On ne finira jamais de s’interroger sur les raisons qui poussent l’ONU à garder le mutisme sur la désignation du crime des crimes que les Hutus au pouvoir au Burundi sont en train de perpétrer contre les Tutsi de ce pays.
Depuis avril 2015 en effet, et même avant cette date, des voies n’ont cessé de s’élever contre ce génocide qui se commet au vu et au su de tout le monde, dont les conditions de qualification étaient réunies dès le départ.
Réunies parce que longtemps avant le début du drame, l’ONU, l’Union Africaine, l’East African Community, les Chefs d’Etats et de Gouvernements des Puissances européennes et américaines ainsi que leurs chancelleries, étaient régulièrement mis au courant de la fébrilité avec laquelle les préparatifs du projet macabre avançaient :
Dès 2006, Madame Alice NZOMUKUNDA l’ancienne Vice-Présidente de la République et hutu de son état, génocidaire de 1993 à 2003, détentrice jusque-là des secrets du régime NKURUNZIZA, dévoilait le terrible secret de la constitution d’une milice affiliée au parti au pouvoir, les Imbonerakure, qui dépassaient à cette époque déjà les 30 000 hommes solidement endoctrinés pour traquer les opposants à Nkurunziza et prêcher la haine ethnique.
La paupérisation programmée de la Communauté Tutsi par la destruction de leur tissu économique et culturel (confiscation sans la moindre explication et sans procès ni indemnisation des terres des Tutsi, déstabilisation de leur élevage impliquant en même temps la destruction de l’un de leurs ressorts culturels, mise ou maintien en chômage systématique des Tutsi en âge de travailler,…).
Début 2014, il est mis au grand jour par Pierre Claver MBONIMPA, grand et estimé défenseur des droits humains, un vaste programme d’entraînement au maniement des armes et à l’art de la guerre, dans les brousses de la RDC, de centaines de milliers de miliciens imbonerakure. Ils ont été évalués à 300 000, leur formation assurée par les génocidaires rwandais interahamwe et les instructeurs français basés à Goma (toujours en RDC).
Trois personnalités de l’opposition, Léonce NGENDAKUMANA, Domitien NDAYIZEYE et Sylvestre NTIBANTUNGANYA, se sont rendus au siège de l’Union Africaine pour tirer la sonnette d’alarme, preuves à l’appui, sur l’imminence du génocide des Tutsi du Burundi, par le régime Nkurunziza.
Le 3ème mandat lui-même, de toute évidence inconstitutionnel et contraire à l’Accord d’Arusha, n’était rien d’autre qu’une ultime provocation – l’assassinat de Sarajevo en quelque sorte – destiné à déclencher les hostilités.
Aucune instance internationale ne peut donc prétendre ne pas avoir su que le génocide des Tutsi du Burundi allait avoir lieu. Et il a eu lieu effectivement.
Nous dénombrons à ce jour plus de 170 000 morts, dans des conditions atroces de tortures, comme celles qui ont été filmées aux confins de la réserve naturelle de Karuzi, l’un des hauts lieux de l’horreur, de la barbarie et des fosses communes, dont le fossoyeur en chef est le prénommé Anglebert, député sanguinaire et élu illégal de la circonscription.
170 000 assassinats, sans parler des disparus qui se comptent eux aussi par dizaines de milliers et dont les cadavres, s’ils ne finissent pas dans les fosses communes pour faire simple, nous sont distillés, par petits paquets de corps horriblement mutilés, sur les bords des rues des banlieues des villes et dans les rivières qui les traversent.
Le crime de génocide ainsi minutieusement préparé depuis de longue date est donc en cours d’exécution depuis avril 2015, mais l’ONU, le Conseil de Sécurité de l’ONU, l’Union Africaine et son Conseil de Paix et de Sécurité, l’Union Européenne, etc. s’obstinent à ne pas le nommer. Pourtant il est devenu difficile et inconfortable d’appeler les choses autrement.
Même certains Hutus parmi les plus en vue tels que Léonce NGENDAKUMANA, Président du FRODEBU et Président de la Coalition des partis d’opposition, Charles NDITIJE, Président de l’UPRONA, reconnaissent sans la moindre nuance que le génocide est en cours et qu’il est dirigé contre les Tutsi du Burundi.
Tous les éléments de la définition adoptée par l’Assemblée Générale des Nations Unies sont là : une préparation méthodique du crime, une accumulation de fonds énormes destinés à financer l’opération, une fanatisation des congénères Bahutu à travers des discours incendiaires et prometteurs de bonheur après l’extermination terminée…
Alors devant cette avalanche de constats et de preuves de génocide des Tutsi du Burundi, pourquoi l’ONU, l’UA, l’EAC, l’UE, les USA, etc. s’entêtent-ils à ne pas dire ce qui est vu et su par tout le monde, ce que eux-mêmes ont anticipativement décrit à partir d’une définition claire et précise ?
Je pense pour ma part qu’on n’a même pas besoin de l’adhésion de la France ou d’autres pyromanes de l’humanité pour dire seulement qu’au Burundi un génocide est en cours. C’est une question purement technique qui n’a pas besoin d’un accord quelconque.
L’accord était nécessaire lors de l’adoption de la définition du mot par l’Assemblée Générale. Maintenant il s’agit uniquement de l’appliquer aux cas d’espèce, après l’analyse des faits et l’interprétation juridique des textes, au besoin par une commission créée à cet effet.
Je n’ai pas le moindre doute qu’une telle démarche, menée loin des pressions et de la langue de bois des diplomaties spéculatives, aboutirait à moins de quelques heures seulement à la même conclusion que moi, que les Tutsi du Burundi sont en train de vivre le génocide le plus répugnant de ce 21ème siècle.
Il y a lieu de remarquer par ailleurs que la reconnaissance du fait peut et doit être détachée de l’envoi d’une force de paix. Constater la situation n’est pas synonyme de résoudre le problème. On peut ne pas réunir les conditions et les moyens d’intervenir, mais reconnaître la réalité comme elle est.
Une institution se doit d’être honnête, plus qu’un individu. L’hypocrisie, le mensonge et la démagogie ont des limites, même en diplomatie ! Ils ne font qu’aggraver les blessures et tourner le couteau dans la plaie d’un peuple sauvagement génocidé.
Une délégation du Conseil de Sécurité de l’ONU vient de séjourner au Burundi du 20 au 22 janvier 2016. Elle a été convoquée aussitôt arrivée, dans un mépris souverain, à se rendre dans les provinces sous une escorte étouffante, allant jusqu’à l’agression physique et publique de la cheftaine de la délégation, l’Américaine SAMANTHA Power, et des autres membres de son équipe.
Malgré les manœuvres grossières que le pouvoir génocidaire a utilisées pour camoufler le crime et surtout son ampleur, la mission de l’ONU n’a pas été dupée. En dépit de l’effort des autorités de cacher la fumée, ces illustres hôtes n’ont pas manqué de voir que la maison est en feu, que sous la natte qui leur a été déroulé dans la case, il sentait mauvais en dessous, trop mauvais ! Et ils ne manqueront pas de le dire !
Publié le 3-02-2016 – par Jean Jacques MAKUNGU
http://fr.igihe.com/droits-humains/apocalypse-genocide-des-tutsi-du-burundi-et.html
Posté le 08/02/2016 par rwandaises.com