Comment imaginer et comprendre que les responsables français, au nom des français, aient pu décider de soutenir, un régime mettant en place un génocide pour l’extermination systématique des Batutsi ? Par Michaël Sztanke






Quel fut le rôle joué par l’État français dans le génocide des Batutsi ? C’est la question à laquelle se propose de répondre Michaël Sztanke dans ce documentaire juste et émouvant, où sont confrontées les paroles de responsables militaires et politiques français et celles, entre autres, d’un milicien génocidaire, d’historiens, du journaliste Patrick de Saint Exupéry présent sur place en 1994…

Comment imaginer et comprendre que les responsables français aient pu décider de soutenir, malgré les informations précises qui leur étaient transmises, un régime mettant en place l’extermination systématique de la population des Batutsi ? D’avril à juillet 1994, en trois mois, entre huit cent mille et un million d’entre eux furent tués : dix milles morts chaque jour pendant cent jours !

Avec des images justes, en ayant parfois recours au dessin, le film nous montre la mise en place de la logique génocidaire, parallèle à l’intensification de la présence militaire française. C’est bien l’armée tricolore qui sauve le régime menacé alors que déjà, avant 1994, des massacres de la population sont commis et documentés. Le général Jean Varret, un des militaires témoignant à l’écran, tentera de donner l’alerte : il sera mis à l’écart par sa hiérarchie.

En interrogeant les acteurs de l’époque, des exécutants présents sur place jusqu’aux hauts responsables, Michaël Sztanke nous montre la réalité de ce qu’est le néocolonialisme. Il dévoile les conséquences désastreuses d’une politique menée ici dans le seul but de protéger les intérêts présumés de l’État français, au mépris total de la vie humaine, en engageant la puissance d’un pays riche et moderne aux côtés d’une clique de criminels, dont certains vivent en France aujourd’hui sans avoir été jugés.

De ce film émerge inévitablement la question du rapport à nos institutions, et plus simplement celle de la démocratie. Que savaient les citoyens français, en 1994, de ce que commettait l’armée en leur nom. Et que savons nous aujourd’hui du rôle joué par notre État dans certains pays africains ?

La question est d’une actualité crue, alors que se tiendra du 3 au 6 juin le sommet Afrique-France à Bordeaux, ville dirigée jusqu’à un passé récent par Alain Juppé, ministre des affaires étrangères durant le génocide des Batutsi.

La 26e commémoration du génocide des Batutsi se déroulera le 7 avril, à partir de midi, sur le pont de pierre à Bordeaux, et dans l’après-midi ainsi qu’en soirée à l’espace Jean Vautrin à Bègles, avec la participation des associations Cauri, Survie Gironde et du collectif Bienvenue.

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