En réaction au texte «Visite de la Gouverneure générale du Canada au Rwanda : quels enjeux?» de M. Augustin Baziramwabo –
Cet article de M. Augustin Baziramwabo contient des allégations mensongères et de la désinformation sur le Rwanda. L’auteur profite de la visite au Rwanda de la Très Honorable Michaëlle Jean, gouverneure générale du Canada, pour vider toutes ses rancoeurs à l’égard du régime rwandais actuel et de son président Paul Kagame, histoire de détourner l’attention sur ce qui peut ternir l’image plutôt positive que projette ce pays émergent.
C’est pourquoi nous, membres de l’Association communautaire des Canadiens d’origine rwandaise d’Ottawa-Gatineau, qui ne partageons pas du tout cette vue caricaturale du Rwanda actuel, voulons corriger toutes les contre-vérités, les amalgames et surtout les tendances négationnistes contenues dans cet article.
Dans un flou artistique, mais non moins cynique, l’auteur écrit : «Cette visite qui se déroule alors que les Rwandais commémorent le 16e anniversaire du drame rwandais – l’attentat le 6 avril 1994 contre l’avion de l’ancien chef de l’Etat Juvénal Habyarimana et le génocide rwandais qui a suivi -, devrait être l’occasion, pour Mme Jean d’exprimer sa solidarité avec ce peuple meurtri.»
Vous aurez compris que malgré la subtilité de la forme, il s’agit bien d’une phrase à tendance négationniste car, selon l’auteur, le drame que nous commémorons au mois d’avril de chaque année, serait avant tout l’attentat contre l’avion de Habyarimana et secondairement le génocide qui s’en est suivi et qu’il décrit, lui, comme étant la conséquence de cet attentat! Notez d’ailleurs qu’il se garde bien de parler de génocide contre les Tutsi mais de génocide rwandais, histoire de vouloir banaliser l’un des plus cruels génocides de l’histoire récente de l’humanité.
Le génocide commis contre les Tutsi en 1994 a été reconnu, comme tel, par les Nations Unies et la quasi totalité de la Communauté internationale. Chercher à le nier en le rattachant désespérément à des causes qui n’en sont pas, comme l’attentat contre l’avion de l’ancien Président Juvénal Habyarimana ou la guerre de libération déclenchée par le Front Patriotique Rwandais ( FPR) le 1er octobre 1990, ne relève que du négationnisme.
Espace politique verrouillé
L’auteur accuse le Front Patriotique Rwandais, parti au pouvoir, de totaritarisme d’un parti unique et évoque à cet effet des dispositions légales comme celle qui obligerait toute formation politique à faire partie du «forum des partis» sous sa domination.
Tout d’abord, nous relevons une contradiction majeure dans cette accusation car, on ne peut pas à la fois être totalitaire et baser son système de gouvernance sur la concertation avec d’autres partis! Car forum signifie bien concertation.
Ensuite, il n’existe aucune disposition légale «qui oblige toute formation politique à faire partie du Forum des partis». La disposition qui existe à ce sujet dit ceci : «L’adhésion au Forum n’est pas dans les critères d’enregistrement et d’admission des formations politiques, et la participation au Forum est sans préjudice de leur indépendance respective et de leurs rapports réciproques» (Règlement d’ordre intérieur, article 17).
La vérité est que le forum des partis a été un choix éclairé et courageux que le Rwanda a dû opérer parmi tous les autres systèmes politiques après le génocide, dans le seul but de stabiliser politiquement un pays dont le tissu social venait d’être si profondément déchiré. Aussi, l’auteur n’ignore certainement pas le rôle important et combien néfaste joué dans cette division par les partis politiques en prolifération au Rwanda avant et pendant le génocide.
Le FPR, après avoir gagné la guerre, a préféré partager le pouvoir avec tous les partis de l’opposition qui n’avaient pas trempé dans le génocide, y compris les plus petits d’entre eux auxquels il donnait ainsi la possibilité d’être proportionnellement représentés dans les différentes instances du pouvoir.
