Chaque type de solidarité correspond une forme de démocratie, de «pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple»: le rôle de tout dirigeant est d’amplifier l’héritage culturel national et s’en servir pour bâtir des institutions destinées à organiser et optimiser le vivre ensemble. Par André Twahirwa

«Ce n’est pas seulement pour vivre ensemble, mais pour bien vivre en semble que l’on crée un État.» (Aristote).

La solidarité (du latin solidaritas, de solidus «consistant») est, sans aucun doute, une des valeurs universelles cardinales. Mais l’universalité n’est pas synonyme d’unicité: universalité du principe mais diversité dans l’incarnation effective et dans la hiérarchisation de valeurs selon le contexte spatio-temporel, historique et culturel.
II y a donc solidarité et solidarité. Et l’on peut distinguer deux types de solidarité:
– la solidarité «verticale», centrée sur le JE. Tel est le cas en Occident, nettement individualiste, d’un individualisme qu’amplifie une urbanisation proche de 80% aujourd’hui ;
– la solidarité «horizontale», centrée sur le NOUS. C’est le cas en Afrique (noire), clairement sociale, l’Afrique du Nord étant une entité à part, tournée vers la Méditerranée plus que vers le sud du continent ou se concevant elle-même comme telle.
On peut parler aussi de «départage» et de «partage».
roman(«Éduquer») de son roman Le Tiers-Instruit (1991) le récit d’une partie de football (américain) entre «insulaires» du Pacifique. Les «naturels» jouent jusque tard dans la nuit, jusqu’à ce qu’il y ait «égalité» (huit à huit) : «il ne faut ni vainqueur ni vaincu», disent-ils aux marins américains de retour de la Seconde Guerre mondiale et qui leur avaient appris le jeu. Pour nos GI, il faut «départager» les deux équipes: «Une partie s’achève quand une équipe gagne et que l’autre perd, et seulement dans ce cas-là! Il faut un vainqueur et un vaincu».
La morale du récit est claire : «Nous ne comprenons pas cela qui n’est ni juste ni humain, puisque l’une l’emporte sur l’autre. Alors nous jouons le temps du jeu que vous nous avez appris. Si à la fin le résultat se trouve nul, la partie s’achève sur le vrai partage » disent-ils aux marins interloqués et qui finissent par se demander, en quittant l’île, s’ils ont vraiment gagné la guerre à Hiroshima.
Ce récit en dit long sur l’opposition entre deux types d’attitude (dominante) dans les relations individuelles et/ou collectives: l’esprit de «partage», celui des insulaires, qui est inscrite dans l’ADN du peuple dans un pays comme le Rwanda, foncièrement social, et l’esprit de «départage», celui des GI, qui caractérise la vie sociale et politique dans un pays comme la France, fondamentalement individualiste.
Il s’agit évidemment de dominantes, de ce que des sociologues appellent la «mentalité de base», et, sur un continuum, chaque aire de civilisation, chaque région du monde ou chaque pays est plus ou moins proche de l’un ou l’autre pôle, type de solidarité. A ce propos, il est intéressant de comparer les héritages culturels en ce qui concerne la solidarité.
En effet, à chaque type de solidarité correspond une forme de démocratie, de «pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple»: société à dominante verticale ou société à dominante horizontale, dans un cas comme dans l’autre, le rôle de tout dirigeant est de se saisir de l’héritage culturel national et de l’amplifier en s’en servant comme socle pour bâtir de solides institutions destinées à organiser et optimiser le vivre ensemble, ici et maintenant: «Ce n’est pas seulement pour vivre ensemble, mais pour bien vivre en semble que l’on crée un État.» (Aristote).
Première partie: les deux types de solidarité solidarité «verticale» ou départage
Etat Providence (redistribution des revenus, protection sociale et autres allocations dispensées d’en haut, par L’Etat); corps intermédiaires (syndicats, ONG et autres associations «sans but lucratif») dont les actions sont essentiellement dirigées vers
l’aide aux autres à l’intérieur ou à l’extérieur du pays sur le même modèle pyramidal que l’Etat Providence. Il s’agit de la solidarité propre aux sociétés du JE. C’est le cas en Occident, à des degrés divers selon les pays et, de façon manifeste et institutionnalisée, dans un pays comme la France, pays du «départage».
