La cour d’assises de Bruxelles a innové en décidant, mardi 10 novembre, de juger par défaut (en son absence)

Ephrem Nkezabera, un Rwandais de 57 ans soupçonné d’avoir participé activement au génocide d’avril 1994, à Kigali.

L’accusé, qui souffre d’un cancer, n’aurait, selon ses avocats, plus que quelques mois à vivre. Les défenseurs ont donc réclamé un report du procès, le temps d’un traitement médical. La présidente de la cour a rejeté cette demande, suivant l’avis du procureur fédéral ainsi que des parties civiles. Leurs avocats avaient souligné que la Belgique se devait de respecter ses engagements internationaux. M. Nkezabera est, en effet, poursuivi à la demande du procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda.

Arrêté en Belgique en 2004, l’accusé a été mis en examen pour meurtres, assassinats, mais aussi pour viols. Ces derniers ont été qualifiés de crimes contre le droit international pour la première fois en Belgique, ce qui est une autre victoire, juge Me Michèle Hirsch, avocate de l’une des parties civiles.

Encourager à tuer

Ephrem Nkezabera, surnommé « le banquier du génocide » parce qu’il était l’un des dirigeants de la Banque commerciale du Rwanda, était réputé proche du président Juvenal Habyarimana. Il était aussi membre du Comité national des interahamwe, la milice née en 1991 dans le giron du parti unique.

Ce sont les interahamwe qui, avec une partie de l’armée, de la gendarmerie et de la police, déclenchèrent les massacres contre les Tutsi et les Hutu modérés, le 7 avril 1994. La veille au soir, un avion transportant le président rwandais près de l’aéroport de Kigali. Les violences qui allaient suivre et durer treize semaines firent, selon les sources, de 500 000 à 1 million de morts.

Officiellement conseiller aux affaires économiques des interahamwe, M. Nkezabera y était « incontournable », a affirmé un témoin au cours de l’enquête. Selon l’accusation, il aurait lancé, avant 1994, des menaces de mort explicites contre les Tutsi et évoqué leur génocide. Et aurait dressé des listes de personnes à éliminer.

Dès le 6 avril 1994, il est lui-même passé à l’acte, affirme l’accusation. L’accusé ne nie pas s’être rendu sur les barrages érigés où les interahamwe exécutaient des personnes. Il leur a fourni de l’argent, des armes et de la nourriture, les encourageant à effectuer leur « travail », à savoir « tuer des êtres humains », reconnaît-il.

Il aurait lui-même commis un nombre indéterminé d’assassinats et n’aurait pas porté secours à des personnes encore en vie, dont une enfant. Ephrem Nkezabera aurait violé plusieurs jeunes femmes tutsi, ce qu’il nie farouchement. Il affirme qu’il les protégeait et que, en échange, elles consentaient à avoir des relations sexuelles.

Le procès devrait durer un mois. Absent aux audiences, M. Nkezabera ne sera pas représenté par son avocat, qui a décidé de se retirer parce qu’aucun débat équitable et contradictoire ne pourra, selon lui, avoir lieu.

Jean-Pierre Stroobants

 http://www.africatime.com/rwanda/nouvelle.asp?no_nouvelle=489709&no_categorie=

Posté par rwandaises.com