La presse est-elle partiale dans le conflit qui oppose les rebelles du M23 au gouvernement congolais dans l’Est de la RDC ? Oui, selon Michel Sitbon qui vient de créer à Paris l' »Agence d’information » (AI), une agence de presse destinée à lutter contre « les fausses informations » qui circulent sur la guerre du Kivu.
Dans le conflit des Kivus, « la presse ne remplie pas ses fonctions« . C’est le sentiment de Michel Sitbon, éditeur et auteur, notamment, de « Rwanda, 6 avril 1994, un attentat français ?« . « Les problèmes de cette région sont souvent complexes et parfois mal expliqués« , explique-t-il. Avec le journaliste spécialisé Luigi Elongui, Michel Sitbon a donc décidé de créer une agence de presse pour lutter contre ce qu’il considère comme de la désinformation.
Au point de départ de cette initiative : la création par les Nations-unies d’une Brigade d’intervention spéciale, avec un mandat offensif, pour lutter contre les groupes armés en RDC. Une résolution « historique« , selon Michel Sitbon, dont les médias internationaux n’ont visiblement pas mesuré les conséquences. « La résolution 2098 créée un précédent unique dans l’histoire : l’ONU instaure désormais une sorte de gouvernement mondial en pouvant intervenir militairement n’importe où dans le monde« , dénonce-t-il. Autre anomalie pour Michel Sitbon : « seul le M23 est nommément cité dans la résolution, alors qu’il y a une quarantaine de groupes armés à l’Est du Congo« .
Le M23 est-il maltraité par les média occidentaux ? C’est en creux la seconde question que semble poser Michel Sitbon. Il y répond également par l’affirmative. Selon lui, on assiste à la « technique de l’accusation en miroir« . « A chaque accusation de viols attribuée à l’armée régulière congolaise (FARDC)« , explique-t-il, « on accuse immédiatement le M23 des mêmes crimes… en en rajoutant même un peu plus !« . Autre exemple : le bombardement du camp de réfugiés de Mugunga, le 21 mai dernier. Rapidement, une journaliste allemande, Simone Schlindswein du Tageszeitung, relaie les propos d’un casque bleu qui lui explique que le tirs viennent des positions du M23. L’information fait le tour du monde. Pour Michel Sitbon, il s’agit de désinformation pure : « le M23 n’avait d’abord aucune raison de bombarder ce camp et en plus, les positions des rebelles se trouvaient à 50 km du camp… hors de portée des canons du M23« . « Le pire« , dénonce Michel Sitbon, « c’est que cette information a été reprise et validée par la Monusco« . Ecoutez ses explications :
La mission de l' »Agence d’information » (AI), le nom de cette nouvelle structure sera de vérifier les informations en provenance de l’Est de la RDC en faisant du fact checking. Mais aussi en produisant des dépêches à destination des journalistes spécialisés. Autre fonction de l’Agence : reprendre les nombreux rapports internationaux (ONG, ONU… ) sur la région et y dénoncer « les informations mensongères« . L’Agence sera basée à Paris, avec un correspondant dans la région des Grands Lacs à la mi-juillet (date de l’entrée en fonction opérationnelle de la Brigade) et un autre à New-York auprès des Nations-unies.
On l’aura compris, l' »Agence d’information » affiche clairement ses positions : contre l’intervention de la Brigade de l’ONU, contre la désignation du seul M23 et du Rwanda comme responsables de la guerre aux Kivus. Luigi Elongui assume pleinement l’engagement de l’Agence. « On n’y échappera pas, mais nous ferons un travail sérieux et professionnel« , conclut-il. Nous suivrons avec attention les premiers pas de cette agence, espérant que cette structure ne tombe pas dans la dénonciation systématique et partisane, qui domine allègrement sur internet dans le conflit dans les Kivus et ne rajoute pas de la désinformation à la désinformation… ce serait un comble.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Photo : Michel Sitbon et Luigi Elongui à Paris le 31 mai 2013 © Ch. Rigaud
http://afrikarabia2.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/06/03/rdc-une-agence-d-information-contre-la-desinformation.html
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