La commission de recherche sur le rôle de la France au Rwanda et relative au gééocide contre les [Ba]Tutsi a présenté son rapport en détaillant sa méthode et ses moyens.  Par Pierre Lepidi et Gaïdz Minassian







Le rapport, rendu à Emmanuel Macron dimanche, ne donne aucune information sur le contenu précis des archives étudiées par les membres de l’équipe.

Une méthodologie stricte et rigoureuse mais aucune révélation pour l’instant. Comme elle s’y était engagée, la commission de recherche sur les archives françaises relative au Rwanda et au génocide des Tutsi a rendu sa note intermédiaire à Emmanuel Macron, dimanche 5 avril.

Attendue notamment par la communauté rwandaise de France, qui commémore à partir du mardi 7 avril les 26 ans du génocide, ce rapport – dont la version définitive doit être dévoilée en avril 2021 – ne donne aucune information sur le contenu précis des archives qui ont été étudiées depuis quasiment un an et se contente d’expliquer la méthode de travail et les moyens dont elle dispose.

« On savait déjà qu’aucune commission, surtout si elle a été nommée par l’Elysée, ne pouvait édicter une vérité intangible et consensuelle, a déploré Patrice Garesio, co-président de Survie, une association qui analyse depuis 1994 le rôle de la France dans le génocide contre les [Ba]Tutsi au Rwanda. On souhaitait attendre son rapport final pour juger sur pièces de son indépendance. Mais il est choquant que dans son préambule historique, cette note d’étape présente comme positif le rôle de la France, parfois en contradiction avec ce qu’a déjà reconnu la Mission d’information parlementaire de 1998. »

« Cette note restitue le travail de toute une équipe organisée et unie, engagée depuis le début, mobilisée malgré le confinement pour remettre ce rapport de mi-étape en temps et en heure, a déclaré au Monde Vincent Duclert, président de la commission de recherche et chercheur et ancien directeur du Centre d’études sociologiques et politiques Raymond-Aron. La commission, par ce qu’elle développe ici, s’emploie à être à la hauteur du défi méthodologique et archivistique de la recherche qu’il lui est demandé de relever, et de la confiance des autorités qui ne s’est jamais démentie. »

Lire notre entretien avec Vincent Duclert : « La commission sur le Rwanda aura un pouvoir d’investigation dans toutes les archives françaises »

Souhaitée par Emmanuel Macron « pour que le génocide des Tutsi prenne toute sa place dans notre communauté » et « pour un approfondissement de notre connaissance et de notre compréhension de cette entreprise terrifiante de destruction humaine », la commission d’études est chargée de faire toute la lumière sur le rôle controversé de la France au Rwanda, notamment au printemps 1994 où plus d’un million des Tutsi selon l’ONU ont trouvé la mort.

« Autonomie matérielle »

Les membres de cette commission devaient « à titre exceptionnel » obtenir une « procédure d’habilitation d’accès et de consultation de l’ensemble des fonds d’archives provenant de la présidence de la République, du premier ministre, du ministère des armées… »

A cause notamment de l’absence d’Hélène Dumas et de Stéphane Audoin-Rouzeau, deux spécialistes considérés comme légitimes, la création de cette commission avait suscité une polémique dès la nomination des quinze experts chargés d’y travailler.

La note remise au président, que Le Monde s’est procurée en exclusivité, indique tous les détails du fonctionnement de la commission. Elle précise par exemple que celle-ci dispose d’un budget de 300 000 euros, ce qui lui assure « une autonomie matérielle » et qu’elle est gérée indépendamment de la présidence de la République.

La commission est « hébergée au ministère des armées » avec à sa disposition cinq bureaux dont une salle de réunion et une salle pour les postes informatiques du réseau interministériel sécurisé. A cause du contexte parfois tendu et des doutes qui persistent entre l’armée et certains médias, elle estime bon de préciser dans son rapport qu’elle « travaille de façon indépendante. »

« Les centres d’archives qui accueillent actuellement les équipes de la commission concentrent le maximum de séries à dépouiller, peut-on lire dans la note. Il s’agit du centre des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine (fonds présidentiels, fonds du premier ministre, des ministères de la justice, de l’intérieur, etc.), du centre des archives diplomatiques de La Courneuve (fonds des ministères des affaires étrangères, de la coopération, etc.), du service historique de la défense au château de Vincennes (ministère de la défense, état-major des armées, secrétariat du Conseil supérieur de la défense nationale… ) et du service des archives de la DGSE à Paris. »

Mais combien de centaines de milliers de documents sont contenus dans ces archives ? Quel volume cela représente-t-il ? Que disent les messages échangés entre l’ambassadeur de France à Kigali et l’Elysée en avril 1994 ? Que racontent les notes des services secrets ? Que contiennent les échanges entre la cellule africaine de l’Elysée et le ministère des armées ? Vingt-six ans après les massacres, il est toujours impossible d’y répondre.

« Destinée à la lecture de tous, cette note a vocation à se suffire à elle-même et donc ne pas appeler de commentaire particulier de ma part », répond Vincent Duclert. La vérité est-elle encore dans les cartons ? « Des enquêtes archivistiques s’emploient à retrouver des archives manquantes », fait savoir le rapport.

FRANÇAFRIQUE : La Commission sur le Rôle de la France dans le Génocide contre les [Ba]tutsiTutsi au Rwanda a Rendu son Rapport

La commission de recherche sur le rôle de la France au Rwanda et relative au gééocide contre les [Ba]Tutsi a présenté son rapport en détaillant sa méthode et ses moyens.  Par Pierre Lepidi et Gaïdz Minassian

Le rapport, rendu à Emmanuel Macron dimanche, ne donne aucune information sur le contenu précis des archives étudiées par les membres de l’équipe.

