Le professeur Oumar Sankharé n’en a pas cru ses yeux quand il a vu que l’ambassade de France lui a refusé le visa. Revenu de sa torpeur, il a sollicité l’appui du nouveau ministre de la culture Youssou Ndour. Niet catégorique des autorités consulaires françaises. Devant se rendre en France pour participer à l’organisation du « prix des 5 continents », dont il est le président du comité Afrique, le professeur désirait également profiter de son voyage pour faire son bilan de santé.
Cette décision a suscitée une vague d’indignation au Sénégal. Alioune Badara Bèye, le président de l’Association des écrivains du Sénégal, choquépar cette désicion, compte organiser une conférence de presse pour dénoncer « ce manque de respect manifeste ».
Récidiviste
L’ambassade de France au Sénégal n’en est pas à son premier coup. En 2010, le Pr Elhadji Mbodj, éminent juriste, s’était vu accordé un visa de trois jours à la place du visa d’un an qu’il demandait. Outré, il a adressé une lettre au Ministre des Affaires étrangères de la France.
« Nous voudrions porter à votre haute attention des illégalités et tracasseries à nous administrées par les services du consulat de Dakar, en contrariété avec la politique culturelle et scientifique de la France en direction des intellectuels et autres hommes de culture qui, abstraction faite de leur nationalité, apportent une contribution au rayonnement des valeurs culturelles et scientifiques de la France dans le monde. (…)
Suite à une invitation du Président Jean du Bois de Gaudusson, Directeur de l’IDESUF de l’Université Montesquieu-Bordeaux 4 pour participer à l’encadrement des candidats du concours d’agrégation (PJ n°2) et pour exécuter un voyage d’études autorisé par arrêté du Recteur de l’Université Cheikh Anta Diop (PJ n°3), nous avions sollicité un visa de séjour annuel Schengen de courte durée (PJ n°4). A l’appui de la demande, nous avons produit une attestation de notre statut d’expert de la Commission européenne en RDC (PJ n°5).
Il ne nous a pas été opposé un refus de visa mais les conditions dans lesquelles le visa nous a été gratifié traduisent un mépris inadmissible à l’endroit d’une personne qui était en droit d’attendre un autre comportement de la part d’un Etat qu’il aura servi durant tout son parcours professionnel. Après avoir pris contact avec les secrétariats des services du Consul, du Conseiller chargé des affaires politiques et du Conseiller en charge de la coopération scientifique et culturelle pour solliciter un rendez-vous rapproché, il nous a été simplement rétorqué « Tout le monde est traité de la même façon ».
Des manœuvres dilatoires nous avaient empêché l’accès du consulat car il nous a été demandé, malgré l’urgence et l’intervention du Prof. Jean du Bois de Gaudusson de nous adresser à une agence privée pour solliciter le rendez-vous. L’agence prestataire nous a alors proposé la date du 30 septembre 2007 qui coïncide avec la fin du programme de l’Université Montesquieu-Bordeaux 4 et le redémarrage de notre mission à Kinshasa ».
Comme le Professeur Mbodji, nombreux sont les citoyens anonymes qui subissent sans broncher les tracasseries des « petits fonctionnaires » du Consulat de France au Sénégal. Pour obtenir un visa, les Sénégalais vivent un calvaire.
Colère
Cette décision de l’ambassade de France a frustré beaucoup de sénégalais. Ibrahima Lissa Faye, directeur de publication du site Pressafrik.com considère que c’est honteux.
» Elle manque de considération à tous les africains. Un monsieur de la trempe du Pr Oumar Sankharé ne devrait être confronté à ce genre de problème. Franchement, c’est inélégant et irrespectueux ».
Adiara considère que Senghor doit se retourner dans sa tombe. « SI le visa est refusé au Pr Sankharé, qu’en sera-t-il pour les nombreux anonymes qui n’ont pas ses compétences ».
« Toute la communauté universitaire doit se mobiliser et dénoncer cet acte ignoble de nos anciens maîtres blancs qui se croient toujours être à la période de l esclavage », dénonce Ibrahima Maiga.
La qualité du service au sein du service des visas de l’ambassade de France est souvent qualifiée de mauvaise par beaucoup de demandeurs de visa. Ainsi, Souleymane s’indigne des conditions d’accueil à l’ambassade.
« On est parqué comme des animaux sous le chaud soleil. Ils exige qu’on passe par Africatel Avs pour obtenir un rendez-vous et ensuite, ils exigent que l’on fasse la queue sans être sûr de pouvoir déposer. Et cela sans compter les propos irrespectueux des personnes censées recevoir les dossier. C’est irrespectueux ».
Face aux tracasseries et mauvais traitements, beaucoup d’hommes d’affaires et d’intellectuels se détournent de la France au profit de la Chine de l’Inde et des Etats-Unis.
Sujet de débat
Si la colère est le sentiment que suscite le plus cette décision, certaines personnes invitent à la prudence.
« L’entrée sur le territoire d’un Etat obéit au respect d’un certain nombre de conditions, le Pr Oumar Sankharé, a-t-il remplit ces exigences? Donc pas de jugement de valeurs à la hâte les gars. Ca m’étonnerait qu’un visa soit refusé à une illustre personnalité comme le Pr Oumar Sankharé sans qu’il y ait en avant un motif valable de rejet. Le service des visa est un service administratif et la règle en droit administratif français, est qu’une décision administrative défavorable au requérant doit toujours être motivée, donc le Pr Oumar Sankharé doit savoir les raisons de ce rejet », indique Oumar Dieng pour calmer les « indignés » sur Facebook.
Awa Seck, jeune juriste, partage l’avis de Oumar. Pour elle, il ne faut pas tirer de conclusion hâtives car ce refus doit être motivé par des raison objectives.
En réponse, Khadija leur rétorque que leur capacité d’indignation a tarit.
« Le seul africain agrégé de grammaire française vivant mérite mieux qu’un refus de visa. Sankharé n’est quand même pas n’importe qui. C aurait été un petit vendeur à la sauvette, on aurait pu le soupçonner de vouloir s’y installer. C’est tout simplement irrespectueux ».
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Posté par rwandaises.com