Contraint à la diversification économique, l’Angola est en quête de nouveaux investisseurs que son président, João Lourenço, est venu chercher à Paris en clarifiant sa position sur la RDC. Cinq jours après la visite du président rwandais Paul Kagame, Emmanuel Macron a reçu ce lundi son homologue angolais, João Lourenço. Après des rendez-vous à l’Unesco puis à l’École polytechnique dans la matinée, le nouveau président angolais élu en septembre dernier a échangé ce lundi après-midi avec plus de 80 entreprises françaises.

Une visite qui intervient sur fond de crispation diplomatique, après les propos, mercredi dernier, du président français soutenant une « initiative » – non dévoilée – de l’Union africaine sur la RDC et soutenue par l’Angola. Une déclaration qui a suscité la colère à Kinshasa. Le porte-parole du gouvernement Lambert Mende a d’ailleurs réclamé des explications. « Nous ne reprochons rien au président français, Emmanuel Macron. La question consiste à savoir ce qui a bien pu être dit entre lui et le président du Rwanda concernant la RDC sans que nous le sachions », a déclaré M. Mende.

Le dossier congolais largement commenté
Si la question est sensible, c’est parce que l’Angola cherche à avoir de l’influence au sein de l’Union africaine sur le dossier congolais. Un rôle qui s’explique de par l’histoire du pays avec son voisin direct. « L’ancien président José dos Santos avait soutenu Laurent-Désiré Kabila dans son accession au pouvoir, explique Didier Péclard, enseignant-chercheur à l’université de Genève, auteur de nombreux ouvrages sur l’Angola. Il y a eu une certaine proximité entre Luanda et Kinshasha pendant des années. Mais ce lien s’est peu à peu étiolé à cause des conflits liés à l’exploitation des mines de diamants à la frontière, et de la crise au Kasaï, qui a poussé des milliers de réfugiés congolais vers l’Angola. Une animosité que José dos Santos n’a pas réussi à apaiser : « Il n’avait pas la carrure d’un faiseur de paix sur le continent », explique-t-il.

Aujourd’hui, João Lourenço « joue la carte de l’Union africaine ». « Nous n’avons pas la prétention d’intervenir sur des sujets internes à la RDC, a-t-il d’ailleurs affirmé aujourd’hui en conférence de presse. Mais nous conseillons l’application des accords de la Saint-Sylvestre qui prévoient des élections […] sans le président actuel. » « Ces conversations avec les présidents Paul Kagame et Emmanuel Macron ne se font pas en secret », a-t-il ajouté, en réponse à Kinshasa. Le président angolais a d’ailleurs assuré qu’une rencontre avec Joseph Kabila était prévue dans les prochains jours.

Le plan de João Lourenço pour l’économie
Mais, au-delà de la RDC, d’autres sujets ont été mis sur la table des discussions entre les deux chefs d’État, et notamment le renforcement des relations économiques entre les deux pays. L’Angola, deuxième producteur de pétrole du continent, traverse en effet une crise sans précédent depuis 2014 et la chute du cours de l’or noir. Une situation économique difficile qui a eu pour conséquence la baisse significative des importations françaises, l’État angolais n’étant plus en mesure d’honorer ses factures. Pour sortir de ce marasme, le Parlement a ainsi adopté une loi la semaine dernière allégeant les contraintes entre investisseurs étrangers et locaux, et facilitant l’obtention de visas pour les entrepreneurs et les salariés. Des règles nouvelles qui s’appliqueront à tous les secteurs… excepté ceux du pétrole, des mines et de la finance.

En effet, le gouvernement angolais a mis le cap sur la diversification de son économie, même si « ce discours n’est pas nouveau, les enjeux aujourd’hui sont considérables, affirme Didier Péclard. Car l’Angola peine à attirer les investisseurs étrangers depuis 2014 ». Ce lundi, des accords ont donc été signés dans ce sens. « Une convention » s’appliquant au secteur de l’agriculture, « d’un montant de 100 millions de dollars », a été approuvée avec l’engagement de l’Agence française de développement (AFD), a déclaré Emmanuel Macron. Le gouvernement cherche à développer significativement l’agriculture, car c’est un secteur dont dépend une très large portion de la population angolaise. Pourtant, aucun investissement n’y avait été fait depuis des années. Autre secteur dans la ligne de mire de João Lourenço, celui de l’industrie au sens large. « Aucune industrie de transformation des matières premières n’existe en Angola. Le pays importe tout », déplore le chercheur.

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Posté le 03/06/2018 par rwandaises.com