Elle venait de fêter ses soixante six ans. La reine Rosalie Gicanda a été cruellement assassinée le 20 avril 1994 aux temps forts du génocide des Tutsi de 1994 dans sa résidence de Butare, dans le sud du Pays. Pouvait-elle survivre à cette ignominie de l’histoire ? La folie d’un régime en perte de vitesse avait commencé à sonner le tocsin. Aucun Tutsi ne devait survivre, telle était la devise de régimes qui se sont succédé depuis 1959 date où son royal époux Rudahigwa a été brutalement arraché à la vie à Bujumbura par des coloniaux belges qui trouvaient qu’il devenait de plus en plus populaire parmi les citoyens rwandais. Comment et pourquoi a-t-elle été arrachée à son palais pour rejoindre Butare-Astrida ? Mais au fait cette reine mère qui,le 20 avril 1994, subit les affres d’un peloton d’exécution conduit par un sous lieutenant Pierre Bizimana en compagnie, ironie de l’histoire, du Dr Kageruka, ancien médecin à l’Hôpital Universitaire de Butare.Attention ! Regardez comment ce génocide des Tutsi a été en quelque sorte une réplique du génocide des Juifs d’Europe avec un triste Dr Joseph Mengele allemand, tortionnaire de triste renom.Mais à soixante six ans cette reine-mère qui n’avait autres ambitions que le pur altruisme, comment expliquer les actes ignobles qu’elle a subi de la part d’un Capitaine Ildéphonse Nizeyimana des Ex-FAR (Forces Armées Rwandaises du Gén.Président Juvénal Habyarimana) ?Kagatama, un témoin de ses années actives, racontait en 2010 sur son blog : »Devant cette vieille femme magnifique, nous étions toujours très impressionnés, et puis la conversation débutait.

Sa maison était très connue à Butare, les pauvres venaient y recevoir un repas, un verre de lait, tout le monde pouvait la rencontrer sans aucune forme de protocole, que vous soyiez Hutu, Twa ou Tutsi, sa porte était constamment ouverte. Rosalie Gicanda était pourtant une reine, la veuve du Mwami Mutara Rudahigwa dont la mort le 25 juillet 1959 avait été le prélude aux pogroms anti-Tutsi et à l’exil de milliers d’entre eux du Rwanda ».

Et comme elle devait expier son crime de bénévolat indistinctif,

 » Le 20 avril 1994, des barbares se sont introduits chez elle. Ils l’ont enlevée avec six autres femmes de son entourage dans une camionnette. Ils l’ont exhibée dans les rues de la ville, puis l’ont exécuté , elle et ses six amies », continue plus loin Kagatama révolté.

Odes funèbres à la reine Mère Rosalie Gicanda

En ce 20 avril 2014, un certain Willy Fabre alias Senyanzobe, admirateur de cette reine, s’impose une obligation de mémoire et d’égards à l’illustre disparue :

« Pardon Gicanda
De ne pas avoir eu
En ce soir du samedi 15 janvier 1994
A la Petite Colline de Bruxelles
Les paroles qu’il fallait

De n’avoir pu te convaincre
Par des mots justes
Par des arguments forts
Voire frappant »

Nous étions pourtant deux
A nous relayer
En te faisant comprendre
Que tous les renseignements
Qui nous arrivaient régulièrement
Annonçaient l’imminence
D’une gigantesque catastrophe
D’un monumental cataclysme
Voire de l’apocalypse ultime
Mais rien n’y fit
Tu étais décidée à rentrer
Comme tu le disais si bien
A vouloir rentrer parmi les miens

«

Et tu m’as offert cette précieuse photo
En guise de souvenir de cette soirée
Ce souvenir marqué de regrets
De regrets indélébiles
Inoubliables et gigantesques
Souvenir que j’ai sur mon cœur
Depuis cette soirée mémorable
Du samedi 15 janvier 1994
À la Petite Colline de Bruxelles

»

Et j’ai mal Gicanda
Je souffre l’horreur
Quand je me remémore ta fin
Ta fin honteuse scandaleuse
Voire surtout ignoble

«

Et je regrette toujours
De n’avoir pu avoir les arguments convaincants
Qui allaient te permettre de rester en Belgique
Car tu ne pouvais en effet rien face à cette menace
En rentrant chez toi
Comme tu le disais si bien
Je veux rentrer parmi les miens

»

Tu ne pouvais rien
Absolument rien contre cette horreur
Contre ce cataclysme qui venait
Inéluctablement
Et qui allait anéantir le Rwanda
Le Rwanda et les siens

«

Mais tu avais ton rôle suprême
Ton rôle suprême de reine à remplir
Et tu te devais d’être effectivement
Parmi les tiens
Et surtout en des moments pareils
Des moments extrêmes
Des moments forts
Des moments douloureux
Des moments inoubliables

»

Mais malgré cela Gicanda
Ou même à cause de tout cela Gicanda
Je ne puis que te demander pardon
Pardon de n’avoir pu te convaincre
De ne pas rentrer parmi les tiens
Et d’y subir les affres de cette apocalypse
Pardon Gicanda

«

Je m’en voudrai toute ma vie
Pardon Gicanda

Publié le 20-04-2015 -par IGIHE

Posté par rwandaises.com