Arnold Aganze au studio de Radio One Malte

Les cinéphiles finladais et maltais ont eu l’honneur de visionner en début de mois NGO, le tout premier long métrage du jeune cinéaste Congolo-Ugandais Arnold Aganze. Sous cet acronyme universellement connu comme Non Governmental Organisation (Organisation Non gouvernementale), Aganze voit «une arnaque qui a pris le dessus sur les projests d’aide pensés pour les pauvres Africains et dont seuls les administrateurs tirent profit»; et dès lors target= »_blank » rel= »noopener noreferrer »>NGO devient Nothing Going On : Rien ne va.

Le film raconte l’histoire de deux amis fraîchement diplômés et sans emplois qui décident de créer une ONG pour avoir leur part de ce “gâteau juteux” que sont les organisations humanitaires. Ils se font conseiller par un expert Ougandais ayant une longue expérience dans la rédaction de projets afin obtenir des fonds internationaux. Munis d’un appareil photo offert par une copine anglaise, les deux amis commencent leur aventure dans la charité.

L’aide humanitaire n’est pas différente de la colonisation

Ils prennent en photo des enfants jouant sur une cour poussiéreuse et les font passer pour des orphelins. Une jeune fille est rhabillée en loques afin d’être “présentable” aux riches donneurs européens. Un projet “Pop Corn pour l’espoir » est crée, il est sensé redonner à la femme son «pouvoir de décision » et en faire une femme d’affaires.
Le film est une comédie satyrique qui récrie les dégâts causés par la présence d’ONG en Afrique. Pour Aganze, target= »_blank » rel= »noopener noreferrer »>ex enfant soldat ayant été objet de l’intérêt rapproché des ONG, le continent n’a pas besoin de la présence pérenne d’organisations « qui s’y mettent à 10 pour construire le même puits d’eau dans un village, et une fois leur projet arrivé à terme, ils en créent un autre pour réaliser le même que celui précédent; présenté avec des contours différents. »

L’aide humanitaire n’est pas différente de la colonisation, l’humanitaire est même plus oppressif. Tout comme la colonisation, vous avez des Européens qui arrivaient chargés de cadeaux pour des rois et chefs locaux opportunistes, corrompus et domptés. Aujourd’hui, vous avez les humanitaires européens qui viennent «aider» à restaurer ce qui fut détruit par leurs aînés. Le résultat est le même: des populations opprimées à qui on ne donne pas la possibilité de décider par elles-mêmes de leur sort

film b

Capture d’écran d’une scène du film NGO Nothing Going On: « popcorn for hope » veut rendre à la femme son pouvoir de décision

C’est tout le monde qui veut dire aux Africains ce qu’ils doivent faire

Aganze est présent à Angers en France où NGO sera projeté au Festival du film africain qui s’y tient du 16 au 21 mai.
Le film sorti en 2016 a reçu les faveurs de prestigieux festivals en Afrique. Il fut projeté en grande première lors du Festival de Carthage en Tunisie, et les cinéphiles nigérians le découvrirent à l’occasion de l’Africa International film festival. Au Rwanda il reçut le prix du meilleur long métrage au Mashariki African film festival. Il fut au programme du Fespaco au Burkina Faso et fut aussi projeté au Cameroon International Film Festival.
« J’ai tourné avec un budget de moins de 3000 euros et tous les acteurs sont des volontaires qui ont accepté de participer sans se faire payer« , dit-il. Son parcours fut semé de refus car le sujet traité dans sa production « ne plaît pas à beaucoup. »

Nous croyons à une Afrique libérée de cette image pathétique créée par les ONG. Imaginez-vous qu’il en  existe environ 12 000 enregistrées en Ouganda. Pourtant si vous visitez les villages qui font l’objet de cette générosité, l’accès à l’éducation y est toujours aussi problématique. Ces organisations ne servent à rien, car elles ne peuvent rien changer. Les gens en Europe s’imaginent qu’ils résoudront les problèmes des Africains, c’est tout le monde qui veut leur dire ce qu’ils doivent faire. Le changement viendra des Africains eux-mêmes, qui ont tout intérêt à rejeter cette “aide” qui les maintient dans la servitude.

Auto-développement plutôt que dépendance

L’artiste Gambienne Sona Jobarteh a réagi à notre micro à ce sujet lors de son passage à la Vallette à l’occasion du Malta World Music Festival. Elle n’est pas aussi radicale qu’Aganze, mais elle serait pour une approche humble de la part des organisations européennes qui devraient respecter le travail des organisations locales dont la connaissane culturelle des sociétés prises en charge est précieuse pour des résultats  effectifs et durables.

Je comprends le point de vue d’Aganze qui n’est pas dénué de logique car très souvent, une fois l’ONG chargée d’une precise mission quitte la scène, le problème qu’elle était sensée resoudre repparaît, car elle vient fournir une aide rapide à une situation complexe. Je vis la même situation en Gambie oû les gens se laissent complaisemment aider et manquent totalement de l’inspiration nécessaire  pour leur changement.  Néamoins le fait que le monde s’intéresse aux crises sociales du continent est louable et appréciable. Mais, je pense que les Africains devraient se concenter sur l’auto-developpement plutôt que sur la dépendance.

Arnold Aganze s’est donné pour mission de faire connaître son œuvre au plus grand nombre possible et des séances de projections gratuites sont possible sur demande dans les universités et écoles.

https://www.lafactory.com/201705202611/monde/le-film-d-arnold-aganze-critique-violemment-la-presence-des-ong-en-afrique

Posté le  21/05/20 par rwandaises.com