Au Rwanda, les agents de la fonction publique doivent communiquer le numéro de leur téléphone portable pour que les usagers puissent les joindre facilement. Dans le secteur public comme dans le privé, le mobile abolit les distances.

À la station RECO-RWASCO, plus connue sous le nom d’Electrogaz, de Gikondo, Kigali, le nom et le numéro de téléphone portable de l’occupant sont affichés sur la porte de chaque bureau. En dessous, figurent le numéro et le poste du responsable, en cas d’absence ou de difficulté avec l’agent. Ce matin d’avril dernier, un agent de la logistique de cet établissement public chargé de la production et de la distribution d’eau et d’énergie, est ainsi en butte au mécontentement d’un client : « Pouvez-vous nous dire si le magasinier vient ou pas ? Il tarde à arriver alors que nous l’attendons depuis 30 minutes. » Un coup de fil au chef de ce magasinier et l’agent peut rassurer le client et ses collègues, impatients, eux, de recevoir le matériel de raccordement au réseau : « Attendez un peu. Il est en route. »
Aujourd’hui, il est recommandé à tout fonctionnaire d’afficher le numéro de son portable sur la porte de son bureau. « Le temps où on confiait son numéro seulement à ses proches est révolu, constate une secrétaire de l’administration à Kigali. Avant, si quelqu’un appelait mon patron sur son portable, celui-ci se retournait vers moi pour savoir qui avait donné son numéro à un tiers. Maintenant n’importe qui peut le joindre à tout moment. » « Le mobile nous facilite la vie, apprécie de son côté M. Kanamugire, un parent d’élève de Gikondo. À présent, je peux suivre de plus près le travail scolaire de mon enfant, car son enseignant me communique tout par SMS. Chaque enseignant doit donner son numéro de portable à ses élèves. »

Communication directe et SMS
Les usagers peuvent joindre ceux qui sont chargés de satisfaire leur demande, mais aussi leurs responsables hiérarchiques. Des numéros verts, gratuits, leur permettent de se plaindre auprès du patron. Bon nombre de villageois connaissent par cœur les numéros des grands établissements publics et administrations comme le service de l’Ombudsman (le médiateur national) ou celui des juridictions populaires Gacaca, la police, la commission anti-corruption, etc. « Grâce à cette communication directe, la population peut exposer ses problèmes en toute discrétion et souvent obtenir satisfaction », estime un habitant de Gasabo, Kigali. Il affirme avoir obtenu gain de cause en envoyant un SMS au supérieur d’un gestionnaire qui ne cessait de lui dire de revenir le lendemain : « Il a demandé au concerné pourquoi il ne signait pas mon chèque et celui-ci l’a signé sur place. ». Marcel, de Gikondo, est, lui, convaincu que s’il n’avait pas eu de portable, il n’aurait pas pu participer aux examens de permis de conduire de juin dernier, car la police avait annoncé les dates de ces tests par SMS. Quant à cet agent de la commission électorale, il estime que le mobile va beaucoup aider pendant la campagne : « Des messages d’éducation civique seront envoyés par SMS. Les candidats aussi pourront s’en servir pour faire campagne, collecter des dons… »
Il n’y a pas que le secteur public qui ait été révolutionné par le téléphone portable. Au quotidien, cet appareil rend de multiples services. Les domestiques sont nombreux à posséder des mobiles, parfois remis par leur employeur pour pouvoir les joindre plus facilement. En cas de problème, un bip d’un boy ou boyesse et la patronne ou le patron rappelle pour demander ce qui se passe. « C’est notre code », dit Nyiramana, de Muhanga.

Un trait d’union
Le représentant d’une usine de peinture de Muhanga, souvent à l’extérieur, peut confier son magasin à la garde de son domestique : « Lorsqu’un client veut passer une grosse commande ou demande des choses qu’il ne maîtrise pas, il me met en contact avec lui », se félicite-t-il. Plus méfiants, certains boss refusent à l’inverse que leurs domestiques utilisent cet appareil de peur qu’ils soient distraits par des appels extérieurs. D’autres, au vu du coût des appels, craignent que leurs employés soient tentés de prendre un peu de sous sur les provisions familiales qui leur sont remises.
Un consultant en communication sociale de Kigali, estime néanmoins que globalement « le téléphone est aujourd’hui un trait d’union entre différentes classes sociales du pays. » Selon l’Office rwandais de régulation des utilités publiques (RURA), le nombre d’utilisateurs des mobiles a atteint 2,4 millions en 2009, soit près de deux Rwandais sur dix. Le Rwanda compte trois compagnies de téléphonie mobile.

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Posté par rwandaises.com