Dans sa livraison du 8 janvier, Africa Confidential, le périodique d’information britannique, revenait sur le conflit latent qui avait opposé le gouvernement congolais, la Monuc et des ONG humanitaires ou de défense des droits de l’homme à propos des opérations militaires au Kivu. Le périodique soulignait que “l’Opération Kymia II pouvait être considérée comme un succès, l’armée congolaise, avec le soutien de la MONUC, ayant réussi à ramener au Rwanda 1400 prisonniers des FDLR, soit trois fois plus qu’en 2008.” Cependant, devant la levée de boucliers suscitée par Kymia II, une nouvelle approche a été adoptée pour l’opération conjointe, dorénavant appelée “Amani Leo” un titre bien irréaliste puisqu’il signifie “la paix maintenant”: selon AC, “il ne s’agït plus d’éradiquer les FDLR mais de défendre les portions de territoire d’où ces groupes armés ont été chassés.” “Une approche prudente qui pourrait prolonger le conflit” relève AC “et cela au moment où KInshasa a reçu l’appui des leaders politiques du Nord Kivu pour une approche plus dure. Plusieurs chefs traditionnels, dont Nicolas Kalinda, leader des Hunde, auraient demandé à Kabila de mener davantage d’opérations militaires contre les FDLR.” “Mais ces derniers” conclut AC “ont été poussés plus profondément dans la forêt et ne semblent ps avoir été significativement affaiblis…”A nouveau, la bouteille est à moitié pleine pour les uns, à moitié vide pour les autres….
Ainsi que nous l’écrivions récemment depuis Goma, si le business des minerais a été maintes fois documenté, sans que les informations soient jamais suivies de beaucoup d’effets concrets, le business précis des” opérations retour” c’est à dire du détournement des soldes dans l’armée devrait lui aussi faire l’objet d’études documentées et il ne faudrait pas avoir peur de désigner quelques chefs militaires, quel que soit leur grade…En outre, dans cette région qui représente, depuis 1994, une urgence humanitaire d’envergure (la guerre ayant succédé à l’afflux des réfugiés hutus venus du Rwanda après le génocide) ne serait-il pas temps de faire les comptes: quels ont été les montants totaux dépensés au titre de l’aide humanitaire d’urgence, comparés aux montants dépensés pour des projets de développement à long terme? Quels ont été les impacts de cette assistance internationale sur le développement ou la dépendance de la région, sur l’accélération de la fin du conflit ou sur sa prolongation? Rappelons simplement qu’en 1995-96, Médecins sans Frontières avait suscité un tollé en se retirant des camps de réfugiés hutus, assurant que les extrémistes y avaient pris le pouvoir et que cela l’empêchait de mener sa mission à bien en toute neutralité.
D’autres ONG, toujours présentes au Kivu aujourd’hui, avaient poursuivi leurs opérations, indifférentes au leadership politique des camps de réfugiés et elles s’étaient opposées violemment à la dispersion brutale des grands camps, une opération menée par l’armée rwandaise sous couvert de l’AFDL. Accompagnée de massacres et de la disparition ou de la fuite de 200.000 personnes, cette dispersion des camps par les armes avait cependant permis le retour au Rwanda d’un million de Hutus, qui ont aujourd’hui repris une vie normale.
Ne peut on se demander si, aujourd’hui encore, le souci de prolonger l’assistance humanitaire, quitte à freiner les opérations qui pourraient pousser les Hutus à regagner le Rwanda, n’entraîne pas des effets pervers: certaines formes d’aide d’urgence n’ont elles pas pour résultat de permettre aux FDLR et aux civils qu’ils entraînent avec eux, de “tenir”, de refuser de rentrer au Rwanda, ce qui peut contribuer indirectement et (on peut l’espérer) involontairement, à prolonger le conflit sinon le business?

 

http://blogs.lesoir.be/colette-braeckman/2010/01/29/echec-ou-reussite-au-kivu-la-controverse-continue/

Posté par rwandaises.com