Une méthodologie stricte et rigoureuse mais aucune révélation pour l’instant. Comme elle s’y était engagée, la commission de recherche sur les archives françaises relative au Rwanda et au génocide contre les [Ba]Tutsi a rendu sa note intermédiaire à Emmanuel Macron, dimanche 5 avril.

Attendue notamment par la communauté rwandaise de France, qui commémore à partir du mardi 7 avril les 26 ans du génocide, ce rapport – dont la version définitive doit être dévoilée en avril 2021 – ne donne aucune information sur le contenu précis des archives qui ont été étudiées depuis quasiment un an et se contente d’expliquer la méthode de travail et les moyens dont elle dispose.

« On savait déjà qu’aucune commission, surtout si elle a été nommée par l’Elysée, ne pouvait édicter une vérité intangible et consensuelle, a déploré Patrice Garesio, co-président de Survie, une association qui analyse depuis 1994 le rôle de la France dans le génocide contre les [Ba]Tutsis au Rwanda. On souhaitait attendre son rapport final pour juger sur pièces de son indépendance. Mais il est choquant que dans son préambule historique, cette note d’étape présente comme positif le rôle de la France, parfois en contradiction avec ce qu’a déjà reconnu la Mission d’information parlementaire de 1998. »

« Cette note restitue le travail de toute une équipe organisée et unie, engagée depuis le début, mobilisée malgré le confinement pour remettre ce rapport de mi-étape en temps et en heure, a déclaré au Monde Vincent Duclert, président de la commission de recherche et chercheur et ancien directeur du Centre d’études sociologiques et politiques Raymond-Aron. La commission, par ce qu’elle développe ici, s’emploie à être à la hauteur du défi méthodologique et archivistique de la recherche qu’il lui est demandé de relever, et de la confiance des autorités qui ne s’est jamais démentie. »

Lire notre entretien avec Vincent Duclert : « La commission sur le Rwanda aura un pouvoir d’investigation dans toutes les archives françaises »

Souhaitée par Emmanuel Macron « pour que le génocide contre les {Ba] Tutsi prenne toute sa place dans notre communauté » et « pour un approfondissement de notre connaissance et de notre compréhension de cette entreprise terrifiante de destruction humaine », la commission d’études est chargée de faire toute la lumière sur le rôle controversé de la France au Rwanda, notamment au printemps 1994 où plus d’un million des Tutsi selon l’ONU ont trouvé la mort.

« Autonomie matérielle »

Les membres de cette commission devaient « à titre exceptionnel » obtenir une « procédure d’habilitation d’accès et de consultation de l’ensemble des fonds d’archives provenant de la présidence de la République, du premier ministre, du ministère des armées… »

A cause notamment de l’absence d’Hélène Dumas et de Stéphane Audoin-Rouzeau, deux spécialistes considérés comme légitimes, la création de cette commission avait suscité une polémique dès la nomination des quinze experts chargés d’y travailler.

La note remise au président, que Le Monde s’est procurée en exclusivité, indique tous les détails du fonctionnement de la commission. Elle précise par exemple que celle-ci dispose d’un budget de 300 000 euros, ce qui lui assure « une autonomie matérielle » et qu’elle est gérée indépendamment de la présidence de la République.

La commission est « hébergée au ministère des armées » avec à sa disposition cinq bureaux dont une salle de réunion et une salle pour les postes informatiques du réseau interministériel sécurisé. A cause du contexte parfois tendu et des doutes qui persistent entre l’armée et certains médias, elle estime bon de préciser dans son rapport qu’elle « travaille de façon indépendante. »

« Les centres d’archives qui accueillent actuellement les équipes de la commission concentrent le maximum de séries à dépouiller, peut-on lire dans la note. Il s’agit du centre des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine (fonds présidentiels, fonds du premier ministre, des ministères de la justice, de l’intérieur, etc.), du centre des archives diplomatiques de La Courneuve (fonds des ministères des affaires étrangères, de la coopération, etc.), du service historique de la défense au château de Vincennes (ministère de la défense, état-major des armées, secrétariat du Conseil supérieur de la défense nationale… ) et du service des archives de la DGSE à Paris. »

Mais combien de centaines de milliers de documents sont contenus dans ces archives ? Quel volume cela représente-t-il ? Que disent les messages échangés entre l’ambassadeur de France à Kigali et l’Elysée en avril 1994 ? Que racontent les notes des services secrets ? Que contiennent les échanges entre la cellule africaine de l’Elysée et le ministère des armées ? Vingt-six ans après les massacres, il est toujours impossible d’y répondre.

« Destinée à la lecture de tous, cette note a vocation à se suffire à elle-même et donc ne pas appeler de commentaire particulier de ma part », répond Vincent Duclert. La vérité est-elle encore dans les cartons ? « Des enquêtes archivistiques s’emploient à retrouver des archives manquantes », fait savoir le rapport.

https://www.rwanda-podium.org

NB: GÉNOCIDE CONTRE LES TUTSI », LA SEULE TERMINOLOGIE SANS AMBIGUÏTÉ En français, elle est portée, à l’écrit, et par le nom et par l’article. Dès lors, l’orthographe correcte doit être « Génocide contre les Batutsi » Selon Alexis Kagame