Aucun des deux prétendants à la présidence de la commission de l’Union Africaine n’ayant réussi à s’imposer ce week-end, d’autres candidatures devront être soumises dans quelques mois
Par Redaction Grioo.com
Une situation de blocage inédite : ni Jean Ping ni Nkosazana Dlamini-Zuma ne prendra la tête de la commission de l’Union Africaine
Nkosazana Dlamini Zuma briguait la présidence de la commission de l’Union Africaine face à Jean Ping


C’était l’un des enjeux du sommet de l’Union Africaine ce week-end à Addis Abeba : l’élection du président de la commission de l’Union Africaine. Jean Ping était candidat à sa propre succession, mais devait faire face à une concurrente de poids en la personne de Nkosazana Dlamini Zuma, ancienne ministre des affaires étrangères sud-africaine (et actuelle ministre de l’intérieur), qui était candidate au poste. Le camp sud-africain affichait une confiance qui avait surpris les observateurs.

Lors du premier tour de scrutin, Jean Ping a obtenu 28 voix et Nkosazana Dlamini-Zuma 25. Lors du second, Jean Ping n’avait plus qu’une voix d’avance : 27 voix contre 26. Lors du troisième tour, Jean Ping obtenait 29 voix contre 24. Conformément au règlement, Nkosazana Dlamini-Zuma se retirait pour laisser Jean Ping seul en piste. Mais surprise, le diplomate gabonais ne parvenait pas à obtenir les deux tiers des voix requises puisqu’il n’en obtenait que 32 au quatrième tour, insuffisant pour être réélu!

« Aucun des deux candidats ne s’est imposé, les prochaines élections auront lieu en juin  » a déclaré le président zambien Michael Sata. Le président togolais Faure Gnassingbé a aussi confirmé qu’aucun des deux candidats ne s’était imposé. C’est le kenyan Erastus Mwencha, vice président de la commission de l’Union Africaine, qui assurera la présidence jusqu’au mois de juin prochain.

L’offensive diplomatique de l’Afrique du Sud
Face à la concurrence de Nkosazana Dlamini Zuma, Jean Ping n’a pas réussi à se faire réélire
© ap


En coulisses, il se disait que Jean Ping avait le soutien de Paris et de Washington, ce que l’ambassade des Etats-Unis en Afrique du Sud, interrogée par le Mail & Guardian sud-africain, a démenti ce week-end : « les Etats-Unis considèrent que la sélection du président de la commission de l’Union Africaine dépend entièrement des pays africains. Contrairement aux spéculations, les Etats-Unis n’ont pas de candidat préféré, et ont maintenu en permanence leur neutralité vis à vis des possibles candidats au poste ». Une déclaration qu’il ne faut pas forcément prendre au pied de la lettre.

L’Afrique du Sud avait mené une intense activité diplomatique ces derniers mois pour promouvoir la candidature de Nkosazana Dlamini-Zuma et déloger Jean Ping. Selon des sources proches du ministère des affaires étrangères sud-africaines qui ont parlé au Mail & Guardian, l’Afrique du Sud entendait utiliser de la même stratégie que celle qui a vu la demande de Mouammar Kadhafi d’une création des Etats-Unis d’Afrique rejetée lors du sommet qui s’était tenu au Ghana en 2007. Avant ce sommet, Kadhafi s’était attirée les bonnes grâces de plusieurs pays en payant leurs arriérés vis à vis de l’Union Africaine.

« A l’époque, nous avions dit aux chefs d’Etat dont les pays dépendaient de Kadhafi : Soyez d’accord avec lui en apparence, mais ne votez pas pour lui lors du vote secret. Nous faisons la même chose avec les pays francophones qui dépendent de la France pour leur survie en leur disant : Dites que vous êtes d’accord pour voter pour Ping, mais une fois que vous avez votre bulletin de vote, votez en faveur de Dlamini-Zuma. » Si le lobbying sud-africain n’a pas suffi à faire élire Dlamini-Zuma, il a clairement réussi à évincer Jean Ping de la présidence de la commission de l’Union Africaine.

La présidence de la commission de l’Union Africaine suscite de nouveau l’intérêt
Jacob Zuma et l’ambassadeur angolais Arcanjo Nascimento portent un toast avec Nkosazana Dlamini-Zuma à Addis Ababa samedi
© Gcis/Elmond Jiyane


Lorsque la non-élection de Jean Ping au quatrième tour a été annoncée, la délégation sud-africaine a commencé à danser et à chanter. Dimanche (29/01/12), Paul-Simon Handy, directeur des études à l’Institut d’études de sécurité (ISS) de Pretoria interrogé par Xinhua, affirmait qu’aucun des deux candidats ne serait élu au premier tour parceque l’Afrique du Sud avait réussi à obtenir un soutien s’étendant au delà de l’Afrique australe, sa traditionnelle zone d’influence.

Plusieurs pays d’Afrique de l’est, voire même des pays d’Afrique de l’ouest francophone, avaient promis de donner leur vote à Nkosazana Dlamini Zuma. Paul Simon-Handy décryptait aussi l’intérêt qui était désormais porté à la présidence de la commission de l’Union Africaine : « Dans tous les cas, ce que la rivalité autour de la Commission nous révèle, c’est que les pays africains ont réalisé l’importance de l’Union africaine, de contrôler une organisation panafricaine qui peut leur donner une voix dans le concert plus global des nations. D’ailleurs, on soupçonne l’Afrique du Sud de vouloir contrôler la Commission de l’Union africaine pour mieux faire entendre sa voix dans les discussions relatives au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies. Dans tous les cas, l’Union africaine regagne en intérêt, elle devient finalement le lieu véritable de la politique continentale (…) c’est plutôt une bonne nouvelle. »

Pour rappel, la commission de l’Union Africaine comprend dix membres (y compris son président). Elle applique les politiques définies par les chefs d’Etat de l’Union Africaine, coordonne les activités et les réunions. Le président de la commission donne souvent le ton pour l’Union Africaine, et exerce une très grande influence diplomatique officielle et en coulisses, ainsi qu’en témoigne les sollicitations dont Jean Ping était l’objet lors des crises libyennes et des ivoiriennes.

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Posté par rwandanews