Tentative de coup d’Etat ou acte terroriste ? Malgré les versions différentes proposées par le Ministre de l’Information congolais Lambert Mende,  il semble bien que, dimanche dernier,  c’est de justesse que le président Kabila a échappé à l’attaque de sa résidence, menée par plusieurs dizaines d’hommes lourdement armés.  Mardi, le président a dirigé une réunion des gouverneurs des provinces de l Est et a annon,c sa décision de lever l’interdiction de vendre les minerais.

Plus de peur que de mal donc… Il n’empêche que cette attaque a fait des morts, une dizaine au moins parmi les assaillants et  plusieurs membres de la garde républicaine ; une trentaine de prisonniers sont toujours interrogés et leur appartenance exacte n’a pas encore été révélée. Si l’on fait abstraction de toutes les supputations et autres rumeurs fantaisistes qui circulent sur Internet,  les faits sont là : s’il n’avait pas quitté son domicile dimanche en fin de matinée, mu par une impulsion soudaine, ou mystérieusement averti, peut-être par des amis bien intentionnés et outillés pour écouter les conversations téléphoniques, le chef de l’Etat congolais aurait probablement été  « liquidé ».  Or, qu’on le soutienne ou non, que l’on se félicite ou non de sa politique, un autre fait doit être rappelé : en 2006, Joseph Kabila  a été élu à l’issue d’un scrutin reconnu comme démocratique par la communauté internationale et cette élection scellait un processus de paix entamé en 2002.

L’attaque menée dimanche, qui avait été précédée par  des affrontements militaires survenus à l’aéroport de Lubumbashi le 4 février dernier, aurait donc, si elle avait réussi, décapité la pyramide politique congolaise et risqué de plonger le pays dans le désordre.

Or jusqu’à présent ces évènements, qui auraient û être dramatiques, n’ont suscité aucune réaction ! Les institutions congolaises (Parlement, Sénat) où  l’AMP (Alliance pour une majorité présidentielle) est majoritaire et qui sont le socle de la démocratie, demeurent muettes, sans réaction. Le silence n’est pas moins assourdissant dans le chef de la « communauté internationale », qu’il s’agisse des pays amis, dont la Belgique, qui avaient proclamé haut et fort leur soutien multiforme à la jeune démocratie congolaise, ou des pays voisins liés à la RDC par des accords de sécurité…

Or on sait que le Rwanda, si souvent mis en cause dans la région, tient beaucoup à sa bonne entente avec Kinshasa car elle se traduit par des opérations militaires menées dans l’Est  contre les groupes armés hutus,  que l’Angola, même si un litige l’oppose à Kinshasa à propos du plateau continental, déteste plus que tout les aventures politiques et l’instabilité chez son grand voisin, tandis que le président ougandais Museveni  et son voisin tchadien viennent de remporter les élections…

Si l’absence de réactions des pays de la région surprend,  la passivité de l’Europe étonne plus encore : attend-on des preuves supplémentaires ? Estime-t-on que, pour être qualifié de réel et dissiper les soupçons de montage, un coup d’Etat doit nécessairement réussir ?  Ou bien considère-t-on que, dans un pays qui se prépare à organiser des élections en novembre et où le mode de scrutin a été modifié, à la hâte certes mais sans illégalité, la violence demeure une manière légitime de modifier les équilibres du pouvoir ?  Quant à la Monusco, qui est aussi censée accompagner la jeune démocratie congolaise et  protéger ses citoyens dans l’Est, elle observe la même discrétion que les autres partenaires occidentaux…

A ces questions, une seule réponse est opposée : on n’y voit pas clair.  Pas assez, pas encore….  Si les Congolais veulent pouvoir compter leurs vrais amis, il leur appartient donc de faire toute la lumière sur ces évènements, d’en retracer la chronologie et d’en remonter les fils, de nommer les commanditaires éventuels et de faire comparaître les coupables devant des institutions judiciaires indépendantes…

Jusqu’à présent, on est loin de ces coups de projecteur et si le président Kabila semble avoir repris ses audiences, il aurait peut-être intérêt  à couper court aux rumeurs,  à apparaître publiquement en donnant sa version des faits…

L’opacité du pouvoir ne peut qu’encourager les ténébreuses menées des ennemis de la démocratie et l’étrange silence des « amis du Congo »…

 

le carnet de Colette Braeckman

Posté par rwandaises.com