En France, la solidarité horizontale porte le nom de fraternité: la fraternité, la troisième et dernière composante de la devise de la République française (Liberté/Égalité/Fraternité), et qu’on retrouve dans le premier article de la Déclaration Universelle des de l’Homme adoptée à Paris en 1948 par les 58 États alors membres de l’ONU, dont seulement 4 pays africains (Afrique du Sud, L’Égypte, l’Éthiopie, Libéria): «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité».
Si l’on entend de plus en plus parler de «solidarité», c’est au sujet de l’action des associations comme les Restos du cœur, qui reprochent à l’État de ne plus remplir suffisamment son rôle de régulateur social au nom de la «fraternité».
Et le monde associatif semble avoir le vent en poupe: le nombre d’associations actives doit avoisiner 1,3 million, 46% des Français âgés de plus de 18 ans adhèrent à une association, soit 23 millions d’adhérents; 32% des Français exercent une activité bénévole, soit 16 millions de bénévoles. Ces chiffres sont de 2012 mais ils ne doivent pas avoir beaucoup bougé. Ils sont fournis par le Centre Nationale de la Recherche Scientifique dans une étude intitulée Quelques repères sur les associations en France aujourd’hui(2012), où il est précisé: «La contribution des associations à la décision démocratique, à la cohésion sociale, au bien-être des personnes et à l’animation des territoires est évidemment première par rapport à leur rôle économique». Mais c’est pour tout de suite tempérer cet enthousiasme: 1 800 000 personnes exercent une activité salariée dans une association; ensuite et surtout, les présidents et plus généralement les dirigeants élus sont le plus souvent des hommes, des seniors issus des classes moyennes et supérieures.
Ainsi, dans une société de départage, le monde associatif a, lui aussi, un fonctionnement vertical: les actions initiées et conduites par quelques-uns sont essentiellement dirigées vers l’aide aux plus précaires à l’intérieur (pour les associations surtout) et/ou à l’extérieur (pour les ONG) du pays. Associations et ONG bénéficient des subsides des pouvoirs publics (gouvernement et collectivités locales) et autres organisations intergouvernementales (Union européenne…); d’où d’ailleurs le manque d’indépendance et l’instrumentalisation qu’on leur reproche souvent et souvent à juste titre. Dans tous les cas, le secteur associatif reste marginal: son action se limite à un secteur précis et vise uniquement à pallier les manques de l’Etat_ un peu comme les fondations philanthropiques aux États-Unis _ et son poids de quelque 70 milliards d’euros ne pèse rien face à celui de la seule protection sociale, qui coûte plus de 400 milliards d’euros par an.
C’est à ce modèle de solidarité verticale que renvoient la vie politique ou sociale et son modèle pyramidal, l’économie (capitaliste), l’organisation de l’Eglise, de l’Eglise catholique notamment, ou encore le fonctionnement de la «Communauté internationale». Il s’agit du modèle libéral que l’Occident a l’outrecuidance de présenter, à cause de la défaite des démocraties «populaires» et du bloc communiste à la fin la Guerre froide, comme LE modèle universel.
Solidarité «horizontale» ou partage
L’autre type de solidarité, fort méconnu, est centré sur le groupe, la communauté. La vertu cardinale est le partage, l’Ubuntu. À propos d’Ubuntu, une anecdote circule sur le net depuis quelque cinq ans: un anthropologue a proposé un jeu à des enfants d’une tribu d’Afrique australe. Il a posé un panier plein de fruits sucrés près d’un arbre et a dit aux enfants que le premier arrivé remportait le panier. Quand il leur a dit de courir, ils se sont tous pris par la main et ont couru ensemble, puis se sont assis ensemble profitant de leurs friandises. Quand il leur a demandé pourquoi ils n’avaient pas fait la course, ils ont répondu «UBUNTU», comment peut-on être heureux si tous les autres sont tristes ? L’Ubuntu est souvent défini par la formule : « TU es donc JE suis » (à comparer au « Je pense donc JE suis  » de Descartes).
