A peine Kinshasa et Kigali ont-ils renoué leurs relations diplomatiques, après 15 ans de profonde brouille, que la perspective d’exploiter le gaz méthane du lac Kivu risque d’exhumer de vieilles rancoeurs et de ramollir la confiance renaissante. La RDC doit savoir négocier aux fins de s’épargner le climat délétère qui a actuellement refroidi ses relations avec l’Angola, autour de la souveraineté sur la riche zone d’exploitation pétrolière au large de l’Atlantique.
Sans pessimisme de mauvais aloi, l’exploitation imminente du gaz méthane du lac Kivu par la RDC risque de dégénérer en conflit avec le Rwanda. Confirmant, une fois de plus, la malédiction qui plane sur les ressources naturelles en pays sous-développé s.
Selon Africa Mining Intelligence, une revue spécialisée, un Groupe d’experts a été chargé de mener des études visant l’exploitation potentielle du gaz du lac Kivu, en vue de produire de l’électricité.
Financé par la Banque mondiale, le Groupe d’experts a mené ses études pendant deux ans. En juin dernier, il a transmis son rapport et ses recommandations au gouvernement tant de Kinshasa que de Kigali.
Le rapport a suggéré de maintenir six blocs d’exploitation sur la rive congolaise du lac. Mais, selon des sources d’Africa Mining Intelligence, le gouvernement de la RDC entend acquérir deux blocs supplémentaires, pour faire un total de huit, qu’il soumettra ensuite aux appels d’offre.
Six blocs contre cinq
Le magazine croit savoir que des pré-négociations seraient déjà entamées par Kinshasa avec d’éventuels investisseurs. Mais que le gouvernement envisagerait d’accorder des autorisations en mars 2010 concernant les blocs qui n’auront pas, d’ici là, trouvé de preneur.
Insolite : le partage des blocs a obéi à un mode de partage bien singulier. Contrairement à la RDC qui n’a reçu que six blocs, le Groupe d’experts a recommandé qu’il soit attribué au Rwanda cinq blocs, du côté rwandais du lac. Mais où la RDC compte-t-elle obtenir les deux blocs supplémentaires ? Va-t-elle récupérer dans le lot du Rwanda ? Kinshasa a-t-il formellement négocié les « deux blocs supplémentaires » avec Kigali ?
En attendant des précisions de la RDC, retenons qu’au Rwanda deux projets vont commencer à produire de l’énergie électrique le mois prochain. Le premier produira 3.6 MW. Il est financé par le Rwanda Investment Group (IRG), détenu par le milliardaire Tribert Rujugiro soutenu par Data Environment Company, propriété du Français Michel Halbwachs. Le second projet – 3 MW – est appelé KP One par le gouvernement rwandais. Il bénéficie des appuis de la Banque mondiale. Comme pour le projet de 100 MW, initié par ContourGlobal, les équipements sont progressivement expédiés vers le site qui accueillera l’usine.
Il sied de souligner que le gaz méthane du lac Kivu est jusqu’ici exploité uniquement par le Rwanda. Que le ministère congolais des Hydrocarbures ait annoncé le lancement prochain des appels d’offre laisse penser que la RDC a enfin compris le bien fondé des recommandations du Groupe d’experts sur l’extraction du gaz du lac Kivu.
Pour mémoire, la coopération entre le Rwanda et la RDC concernant le gaz méthane a été boostée depuis la fin du premier semestre de 2009. Albert Butare et Laurent Muzangisa, ministres rwandais de l’Energie et congolais des Hydrocarbures, se sont rencontrés en août dernier pour mettre sur pied le comité conjoint de direction. Leur homologue burundais, Samuel Ndayiragije, les avait rejoints. L’équipe a été chargée d’élaborer une étude de faisabilité concernant un projet conjoint de production de 200 MW d’électricité d’ici avril 2010.
En attendant, le souhait des peuples congolais et rwandais est de voir le gaz du lac Kivu ne soit pas celui de la discorde. Mais bien de la concorde pour le développement des deux pays.
Kinshasa, 21/12/2009 (LP/MCN)
Posté par rwandaises.com
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