Témoignage de l’ONG Rwanda Avenir

L’Institut français du Rwanda – Centre d’échanges culturels franco-rwandais (IFR-CECFR) organise, depuis novembre 2010 et à raison de deux fois par mois, des projections de films en plein air, avec l’ONG Rwanda avenir, pour des enfants du quartier de Kimironko à Kigali. Premier retour d’expérience sur ce projet de « séances de cinéma mobile » avec le témoignage de Florence Prudhomme, responsable de l’ONG partenaire.

-  Latitude France : Quelle est l’origine du projet de « séances de cinéma mobile » dans la Maison de quartier Rwanda avenir construite par votre association à Kimironko ?

Florence Prudhomme :

Dans le projet de Maison de quartier que nous avons construite pour et avec cent-vingt-cinq veuves rescapées du génocide des Tutsi au Rwanda, bénéficiaires du projet à Kimironko, nous avons toujours été très sensibles à la dimension culturelle et à l’impact qu’elle pouvait avoir. Nous avions mis la culture à l’honneur en dispensant une formation en art traditionnel « Imigongo » (peintures murales).

En septembre 2010, j’ai fait la connaissance à Kigali de Maurice Brouard, directeur tout nouvellement nommé de l’Institut français du Rwanda-Centre d’échanges culturels franco-rwandais (IFR-CECFR). Les relations diplomatiques entre le Rwanda et la France avaient été rétablies dans l’année et le Centre culturel allait prochainement rouvrir ses portes. Maurice nous a rendu visite à la Maison de quartier, dont la construction venait tout juste de s’achever. Nous avions organisé diverses formations pour les veuves et les conditions étaient remplies pour démarrer les activités qu’elles avaient choisies : un restaurant, des chambres d’hôtes ainsi qu’un atelier d’art.

-  Pouvez-vous nous présenter le projet en quelques mots ?

La culture permet de pacifier les conflits, de développer l’imaginaire, d’ouvrir le monde à d’autres horizons et nous lui accordons une place privilégiée à la Maison de quartier. C’est dans ce contexte qu’est apparu le projet de séances de cinéma en plein air pour les enfants du quartier. Les projections de films sur la parcelle étaient l’un de nos rêves, mais les moyens techniques et financiers ne nous étaient guère accessibles.

« La prochaine fois qu’on se verra, une projection aura lieu », avait dit Maurice… Et de fait en novembre 2010, de retour à Kigali, nous avons assisté à la première séance de cinéma mobile avec la projection de Kirikou et la Sorcière [1] !

- Reportage sur la projection du 27 mai 2011 à Kimironko réalisé par l’équipe de l’IFR-CECFR :

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-  Vos impressions sur une séance à laquelle vous avez participé ?

 

Lors de la première projection, plus d’une centaine d’enfants étaient présents. L’écran gonflable les a fascinés, comme la rapidité de son installation. La magie du cinéma est renforcée quand c’est lui qui vient à vous et non pas vous qui vous rendez dans une salle. Les enfants avaient été conviés à 18 heures mais dès 14-15 heures, certains arrivaient déjà en courant. Le film leur a beaucoup plu, des moments de silence attentif relayaient des éclats de rire enchantés, il a beaucoup plu aussi aux « mamans » qui les accompagnaient. Le lendemain matin elles sont arrivées en chantant la chanson de Kirikou et en dansant.

 

 Quelles conclusions tirez-vous après quelques mois de cette expérience ?

Depuis novembre, les séances se sont succédées au rythme d’une tous les quinze jours et les enfants sont toujours aussi nombreux. Je me réjouis que l’équipe de l’IFR-CECFR et celle de la Maison de quartier aient rapidement établi de bons échanges qui se révèlent fructueux. Chacun assurant sa propre partie : la création des affiches, leur diffusion dans le quartier et auprès des écoles, l’installation du matériel. Sur place le gardien de la Maison assure la sécurité et la bonne entente entre les enfants. La présence d’un traducteur s’est révélée indispensable.

Sept mois se sont écoulés depuis la première projection, il est sans doute opportun d’avoir maintenant une discussion avec les jeunes spectateurs pour savoir quels films les ont enthousiasmés et pour connaître leurs attentes. Merci à tous ! A l’équipe de l’IFR-CECFR et à l’équipe de la Maison de quartier.

 

 

A propos de Rwanda avenir
- L’association Rwanda avenir (loi de 1901) a été créée en 2004, lors de la dixième commémoration du génocide, qui a fait près d’un million de morts parmi les Tutsi et les Hutu modérés qui s’opposaient aux massacres. Chaque jour : 8 000 morts. Une génération entière a disparu. Les survivants sont majoritairement des femmes, « les veuves », et des enfants, orphelins.
- Rwanda avenir se situe délibérément dans la perspective de l’après génocide et s’est fixé comme objectif de participer à la reconstruction psychique des victimes et d’aider prioritairement les femmes rescapées, isolées ou regroupées dans des associations.
- L’ouverture d’un lieu d’échanges, d’ouverture, d’apaisement, d’écoute, de sécurité et de projets est facteur de paix, de réconciliation et de développement. Des activités culturelles (les fresques murales Imigongo) et des projets économiques (un restaurant, une crèche, des chambres d’hôtes) seront mises en œuvre pour briser la force d’attraction quasi hypnotique que conserve souvent le souvenir traumatique et apporter le souffle d’un autre langage.