La solidarité horizontale (vs solidarité verticale) a évidemment des manifestations linguistiques. Deux exemples à la fois simples et frappants: les locatifs pluriels iwacu, iwanyu, iwabo (littéralement: là de nous/de vous/d’eux) du kinyarwanda signifient respectivement «chez nous/chez moi», «chez vous/chez toi», «chez eux ou elles/chez lui ou elle». Il s’agit d’un chez-soi partagé, le singulier étant réservé au chef de famille iwanjye «chez moi», iwawe «chez toi», iwe «chez lui» et, au pays d’un Parlement à 64 % féminin, de plus en plus, «chez elle». De même, dans le champ lexico-sémantique de la parenté, nous avons par exemple data wacu, mama wacu,… (Littéralement: «Le père de nous; la mère de nous…»). qui signifient «Mon oncle paternel/Notre oncle paternel» ou «Ma tante maternelle/ Notre tante maternelle»…c’est-à-dire l’oncle ou la tante «partagé(e)» par la fratrie et la fratrie au sens large, qui inclut les cousines et cousins «parallèles» de la famille, elle-même élargie. Cette valeur de partage se retrouve tout naturellement aussi dans les proverbes ou dictons comme « Nta mugabo umwe »/ Nta mugabo wigira » (Il n’y a pas de courageux, seul/ il n’y a pas de courageux qui se suffit »). Ou encore «Umugabo ni uwagarukiye undi» (Le courageux est celui qui s’est retourné pour aider l’autre, pour le sauver par exemple sur un champ de bataille…).
La solidarité horizontale est une solidarité entre «voisins», plus ou moins proches, à l’occasion d’événements majeurs de la vie privée (funérailles, mariage; culture des champs et autres travaux communautaires…) mais aussi dans la vie de la cité en ce qui concerne par exemple la justice ou la sécurité mais aussi l’économie, une économie sociale et solidaire avec la multiplication des coopératives notamment. Il s’agit de la solidarité propre aux sociétés du NOUS. Et tel le cas en Afrique (noire), à des degrés divers selon les pays et, de façon manifeste et institutionnalisée, dans un pays comme le Rwanda, le pays du «partage».
C’est à ce modèle de solidarité horizontale que tout renvoie: solidarité dans la vie sociale et économique, une économie avec une large composante «sociale et solidaire, dans la vie politique et le modèle étatique: dans les sociétés du NOUS, le rôle de l’État, avec la participation maximale de la population, passant au second plan. Dans la religion rwandaise, l’Imana, le Dieu unique, n’est l’objet d’aucun culte qui serait organisé par une Église: le seul culte, le culte de Ryangombe, fait penser aux nouvelles églises dites «évangéliques» (plus de 400 officiellement enregistrées), dont le succès est dû à leur dimension communautaire: de petits groupes se partagent tout au quotidien au-delà de la prière. Si elles poussent comme des champignons et attirent des fidèles catholiques ou anglicans en masse, c’est d’abord parce qu’elles sont le lieu d’une solidarité «horizontale» dans la tradition rwandaise, contrairement au fonctionnement pyramidal des églises classiques.
Sociétés à dominante verticale ou société à dominante horizontale, à chacun de ces deux types de sociétés correspond une forme de démocratie égalité, fraternité) entre «la gauche» et la «droite», entre les progressistes et les conservateurs. Après les élections, la constitution d’un gouvernement d’union nationale est une gageure. Un plan à (très) long terme est difficile voire impossible à mettre en place: à peine élu, le parti majoritaire pense aux élections suivantes; obnubilés par l’alternance, les vaincus s’opposent systématiquement quitte à saper l’action de la majorité et vont même jusqu’à promettre de défaire ce qui est en train d’être mis en place. Une fois les élections passées, les citoyens se mettent à compter les points à travers de trop fréquents sondages en attendant la fin du mandat en cours et les élections suivantes. Pour très forte majorité d’entre eux en tous cas.
