d’un manque d’information. Les camps de réfugiés étaient sous le contrôle des génocidaires qui avaient une intention déclarée de revenir. L’ONU n’a rien fait pour séparer les réfugiés de ses derniers, c’est pourquoi Paul Kagamé se décide de le faire ».

Le général major Jérôme Ngendahimana, ancien réfugié dans les camps de la RDC, a, lui, décrit le contexte de l’intervention de Kigali en tant que témoin des faits : « Après le génocide, les réfugiés rwandais se sont retrouvés au Zaïre (NDLR : actuelle RDC), ils sont partis avec l’essentiel de la population active, les ressources et ne désesperaient pas de reconquérir le pouvoir.

L’entrée au Zaïre de l’Armée patriotique rwandaise était donc justifiée. Mais son intention première était de protéger les réfugiés de la barbarie des ex-FAR et des Interahamwe », dit-il avant de concéder : « Il serait malhonnête de dire qu’il n’y a pas eu de dommages collatéraux avec une forêt inhospitalière et des affrontements qui ont opposé l’APR à l’armée zaïroise, les Interahamwe et les ex-FAR. Cela dit, le rapport mapping est truffé d’accusations sans fondement ».

Le ministre de la Culture, Joseph Habineza, lui, a eu cette pique à la Communauté internationale : « Quand vous n’avez pas pu sauver des gens et que quelqu’un d’autre le fait, il faut se taire ou faire son mea-culpa. Nous sommes toujours dans la prévention d’un autre génocide, voilà pourquoi nous sommes au Darfour ».

Sous l’angle juridique, Bizimama Jean Damascine, docteur en droit, expert et chercheur en Droit international pénal humanitaire, a relevé qu’il n’y a pas eu de crime de guerre parce que l’armée rwandaise a respecté les obligations du droit international humanitaire applicables aux conflits armés.

A propos de crimes contre l’humanité, il a souligné que « les crimes de tueries systématiques et généralisées de civils effectués dans un but politique, racial, national ethnique ou religieux ne sont pas établis ». Concernant le crime de génocide, même négation : « l’élément essentiel de ce crime, l’intention de commettre le génocide n’est pas établi ». La conclusion du juriste est sans appel : « Ce document n’a pas de valeur juridique ».

Abdou Karim Sawadogo

De retour de Kigali
l’observateur paalga
http://www.fasopresse.net/article.php3?id_article=18275

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Posté par rwanews