Après dix ans d’instruction, les juges français ont terminé leurs investigations au sujet de l’implication présumée dans le génocide de 1994 au Rwanda de l’ancien préfet rwandais Laurent Bucyibaruta, réfugié en France, a-t-on appris lundi de sources concordantes.
Les magistrats du pôle «crime contre l’humanité» du tribunal de grande instance de Paris ont signifié le 9 mai aux parties la fin de leur enquête. Il revient désormais au parquet de prendre ses réquisitions, avant que les juges ne se prononcent sur la tenue d’un procès de M. Bucyibaruta, né en 1944.
Celui qui fut préfet de la province Gikongoro (sud), une des régions où les massacres contre les Tutsis furent les plus violents, avait été arrêté en juillet 2007 en France, où il a été mis en examen pour des faits de génocide. Il est actuellement sous contrôle judiciaire.
«Ce dossier, né d’une première plainte déposée en l’an 2000, avance enfin», a déclaré à l’AFP Alain Gauthier, président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR). «Au vu des nombreux éléments à charge, nous espérons que cela le conduira devant les assises», a-t-il ajouté.
Laurent Bucyibaruta, ex-militant du parti du président de l’époque, Juvénal Habyarimana, dont l’assassinat allait déclencher le génocide de 1994, était également recherché par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), qui l’accusait d’avoir ordonné aux Interahamwes (extrémistes hutu) qui étaient sous ses ordres de commettre plusieurs massacres contre les Tutsis.
Le TPIR, qui s’était dessaisi quelques mois plus tard au profit des juridictions françaises, s’était dit en 2013 préoccupé par la lenteur de la justice française dans le traitement de cette affaire.
Environ 25 dossiers liés au génocide au Rwanda sont actuellement instruits en France par un pôle d’enquêteurs et de magistrats spécialisés sur les crimes contre l’humanité. Ce dernier a été créé face à l’accumulation des plaintes concernant ce génocide, dont plusieurs auteurs s’étaient réfugiés dans l’Hexagone.
À ce jour, deux procès ont eu lieu en France.
Un ancien capitaine de l’armée rwandaise, Pascal Simbikangwa, a été condamné en 2014 à 25 ans de réclusion, une peine confirmée en appel. Il s’est pourvu en cassation.
Deux autres Rwandais, les anciens bourgmestres Tito Barahira et Octavien Ngenzi, ont été condamnés en juillet 2016 à la réclusion criminelle à perpétuité. Ils ont fait appel de leur condamnation.
Également visé par des enquêtes en France, le prêtre Wenceslas Munyeshyaka a bénéficié d’un non-lieu, mais les parties civiles ont fait appel. Un non-lieu définitif a été rendu à l’endroit de l’ancien ingénieur agronome, Pierre Tegera, dont la participation au génocide n’a pu être établie.