Il va de soi que, dans ce type de configuration politique, le multipartisme d’opposition ainsi que les contre-pouvoirs sont nécessaires voire indispensables au fonctionnement démocratique du pays: sans eux, il serait inévitablement livré à l’arbitraire de ses dirigeants. Mais le multipartisme s’organise toujours dans un esprit de compétition et non de dialogue dans la recherche du consensus; d’où l’émiettement du paysage politique avec quelque 408 formations politiques officiellement déclarées en 2013 (une année après les Présidentielles de 2012) et une dizaine de partis qui occupent la scène médiatique et remportant des succès aux élections nationales(Le Monde.fr du 15 janvier 2015). Et toujours dans un antagonisme exacerbé entre les deux «partis de gouvernement» (Le Parti socialiste et les Républicains, avec autour de 150 000 adhérents chacun, selon Le Monde.fr du 22 septembre 2015), qui ne parviennent guère à se mettre d’accord, même sur l’essentiel.
Et il en est de même dans la vie syndicale avec un syndicalisme dispersé (cinq confédérations pour les 7% à 8% des salariés français syndiqués) et fait de revendication, rarement de proposition. Le paysage médiatique est, lui aussi, très émietté et de plus en plus animé par la loi libérale du marché (la loi l’offre et de la demande de l’information, devenue spectacle dans beaucoup de médias); d’où la course à l’information et au scoop; d’où aussi la polémique souvent virulente destinée à pimenter les débats, à faire monter les enchères. Cet affrontement est d’autant plus radical que le PAF (le paysage médiatique) n’échappe pas à la division bipolaire «gauche vs droite»; en effet, en dehors des journaux et magazines spécialisés, la presse est politique et partisane: il y a une «presse de gauche» et une «presse de droite».
Dans une démocratie représentative, l’alternance et (donc) l’élection sont au cœur de la vie de la cité, le vaincu d’hier ne rêvant que d’une chose: prendre sa revanche. La participation réel du peuple dans le jeu démocratique (du pouvoir PAR le peuple) est très limitée et se réduit donc presque au droit de vote: «le simple citoyen, qui est un vrai démocrate, se fait, en silence, un jugement sur le gouvernement de son pays et, lorsqu’il est consulté, à dates régulières, pour l’élection d’un député par exemple, exprime son accord ou son désaccord. Après quoi, comme il est normal et sain, il retourne à ses préoccupations personnelles qui ont leur grandeur, ne serait-ce que par ce qu’elles ont de nécessaire, non seulement pour chaque individu, mais pour la société.»(Ces princes qui nous gouvernent: lettre aux dirigeants de la nation, 1957).
L’auteur de ces propos, Michel Debré, a été premier Premier Ministre de Charles de Gaule, de 1959 à 1962, et est considéré comme «le père de la Constitution» française actuelle.
Le pays risque donc de verser dans l’assistanat et dans la professionnalisation en politique: une classe de politiciens de métier risquent d’accaparer le pouvoir et d’en verrouiller l’accès: «Il est contre l’ordre naturel que le grand nombre gouverne et que le petit soit gouverné. On ne peut imaginer que le peuple reste incessamment assemblé pour vaquer aux affaires publiques…» écrivait J. J. Rousseau (Du Contrat Social, III, 4).
Les mass media, les syndicats étant eux-mêmes politiques et en tous cas partisans, l’exercice de la démocratie risque de se réduire à l’organisation du suffrage universel. Avec, comme corollaire, le sentiment d’exclusion de la majorité dite «silencieuse» et l’abstentionnisme, un abstentionnisme qui peut friser ou dépasser les 40% (39 % aux dernière Municipales; 41,59 % aux dernières Régionales; 44,59% aux dernières Législatives, au second tour) ou même les 60% voire les 70% (dernières Européennes, 56.5 %; 69,8% au référendum de 2000 sur le passage du septennat au quinquennat). Autre risque: du fait que l’élection est au centre du système, le clientélisme et les surenchères électorales avec des promesses «qui n’engagent que ceux qui les écoutent». Seule l’élection présidentielle échappe à la règle: depuis 1962, elle se fait au suffrage universel direct et elle constitue le plus fort moment de la vie démocratique du pays. Mais cette présidentialisation ne fait qu’accentuer le caractère pyramidal du pouvoir à telle enseigne que l’on en est venu à parler de «monarque républicain» pour désigner l’hôte de l’Élysée. gouvernent ou qui sont appelés à gouverner _ appelés à contribuer ensemble et «de pair à pair» à la res publica, au service du bien commun.
