PARIS, France, 17 octobre 2011 /

African Press Organization (APO)

Tribune de Bernard Valero, porte-parole du ministère des Affaires étrangères et européennes, parue dans « Libération » (17 octobre 2011)

Je réagis à l’article de Dominique Franche que vous avez publié le 30 septembre sur l’honneur de la France au Rwanda et je veux dire mon indignation. Cet article à charge cherche en quelques lignes à démonter le travail considérable d’enquête conduit par la mission Quilès de 1998, et dont le rapport compte plusieurs milliers de pages et les auditions de tous les responsables et autorités concernés. Aucun rapport, ni aucune étude n’ont depuis lors interrogé et entendu autant de témoins. La mission d’enquête a conclu sans ambiguïté à l’absence de responsabilités de la France dans le génocide.

Bien sûr, on peut toujours dire que notre pays aurait pu faire mieux, mais ce serait aussi intéressant d’avoir l’honnêteté de rappeler certains faits.

Que c’est la France, la première, qui a décidé un embargo sur les armes, le 8 mai 1994. Que c’est aussi la France par la voix de son ministre des Affaires étrangères de l’époque, Alain Juppé, le 15 mai 1994, qui a parlé la première de « génocide ». Que c’est encore et enfin la France qui est le seul Etat au monde à avoir risqué la vie de ses soldats pour sauver des Rwandais et pour mener la seule opération humanitaire d’ampleur au Rwanda. Le gouvernement français a obtenu le feu vert du Conseil de sécurité par la résolution numéro 929 en date du 22 juin 1994.

L’opération Turquoise s’est exactement déroulée dans les conditions fixées par la résolution des Nations unies. Elle a permis de sauver des centaines de milliers de vies. Turquoise a également protégé des dizaines de sites de regroupement de civils tutsis et permis aux ONG d’accéder en toute sécurité à ces populations. Son mandat n’était en aucune manière de faire la guerre, mais de mener une opération humanitaire, nettement définie dans le temps et dans l’espace. Elle l’a remplie dans des conditions qui font honneur à l’armée française et à notre pays, jusqu’à ce qu’enfin arrivent sur place les Casques bleus de la Minuar II, fin août 1994.

Il faudrait quand même avoir l’honnêteté de rappeler tout cela et de souligner aussi qu’aucun autre pays ne s’était mobilisé comme nous l’avions fait à l’époque.

Devant la carence de la communauté internationale et les obstacles mis par certaines grandes puissances aux demandes du secrétaire général de l’ONU, la France a été la seule à avoir un sursaut de courage.

Qu’a fait le reste de la communauté internationale ? Avant de mettre en cause la France et ses responsables publics, civils et militaires, il serait bon que l’on s’interroge sur l’attitude de ceux qui n’ont rien dit, qui n’ont rien fait, qui n’ont rien tenté. Pourquoi n’en parlez-vous jamais et pourquoi ne posez-vous pas aussi ces questions ?

Non content de ressortir des accusations sans fondement, l’article pousse l’outrance à avancer des hypothèses totalement absurdes (la France qui aurait décidé de tirer sur l’avion du Président). Trop c’est trop.

Finalement, la personne qui a le mieux répondu à la question que posait Libération à sa une du 12 septembre (« Génocide rwandais : la France s’excusera-t-elle ? »), c’est le président Kagame lui-même lorsqu’il a dit, sur le perron de l’Elysée, officiellement et comme pour clore ce débat inutilement prolongé : « Je n’attends pas d’excuses de la France. »

SOURCE : France – Ministry of Foreign Affairs

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