Gaël Faye, chanteur et auteur franco-rwandais a commencé vendredi 3 mars une tournée de concerts en France. Le lauréat du prix Goncourt des lycéens pour son roman «Petit Pays» vit au Rwanda depuis deux ans. Avant son départ pour la France, il est allé à la rencontre du public rwandais à Kigali et a échangé autour de son livre, qui raconte le quotidien insouciant d’un petit garçon dans le Burundi du début des années 1990, bouleversé par la montée des tensions entre Hutu et Tutsi.
Rfi: Vous avez animé, à Kigali, un café littéraire et il y avait du monde, beaucoup de monde. Nombre de participants ont dit qu’ils s’étaient identifiés au personnage de Gabriel. Vous attendiez-vous à ce que votre roman ait une telle résonnance au Rwanda ?
Gaël Faye: Non, absolument pas, pour la raison qu’au Rwanda on a une tradition orale et que l’on n’est pas forcément attiré par les livres. Je l’ai d’ailleurs vu pendant la rédaction de mon roman que j’ai finalisée ici, à Kigali. J’ai vu, autour de moi, même ma famille qui était assez intriguée par ce temps que je passais à écrire, se disant : « A quoi ça sert ? A quoi bon ? ».
Après, il y a l’histoire qui est racontée dans ce romain. Il s’agit quand même d’un narrateur qui est, comme moi, un Franco-Rwandais, un petit métis d’une classe sociale assez privilégiée, à Bujumbura. Je me disais que ce personnage-là allait forcément être trop particulier, trop singulier pour intéresser un peu tout le monde. Et finalement, c’est l’inverse qui s’est passé. C’est peut-être parce qu’il est dans cette position-là qu’il arrive à réunir autant de monde, que ce soit en France ou ici, à Kigali.
Cela fait deux ans que vous avez quitté la France pour vous installer à Kigali, dans le pays de vos racines. Pourquoi ce choix ?
Eh bien parce que je ne les connaissais pas, ces racines-là. C’est le pays de ma mère qu’elle a quitté, au début des années 60, avec sa famille, pour échapper au massacre anti Tutsis qu’il y avait à l’époque. J’ai donc grandi à Bujumbura dans le mythe du Rwanda, mais que je ne connaissais pas. On m’en parlait et c’était surtout un récit familial qui était chargé de persécutions, d’exils… Il y avait une envie en moi de connaître le quotidien du pays, de me rapprocher de cette origine que finalement je ne connaissais qu’à travers un prisme négatif.