Harcèlement et tracasseries
Concernant le soi-disant harcèlement et tracasseries dont seraient victimes les responsables de certains partis d’opposition, spécialement la présidente des FDU (Forces Démocratiques Unifiées), Mme Victoire Umuhoza Ingabire, il s’agit d’une campagne orchestrée depuis son retour d’exil, en janvier dernier, par les mêmes milieux politiques extérieurs hostiles au régime actuellement au pouvoir à Kigali. On se souvient que dès son arrivée au Rwanda, Ingabire n’a pas cessé de se livrer à des discours incendiaires et divisionnistes dans un pays où les efforts demandés à tous, après les drames du passé, visent plutôt l’unité et la réconciliation. On se souvient aussi de son acharnement à couvrir son proche collaborateur, Joseph Ntawangundi, reconnu pourtant coupable par le tribunal d’avoir participé au génocide contre les Tutsi en 1994. Elle accusait les autorités rwandaises «d’avoir arrêté, pour motif de génocide, un innocent qui n’était même pas au Rwanda au moment des faits qui lui sont reprochés». La suite, on la connait, elle a dû se rétracter après que le concerné eut bel et bien reconnu ses crimes et demandé pardon! D’où la petite question: «Qui harcèle qui?»
Pour le moment, la présidente des FDU aurait maille à partir avec la justice, puisqu’elle doit répondre de trois chefs d’accusation, à savoir le divisionnisme ethnique, la négation du génocide et l’appartenance à une organisation terroriste. Nous avons appris qu’elle dispose d’un avocat et qu’elle aura donc droit à un procès juste et équitable, n’en déplaise à l’auteur qui n’y voit que l’arbitraire du FPR, tout comme cela avait été diffusé partout pour abuser l’opinion lors de l’arrestation de Monsieur Joseph Ntawangundi.
Médias sous influence
L’auteur nous livre une espèce d’amalgame indescriptible, mélangeant la récente suspension des journaux «Umuseso» et «Umuvugizi» par le Haut Conseil des Médias et l’adoption de l’anglais comme deuxième langue officielle par le gouvernement! Pour rester dans le sujet de l’intitulé, parlons seulement de ces fameux journaux suspendus.
Pour beaucoup de Rwandais qui lisaient régulièrement ces journaux, la décision du Haut Conseil des Médias a été saluée avec un grand soulagement, car ces médias ne cessaient de hanter les esprits en avivant dans le public le souvenir macabre des médias de la haine ci-haut cités qui avaient servi à diaboliser les Tutsi pendant le génocide en 1994. Les deux hebdomadaires sont accusés, entre autres, «d’incitation de l’armée et de la police à l’insubordination aux ordres de leurs chefs», de «publication d’informations portant atteinte à l’ordre public», d’«appel aux contribuables à ne pas payer leurs impôts», de «diffusion de rumeurs» ainsi que de «diffamation» et d’«immixtion dans la vie privée des gens». Il est très curieux que l’auteur se base sur deux cas flagrants de médias destructeurs pour dénier au Rwanda ses efforts de libéralisation de la presse, alors que vingt radios privées et une soixantaine de journaux également privés opèrent librement dans ce petit pays, à peine plus grand que 26 000 km2.
Justice de répression
L’auteur de l’article fait spécifiquement un procès aux tribunaux «Gacaca» qu’il qualifie cyniquement de «justice du vainqueur». Pourtant, ce système judiciaire, puisé dans le patrimoine culturel rwandais après le génocide en 1994, a été le résultat d’une large consultation entre le gouvernement, la société civile et toutes les confessions religieuses, comme étant le seul système capable à la fois d’identifier les criminels, d’assurer une justice participative puisque la quasi totalité des citoyens avaient été d’une manière ou d’une autre impliqués dans ce génocide, et finalement d’assurer une justice non seulement punitive, mais aussi pédagogique visant l’éradication de l’impunité et la recherche de l’unité brisé des Rwandais. A l’heure actuelle, le bilan est plutôt positif puisqu’un million de jugements ont été prononcés à travers le pays, que la stabilité et la paix sont revenues aussi bien dans les villes que sur les collines où les familles des victimes et celles des bourreaux continuent à réapprendre à vivre ensemble et à partager les activités socioéconomiques au quotidien.
Conclusion
En guise de conclusion, nous estimons que 16 ans après un génocide aussi dévastateur, l’état des lieux au Rwanda aurait pu être effectivement calamiteux, vu l’abîme dans lequel les anciens régimes dont M. Baziramwabo reste nostalgique l’avaient plongé, sans qu’on puisse s’en étonner outre mesure.
Mais, la réalité est tout autre; beaucoup d’observateurs sérieux s’accordent pour dire que le Rwanda est plutôt un pays transformé et l’un des cas de succès les plus remarquables en Afrique. Aujourd’hui, le Rwanda est unanimement reconnu comme étant politiquement et démocratiquement stable, avec tolérance zéro pour la corruption, et ayant une vision d’atteindre le statut d’un pays à revenu moyen en 2020 grâce surtout au développement du secteur privé.
Lambert Rangira, président
Au nom du Comité de l’Association communautaire des Canadiens d’origine rwandaise d’Ottawa-Gatineau
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Posté par rwandaises.com