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Denyse Umuhuza en compagnie des enfants;

Nous connaissions Denyse Umuhuza, nous avions assisté à la sortie de son premier livre fin novembre de l’année dernière. Cela se passait aux Éditions BAKAME à Kigali. Il y avait également d’autres auteurs de livres pour enfants, mais Denyse avait particulièrement attiré notre attention par son aisance affichée en compagnie de ces enfants, présents pour l’occasion.

Lorsque ce fut au tour de Denyse de présenter son livre et de raconter l’histoire, nous avons vraiment été surpris par la connexion qui spontanément s’est créée entre l’auteure et les jeunes lecteurs en herbe. Tout était naturel, Denyse s’est assise et « sans mot dire », les enfants sont venus s’agglutiner à elle pour ne plus former qu’un ensemble attentif aux moindres de ses paroles. Nous qui étions dans l’assemblée, nous sommes devenus d’un seul coup, les témoins de ce magnifique spectacle que Denyse et les enfants nous offraient… et c’est là que nous avons compris que quelque chose de spécial se passait !

Denyse Umuhuza n’est pas une auteure comme les autres, elle représente bien plus que cela. Elle aime tellement les enfants qu’en un seul instant elle redevient la « gamine » pour se fondre dans le groupe. Denyse redevient un enfant lorsqu’elle s’adresse à eux et c’est sans doute pour cela que l’osmose créée fonctionne si bien. L’auteure ne s’adresse pas aux « petits », elle discute avec ses copains et ses copines…un spectacle extraordinaire auquel nous avons assisté et que nous n’oublierons pas. « Chapeau l’artiste ! »

Plusieurs mois se sont écoulés depuis, et Denyse vient de sortir un nouveau livre, l’occasion pour nous de l’interviewer et de vous la faire connaître.

Denyse, pouvez-vous nous dire comment tout cela a commencé, en quelques mots d’où vous est venu cet amour pour l’écriture destinée aux enfants ?

Bien avant l’école primaire, ma grand-mère qui aujourd’hui est âgée de 96 ans, me racontait des petites histoires. J’adorais être avec elle, je ne m’ennuyais jamais, elle avait toujours une histoire sous le coude pour moi. J’ai donc été baignée dans cet univers et tout naturellement, une fois à l’école primaire, je racontais à mes copines ces histoires et lorsque j’ai enfin pu maîtriser les prémices de l’écriture, je les écrivais sur de petits bouts de papier. Les autres élèves adoraient me les « chiper » pour aller s’isoler à plusieurs et déchiffrer les mots qui formaient les phrases, qui une fois assemblées les faisaient voyager dans un autre monde.

A l’école secondaire, j’ai persisté dans ma manie d’écrire sans arrêt, histoire après histoire, et j’ai remarqué qu’au plus j’en écrivais, au plus mon imagination débordait de toute part. Très vite, les autres élèves me réclamaient d’autres aventures et c’était bien volontiers que je faisais appel à ma créativité pour en inventer d’autres encore.

C’est mon amie Christine qui a commencé à me parler d’éditer mes histoires et de faire quelque chose de ce talent indéniable qui courait au bout de ma plume. A 16 ans, Christine m’a parlé des Éditions BAKAME et comme je ne me montrais pas plus enthousiaste que cela, elle a été jusqu’à me menacer de ne plus être ma copine si je ne contactais pas BAKAME, au moins pour essayer.

A 18 ans, j’ai pris le bus de Musanze pour rejoindre Kigali et les Éditions BAKAME. J’y ai déposé le manuscrit de ma première fiction, et puis j’ai attendu. Un mois plus tard, un coup de téléphone m’annonçait que mon histoire était géniale et qu’elle les intéressait fortement.

Lorsque je les ai rencontré, j’étais tellement impressionnée et timide que j’avais quelques difficultés à me réjouir pleinement, car je devais absolument leur dire que je n’avais malheureusement pas d’argent pour publier un livre. C’est à ce moment où j’ai compris que c’était aux Éditions BAKAME de me payer et pas l’inverse, que j’ai pu profiter de ce jour unique et ineffaçable dans ma tête. J’allais être éditée et je n’avais rien à payer, le rêve absolu !

A vous voir tellement à l’aise au milieu de tous ces enfants, n’avez-vous jamais pensé à devenir enseignante ?

Dans la famille, je suis l’aînée et j’adorais m’occuper de mes frères. Je voulais faire cela toute ma vie, j’allais enseigner et faire de ma passion ma profession. Lorsque j’ai annoncé à ma mère : « je veux être maîtresse maternelle », sa réponse fut aussi rapide que l’éclair : « cela ne paie pas ! ».

Justement, à ce sujet-là, c’est possible aujourd’hui de vivre au Rwanda en tant qu’auteure ?

Non ! C’est très difficile d’en retirer suffisamment de revenus pour en vivre correctement. Être auteure, c’est avant tout une passion, il faut concevoir cette passion comme une activité « secondaire ».

Les africains ont pour réputation de ne pas lire, vous confirmez cela ?

Non, je ne pense pas que cela soit exact, le problème est ailleurs. En réalité les africains ne disposent pas de livres qui leurs correspondent, qui leurs parlent. Les livres qu’ils peuvent parcourir ne les intéressent pas vraiment, ne parlent pas de leur culture, de leur histoire.

Vous sortez aujourd’hui votre deuxième livre, de quoi parle-t-il ?

Je précise tout d’abord que ce livre est en Kinyarwanda, alors que le premier était traduit dans les trois langues nationales. En fait, sans dévoiler complètement l’histoire, il parle des aventures d’un petit garçon capricieux, qui avait toujours sommeil, qui adorait rester dans son lit. Sa mère, inquiète de voir son enfant aussi inactif, lui propose d’aider les autres en allant leur chercher de l’eau à la rivière. Alors qu’elle le met en garde d’un grand danger, son fils se laisse tenter par une aventure périlleuse. La morale de cette histoire est à trouver dans l’Amour que portent les parents à leurs enfants, même si ceux-ci leurs désobéissent.

Vos ouvrages sont magnifiques, cartonnés et très bien illustrés, comment peut-on se les procurer ?

Le plus simple c’est de me les commander directement chez moi, via mon adresse email. Sur Kigali, je peux me charger de les faire parvenir, par contre pour les autres régions rwandaises ou internationales, je dois évidemment calculer les frais de port en plus.

Pour terminer, vous auriez entre les mains une baguette magique, vous en feriez quoi ?

Je ferais apparaître un bâtiment comme celui-ci, grand, ouvert sur la nature, toit en paille, pour y inviter des enfants. Je nous vois bien assis par terre, un grand feu allumé et raconter des histoires, ou leur faire la lecture de livres. En fait, je me rends compte que j’aimerais bien leur offrir tout ce que ma grand-mère m’a apporté. Ce serait le vrai bonheur !

Voici les coordonnées de Denyze UMUHUZA :
Mail : umuhuzad@gmail.com
Livres :

Le Secret de Nyanka (Kinyarwanda / Français / Anglais) : 4.000RWF

 

Karisa wa Munyantamati (Kinyarwanda) : 3.500 RWF

Interview: Denyse Umuhuza, une auteure qui redonne aux enfants ce qu’elle a reçu de sa Grand-Mère

Posté le 30/10/2017 par rwandaises.com