Après le génocide rwandais, l’écriture s’est imposée comme une urgence. Pour exorciser la souffrance et fixer la mémoire. Ainsi, les écrivains restent marqués par le génocide, même si peu à peu certains sont tentés par la fiction…
Lorsqu’elle a vu le film germano-britannique Shooting Dogs, en 2005, Scholastique Mukasonga a dû quitter la salle. La romancière rwandaise savait, bien sûr, ce qui s’était passé dans son pays en 1994, elle qui a perdu 37 membres de sa famille dans le génocide. Des témoignages de rescapés, elle en a lu et entendu des quantités. Mais voir les tueries ainsi représentées, sans la médiation des mots et de l’imaginaire, lui était insupportable.
« On aurait cru que les génocidaires allaient sortir de l’écran pour nous massacrer », se souvient, les yeux écarquillés, l’écrivaine, qui tout au contraire a la préoccupation constante de ne pas effrayer. En France, où elle vit depuis 1992, elle est allée jusqu’à dissimuler sa nationalité rwandaise pour cette raison. « Quand on me demandait d’où je venais, j’avais un blocage. Je voyais aussitôt la machette. Je pensais que cela inquiéterait les gens, qu’ils allaient s’enfuir. » Beaucoup la croyaient originaire de Guadeloupe. Elle ne rectifiait pas.
Cette île française des Caraïbes, Scholastique Mukasonga l’a finalement découverte en 2013. Elle y a trouvé l’inspiration pour son nouveau roman, Cœur tambour, qui raconte l’histoire de Kitami, chanteuse prodigieuse périodiquement possédée par Nyabinghi, un esprit mythique de la tradition rwandaise.
Posté le 26/05/2016 par rwandaises.com