La bonne gouvernance _ c’est-à-dire l’efficacité des politiques publiques POUR le peuple_ est donc au cœur de la vie de la cité. Dès lors, le risque majeur serait une mauvaise gestion des outils de la bonne gouvernance et garde-fous institutionnalisés: l’Ombudesman, dont le rôle est de combattre la corruption par l’éducation, la prévention et l’application de la loi, et surtout le Rwanda Governance Board (RGB), un organisme autonome qui joue le rôle de réflexion, d’évaluation et de contrôle de la qualité réellement démocratique des politiques publiques. Il faut donc consolider le modèle endogène et le faire évoluer de peur que le pays ne cède de nouveau aux attraits du modèle aujourd’hui mondialement dominant de la démocratie représentative, qui n’est pas adaptée à l’ADN culturel rwandais: les deux premières républiques l’avaient adoptée sans l’adapter avec les résultats et les conséquences que l’on sait.
Le meilleur des deux systemes?
C’est évidemment à la démocratie libérale que pense Winston Churchill quand il déclare : «La démocratie est un mauvais système, mais elle est le moins mauvais de tous » ou « le pire des régimes, à l’exception de tous les autres déjà essayés dans le passé ».
Il s’agit du modèle «occidental», qui se présente aujourd’hui comme LA démocratie, la seule et unique forme de démocratie: l’Occident a la mission de démocratiser le reste du monde.
Pierre Mendès-France, un des grands hommes politiques français contemporains, rappelle et précise en quoi ce système peut être mauvais : «La démocratie ne consiste pas à mettre épisodiquement un bulletin dans une urne, à déléguer les pouvoirs à un ou plusieurs élus puis à se désintéresser, s’abstenir, se taire pendant cinq ans. Elle est action continuelle du citoyen non seulement sur les affaires de l’Etat, mais sur celles de la région, de la commune, de la coopérative, de l’association, de la profession. […] La démocratie n’est efficace que si elle existe partout et en tout temps.»(La République moderne, 1962r) Tout en soulignant les défaillances du modèle libéral, le grand homme politique français, semble faire, a contrario et en filigrane, l’éloge du modèle participatif propre aux sociétés du partage. En effet, en dehors du modèle grec de la «démocratie directe», difficile à appliquer voire inapplicable et pas seulement à l’échelle des grandes nations, le modèle participatif est celui qui permet au peuple, le plus large possible, d’exercer le plus possible les pouvoirs de gouvernement les plus étendus: c’est le «PAR le peuple», qui différencie les différentes formes de démocratie.
Mais, si supériorité il peut y avoir, c’est seulement dans l’absolu et sur le papier. «Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à la barbarie», c’est-à-dire celui qui traite l’autre d’inférieur et de sauvage à civiliser, écrivait en 1961 le grand Lévi-Strauss (Race et Histoire): pour le grand anthropologue structuraliste, chaque modèle est un tout avec ses qualités et, en miroir, ses défauts. Donc ni sentiment de supériorité, qui enferme (rait) l’Occident la vision, ethnocentriste et évolutionniste née avec le colonialisme, ni complexe d’infériorité, qui s’érige (rait) en plafond de verre pour l’ex-colonisé. «À prendre le terme dans la rigueur de l’acception, il n’a jamais existé de véritable démocratie, et il n’en existera jamais.»(J.-J. Rousseau, III, 4): il ne s’agit pas de démocratiser l’autre différent mais, en toute humilité et objectivité, de moderniser son propre modèle démocratique c’est-à-dire de l’améliorer et de l’adapter à un contexte qui ne cesse de changer.
Développement et Culture (avec grand C, au sens de Valeurs partagées) sont indissociables. On ne bâtit pas sa maison sur du sable. Mais sur un roc: elle résistera ainsi aux vents, aux pluies et aux torrents. C’est pourquoi, la souveraineté des peuples est inscrite dans la Charte des Nations unies de 1945 et réaffirmée dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948. Chaque peuple doit pouvoir rester maître de son destin et acteur de son avenir. En effet, la solidarité internationale véritable, le bon vivre ensemble entre les peuples est au prix du respect de ce principe.

TWAHIRWA André, est Enseignant à la retraite, Africaniste et ancien consultant de l’UNESCO, Division Arts et Culture.

Posté le 25/02/2017 par rwandaises.com