Je faisais partie de tous ceux qui trouvaient inutile de fêter le cinquantenaire de nos indépendances. J’ai changé. Au lancement du Cinquantenaire, à Abidjan, le Président Laurent Gbagbo a « frappé » et j’ai aimé. La passion des peuples c’est la critique systématique du pouvoir ou des pouvoirs. L’homme politique se sent paralysé devant les attaques pour des raisons politiques (électorales). LG a eu le courage de porter la critique dans le camp de son peuple. En quelques phrases ou quelques minutes il nous a permis, avec beaucoup d’humour, de nous poser des questions sur nos 50 ans. L’une des critiques, et cela n’étonne plus, est notre faiblesse dans le travail. On ne travaille pas beaucoup en Afrique. On ne travaille pas beaucoup en Côte d’Ivoire. On connaît les chiffres. Les heures de travail en Afrique par rapport aux autres continents du monde. Faible, très faible. Le Président doit critiquer sans cesse nos défauts. Le peuple n’apprend que par la répétition. A force d’entendre dire qu’on ne travaille on va finir par le croire et nous mettre réellement au travail. Trop d’heures de travail en Afrique sont gaspillées par des heures de bavardage. Venir au travail c’est une continuation de la maison. On retrouve ses amis et ses proches pour « tirer » sur les autres. On a vu, récemment, pendant la Coupe d’Afrique des Nations. Les bureaux se vidaient quand des matches se déroulaient. On se souvient qu’un Président africain, décédé depuis un bon moment, se rendait chaque jour dans une administration, par hasard, pour constater la présence des fonctionnaires. Dès que ce Président voyageait les gens dansaient. Mort à la tache, ce fut le soulagement. En Afrique, on n’aime pas qui ceux travaillent. On les trouve suspects. A chaque fois que je publie un livre il y a des gens qui ont l’outrecuidance de me dire : « Tu écris beaucoup, comment tu fais ? ». Je dis toujours qu’il y a 24 heures dans la journée. Que de temps utilisés à ne rien faire. Sauf bavarder. Le Président Laurent Gbagbo nous donne un peu les raisons de cette paresse. L’argent que les Africains peuvent avoir gratuitement ,surtout, des hommes politiques. Le Président dit que certaines personnes lui demandent de l’argent rien que pour leur mariage et leur anniversaire. LG doit publier, un jour, ces différentes demandes pour montrer comment nos peuples se ridiculisent en jouant aux mendiants. Dans « L’OS DE LA PAROLE » Madame Adam Ba Konaré écrit : « Je me souviens d’un fait, qui n’a pas besoin de commentaire pour traduire ce qu’on attend du pouvoir, pourvoyeur de ressources. A sa demande, j’avais reçu une dame, du reste digne et respectable. Ses doléances étaient bien fournies, trop fournies même. Un véritable cahier de charges : emploi pour un fils jeune diplômé, véhicule pour un autre aux fins d’une exploitation commerciale, terrain à usage d’habitation et pécule pour le mettre en valeur, fonds de commerce, pour subvenir aux besoins de sa famille, possibilité de me joindre à tout instant. » Elle lui répondit : « Madame, ce n’est pas ça le pouvoir. » Pendant 50 ans le pouvoir c’était la flagornerie pour avoir de l’argent. A son arrivée au pouvoir, LG avait demandé qu’on crée plus de bibliothèques que de discothèques. Avec mes admirateurs on s’est attelé à créer un fan club dont l’objectif est de donner le goût de la lecture. Le Président, à ma demande, nous a donné de l’argent pour récompenser les premiers lauréats du prix Isaïe Biton Koulibaly. De partout, on me disait que je n’ai pas demandé beaucoup, que j’avais donné tout l’argent aux lauréats. Souvent on me demande de lui demander de l’argent. Et je demande pour quoi faire ? Un président doit aider quand il s’agit d’une opération qui intéresse des milliers d’individus et non pour remplir les poches d’un individu. Dans les cinquante ans à venir on espère que les Africains vont s’investir davantage dans le travail et ne vont pas considérer la politique comme un moyen de s’enrichir ou de voir les politiciens comme des gens à tromper pour se faire de l’argent. C’est vrai que certains comportements ont pour origine l’organisation sociale des siècles passés. Les Rois étaient l’alpha et l’oméga, d’où le parti unique. Sarkozy a dit : «L’Afrique ne doit pas vivre sur son passé. » Il est temps de rentrer dans l’histoire contemporaine. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.

Par Isaïe Biton Koulibaly 06/02/2010

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