M.F.C. (avec AFP)
Mis en ligne le 25/10/2008
Deux officiers supérieurs, absents des lieux du crime, ont été acquittés. Le procureur militaire avait réclamé 15 ans pour les deux condamnés.
La Cour militaire de Kigali a acquitté vendredi deux hauts gradés, le général Wilson Gumisiriza et le major Wilson Ukwishaka, accusés de complicité du meurtre de trois évêques et dix prêtres catholiques en juin 1994.
La Cour a condamné à huit ans de prison deux capitaines qui plaidaient coupable pour le meurtre de ces ecclésiastiques. Les deux hauts gradés étaient jugés pour complicité de meurtre, l’accusation estimant que les crimes commis par leurs subordonnés constituaient une faute de commandement.
Les quatre militaires étaient, à l’époque, membres de la branche armée du Front patriotique rwandais (FPR, ex-rébellion actuellement au pouvoir à Kigali) qui a mis un terme au génocide rwandais en juillet1994. Environ un million de personnes, essentiellement membres de la minorité tutsie, ont été tuées dans le génocide de 1994.
Parmi les ecclésiastiques tués figuraient l’archevêque de Kigali, Vincent Nsengiyumva, l’évêque de Byumba (nord) Joseph Ruzindana, et l’évêque de Kabgayi (centre) Thaddée Nsengiyumva, alors président de la Conférence des évêques catholiques du Rwanda.
Les quatre accusés avaient été arrêtés le 11juin dernier, après que le TPIR (Tribunal pénal international pour le Rwanda, chargé de juger les principaux accusés du génocide) eut annoncé son intention de les inculper. Kigali avait alors annoncé son intention de les juger elle-même, le TPIR se réservant le droit de se saisir à nouveau du dossier si le procès rwandais n’était pas équitable.
La Cour militaire rwandaise a estimé que le général et le major, qui n’étaient pas sur les lieux du crime, ne disposaient pas d’informations qui auraient pu leur permettre d’agir pour prévenir le meurtre. Les deux hommes ont été immédiatement remis en liberté après le verdict.
Quant aux deux capitaines, la cour a écarté la préméditation, jugeant qu’ils avaient agi sous le coup de l’émotion, après avoir vu des masses de cadavres de victimes du génocide, et a tenu compte de leurs aveux. Elle les a condamnés à 8 ans de prison, loin des 15 ans réclamés par le procureur.
Durant le procès, les deux capitaines avaient expliqué qu’ils reprochaient aux ecclésiastiques – qu’ils étaient chargés de protéger après la prise de la ville de Kabgayi par le FPR – de s’être rendus complices des génocidaires.
Le rôle de l’Eglise catholique dans le génocide rwandais reste controversé. Une partie du personnel religieux rwandais y a participé activement; d’autres ont fui leurs responsabilités et certains se sont conduits en héros pour défendre leurs ouailles persécutées.
L’Eglise s’était divisée dans les années précédant le génocide, à propos précisément de la conduite à tenir sur les exactions qui l’annonçaient. Elle le demeure aujourd’hui encore.