Au cours des quinze années qui se sont écoulées depuis la fin de la guerre, beaucoup de personnes ont été tuées ou blessées par des mines antipersonnel et des bombes à sous-munitions. Une association locale tente de défendre et d’aider les victimes.

Près de 30 Etats africains s'engagent contre les sous-munitions  © Handicap international / Mary Wareham

Près de 30 Etats africains s’engagent contre les sous-munitions
© Handicap international / Mary Wareham

Par un après-midi ensoleillé de 1994, peu après le génocide, Francis Karangwa, un homme de 24 ans vivant à Kaborogota, dans le district de Nyagatare, était assis sous un manguier. Il discutait avec des amis et surveillait ses vaches. “J’étais assis sur une pierre, les jambes croisées. Tout à coup, lorsque j’ai bougé les jambes, il y a eu une explosion », se souvient-il. « Je suis tombé en arrière, sans comprendre ce qui se passait. Lorsque j’ai repris mes esprits, j’ai regardé ma jambe, elle me faisait mal, et j’ai vu mon pied déchiqueté. »

Ce qui restait de son pied a dû être amputé à l’hôpital militaire de Kanombe. On a ensuite découvert que Francis Karangwa avait été victime d’un explosif d’une bombe à sous-munitions. Ces engins sont constitués d’une enveloppe qui s’ouvre en vol et laisse s’échapper des centaines de petites bombes, des sous-munitions, qui se dispersent ensuite sur une vaste zone. Quantité d’entre elles n’explosent pas à l’impact et restent cachées des années après la fin des conflits, jusqu’à l’arrivée d’une malheureuse victime comme Francis Karangwa.

Au Rwanda, après la fin de la guerre, beaucoup d’explosifs et de mines antipersonnel ont été laissés là où ils étaient et oubliés, les populations ignorant leur présence. A Kaborogota, Francis Karangwa connaît une foule de personnes qui ont été victimes de ces armes, lesquelles infestent les endroits où les villageois emmènent paître leurs troupeaux. “Elles sont souvent enfouies sous terre, mais les allées et venues du bétail les déterrent, et elles se transforment alors de facto en mines antipersonnel”, explique-t-il.

En s’apercevant qu’ils n’étaient pas seuls dans cette situation, Francis Karangwa et d’autres victimes de mines antipersonnel et d’armes à sous-munitions ont fondé l’Association des survivants aux mines antipersonnels et aux amputés (ALSA), qui rassemble aujourd’hui quelque 200 membres. Elle travaille actuellement à un recensement national des personnes ayant survécu à l’explosion de ce type d’armes.

A la suite de son accident, Francis Karangwa s’est engagé dans une campagne contre les bombes à sous-munitions, mais il s’est aussi impliqué avec ferveur dans la défense des droits des personnes handicapées. “Beaucoup pensent que les handicapés sont bons à rien, mais c’est faux. Nous avons des droits, et notre association tente de sensibiliser les gens pour leur faire comprendre que nous ne sommes pas des mendiants”, souligne-t-il.

“Les gens doivent savoir que nous méritons nos droits, et que lorsque le gouvernement lance des projets, nous devons être pris en compte. Par exemple, de nombreux handicapés ne peuvent pas monter des escaliers ; il faut donc penser à eux lorsqu’on construit un bâtiment de plusieurs étages.”

 

http://www.courrierinternational.com/article/2009/09/14/le-combat-des-victimes

Posté par rwandaises.com