Des associations parties civiles dans l’enquête française sur l’opération Turquoise menée par la France au Rwanda réclament la mise en examen pour complicité de génocide de militaires français intervenus dans ce pays en 1994.

L’armée française a-t-elle laissé des centaines de civils Tutsi aux prises avec les génocidaires Hutu se faire massacrer, dans les collines de Bisesero ?

Les faits se sont déroulés entre le 27 et 30 juin 1994 alors que l’Opération Turquoise, les soldats français donc, étaient censés protéger les populations en danger.

Depuis dix ans maintenant, une enquête pour « complicité de génocide » est en cours au Tribunal de Grande Instance de Paris.

Le memorial de Bisesero © DR

 

Aujourd’hui les avocats de la Ligue des Droits de l’Homme et de l’association Survie demandent la mise en examen de deux officiers français : à savoir Jacques Rosier et Marin Gillier.

L’un était à l’époque colonel et Patron du COS au Rwanda (Commandement des Opérations Spéciales)

L’autre était capitaine de frégate et son camp était installé à cinq kilomètres, à vol d’oiseau, de Bisesero, lieu d’une tragédie qui a couté la vie à au moins 1000 civils tutsi, tués entre le 27 et le 30 juin 1994.

Des civils laissés sans aucune protection dont les survivants doivent leur salut à l’intervention spontanée et totalement imprévue de quelques soldats français qui volent à leur secours le 30 juin.

Les deux officiers supérieurs français, témoins assistés dans l’enquête judiciaire, disent qu’ils n’ont pas su.

Une position constante mais « difficile à tenir compte tenu des éléments limpides et probants » l’avocat de l’association Survie, Olivier Foks, qui ajoute :

Toute la hiérarchie était au courant de ce qui se passait à quelques kilomètres de leur campement

 

« Il va falloir qu’ils s’expliquent » 

 

Face aux juges, le patron de l’opération « Turquoise » à l’époque, le colonel Rosier a toujours dit que personne ne ‘lavait informé de la menace qui planait sur les Tutsi réfugiés dans les collines de Bisesero.

Une version contestée par l’un de ses adjoints, le lieutenant-colonel « Diego ».

Ce dernier est allé à Bisesero le 27 juin. Il y a croisé ces Tutsi menacés de massacres et dit avoir rendu compte immédiatement au colonel Rosier.

Un nouvel élément est venu appuyer la thèse selon laquelle le chef de l’opération « Turquoise » avait été informé. Il s’agit d’une vidéo que les juges ont entre les mains.

Elle a été tournée le 28 juin 1994 par le service cinématographique des armées lui-même. Elle montre un sergent-chef en train d’informer le colonel Rosier que des massacres se déroulent à Bisesero.

 

Thierry Prungnaud, ex- membre du GIGN, était engagé lui aussi dans Turquoise. Il se réjouit que le témoignage de « Diego » soit conforté par des éléments matériels :

 

Le sous-officier Philippe, qui était en poste au Rwanda, estime « incompréhensible » que la hierarchie militaire ne décide pas d’intervenir pour mettre un terme au massacre. Qu’on n’est pas donné suite aux alertes de Diego est « un scandale » :

 

La prudence des juges d’instruction dans cette affaire ont poussé des associations, parties civiles, à réclamer des mises en examen pour complicité de génocide.

Pour Olivier Foks, l’avocat de l’association Survie :

La question n’est plus de savoir si la haute hiérarchie militaire était au courant dès le 27 juin 1994 des massacres en cours à Bisesero, mais de savoir pourquoi personne n’est intervenu.

 

 

Retour sur le massacre de Bisesero

Pour comprendre le massacre qui s’est déroulé sur les collines de Bisesero, voici le récit du sous-officier Philippe. Il fait des partie de la douzaine d’hommes qui ont initié spontanément une opération de sauvetage : 

http://www.franceculture.fr/2015-12-02-rwanda-de-nouvelles-preuves-de-la-responsabilite-francaise

Poste le 2decembre 2015 par rwandaises.com