D’ici quelques semaines, la Belgique défendra sa candidature à un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité et l’un de ses arguments portera sur son expertise africaine.
Pourquoi pas ? Cette expertise est nourrie par le passé colonial, par l’effort de coopération mené depuis des années, par un souci constant porté, malgré vents et marées, à un Congo souvent traité comme un enfant unique, gâté par la nature et monopolisant l’attention. Mais surtout, cette expertise est celle de milliers de citoyens belges, nés au Congo ou liés à ce pays par mille liens de famille, de travail, d’affection, qui veillent à ce que le courant continue à circuler et alimentent d’innombrables réseaux de solidarité. Un tel maillage, au niveau des populations, donne effectivement aux Belges une connaissance du Congo inégalée.
Peut-on dire pour autant que le monde politique soit en phase avec cet intérêt, voire cette empathie du public ? Pas vraiment. On se souvient des compromissions avec le régime Mobutu, d’une rupture trop brutale suivie par une décennie d’indifférence, on se rappelle les élans et les efforts de Louis Michel suivis par l’arrogance d’un Karel De Gucht…
Les hauts et les bas, les glaciations et les réchauffements, sans oublier les affaires…Aujourd’hui aussi, la politique africaine de la Belgique fait désordre : en cette période cruciale où le Congo bascule entre la préparation des élections et la tentation de la violence, l’ambassadeur est prié de s’éterniser loin du terrain et aucune explication n’est donnée à cette absence, sauf le soupçon de désaccords au sommet. Quant aux Congolais qui sont, eux, de vrais spécialistes de la Belgique, ils jouent en virtuoses sur les contradictions du pouvoir : Kabila discute avec Charles Michel mais laisse Reynders dans l’antichambre, des experts essaient de forcer la porte et de contourner les sanctions tandis que des alliés européens rompent discrètement le front de la solidarité et, en douce, délivrent des visas ou signent des contrats…Bref, le « front » est divisé : les uns rêvent tout haut d’une « transition sans Kabila » sans savoir comment on s’y prendra pour dégommer l’occupant du fauteuil présidentiel, d’autres, plus réalistes et sans illusions, prennent acte de la promesse d’élections qui seront de toutes manières contestées.
Sur un seul point cependant, il y a unanimité : alors que le Congo a réussi à faire reculer les géants du secteur minier, à leur faire accepter une plus juste rémunération du prix du cobalt et autres matières premières stratégiques, cette incontestable victoire, qui, pour une fois, réjouit l’opinion congolaise et suscite un peu d’espoir, n’a été saluée que par le pesant silence des experts de tous bords…

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Posté le 28/03/018 par rwandaises.com