En 1994, un million de Tutsis ont été massacrés dans des conditions abominables. Une étudiante de l’université d’Auvergne a fait du génocide rwandais le sujet de sa thèse. Principal accusé : le colonialisme belge.

Jean-Paul Gondeau

Astou Fall a sondé les coeurs et les reins des bourreaux et des victimes. Cette étudiante sénégalaise de l’université d’Auvergne vient de séjourner pendant neuf mois au Rwanda pour recueillir le témoignage des auteurs et des martyrs d’un massacre de masse qui a fait en quatre mois, d’avril à juillet 1994, un million de morts, pour la plupart Tutsis.

Cette enquête in situ nourrit sa thèse sur le « traitement juridictionnel des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité au Rwanda » que prépare cette doctorante en droit public. S’inspirant de son travail, elle donnera une conférence, jeudi 8 décembre à 18 h 30 à l’école supérieure de commerce, sous l’égide du Conseil général.

n Le génocide a-t-il pour origine le racisme entre Hutus et Tutsis ou la discrimination socio-économique entre ces deux groupes ethniques ? Avant l’arrivée des Belges après la deuxième guerre mondiale, les Hutus et les Tutsis vivaient dans la cohésion sociale. Les Belges ont favorisé les Tutsis qu’ils présentaient comme la race de l’élite. Quand on veut diriger un pays, on s’appuie toujours sur l’ethnie minoritaire. C’est diviser pour mieux régner.

n Mais au fond, ce racisme ethnique n’est-il pas la raison première du génocide comme un germe porteur de maladie Cette distinction ethnique n’a jamais créé de conflit, elle n’était pas taboue. Chaque ethnie savait et admettait comme une évidence que les Hutus étaient des cultivateurs et les Tutsis des éleveurs.

n Le colonialisme serait donc le principal responsable du génocide ? Surtout avec l’instauration de la carte d’identité juste avant l’indépendance en 1962. Elle a établi un distinguo officiel entre 80 % de Hutus, 19 % de Tutsis et 1 % de Twas, une communauté très pauvre. Cette carte d’identité a créé des jalousies parce que les Tutsis n’avaient pas accès à l’éducation, à l’armée, aux postes de responsabilité comme les Hutus. Il existait un quota fixé pour eux dans l’administration.

n Les Hutus avaient ainsi pris leur revanche sociale ? Depuis toujours, c’est la monarchie tutsie qui régnait en maître, mais à l’indépendance, elle a été abolie par un référendum qui a établi la république à 80 % des votants, c’est-à-dire des Hutus majoritaires.

n Accabler les colonisateurs de tous les maux n’exonère-t-il pas les individus de toute responsabilité dans les massacres ? La colonisation a eu une part de responsabilité. Le génocide a été préparé, organisé, planifié ; les gens ont été manipulés, notamment par les médias. Une femme condamnée à perpétuité m’a dit que depuis l’enfance on lui avait appris la culture de la haine ; tu grandis avec la haine

n Vous avez dû entendre le pire J’ai interrogé une dizaine de victimes rescapées, surtout des femmes violées. Une Tutsie sur deux a été violée et contaminée au VIH. Des femmes aussi ont tué et violé, en utilisant des objets contondants Environ 2.000 femmes ont été condamnées pour génocide et sur ces 2.000, 7 % ont été exécutées.

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Posté par rwandanews